Le chantier pharaonique du canal de Panama (graphique)

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102 ans après son ouverture, le canal de Panama s’offre une seconde jeunesse. Un nouveau jeu d’écluses a été inauguré en grande pompe ce dimanche 26 juin.

Le chantier pharaonique du canal de Panama (graphique)
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Jusqu’ici, ce point de passage entre deux océans fonctionnait de la manière suivante. Un cargo venant de l’Atlantique devait monter, via une série de sas, à 27 m au-dessus du niveau de la mer pour rejoindre un lac artificiel, le Lac Gatun. Il devait alors le traverser pour emprunter un chenal percé dans la roche, la passe de Culebra. Pour ensuite effacer le dénivelé et trouver le Pacifique. Ce trajet de 77 km réclamait une dizaine d’heures. Visionnaire. La preuve : à partir des années 1980, le dispositif avait donné son nom à une classe de navires : les “Panamax” (4.500 conteneurs).

Seulement voilà, la mondialisation de l’économie s’est accélérée à partir de 1995. Les transporteurs ont réagi en accroissant le tonnage de leurs navires. Une course à la taille s’est engagée surtout dans les porte-conteneurs. Et les nouvelles générations, dont les “Post Panamax” (8.000 conteneurs), ne pouvaient plus passer l’isthme. Panama risquait de perdre sa position. Car d’autres routes étaient utilisées. Les bateaux reliant Shanghai à New York pouvaient ainsi passer par l’ouest et le canal de Suez, qui est plus large et est au niveau de la mer. Ou encore choisir l’est mais décharger leurs cargaisons en Californie et poursuivre l’acheminement par voie de train.

Avec l’adjonction d’écluses élargies, la petite république revient dans la course. Et elle y a mis le prix : 5,2 milliards de dollars, dont plus au moins 2 milliards de surcoûts, selon la presse spécialisée.

Pour quels effets sur le transport maritime mondial ? Un : l’ouvrage va bénéficier avant tout aux nations qui l’utilisent le plus. Dans l’ordre : les Etats-Unis, la Chine, le Japon et les pays andins (la Belgique est 25e dans le classement). Deux : Panama représente actuellement 6 % du trafic maritime mondial. Cela signifie 13.500 transits par an, qui vont pouvoir être doublés. L’impact devrait rester mesuré. D’autant que les derniers géants des mers (18.000 conteneurs) ne sauront toujours pas s’y aventurer. Trois : la compétition va s’intensifier avec le canal de Suez qui a ouvert en août 2015 une seconde voie de navigation sur une partie de ses 193 km, afin de fluidifier son trafic. Quatre : cette inauguration a lieu alors que le fret maritime est en pleine surcapacité. Aujourd’hui, la course à la taille a été trop vite, l’économie chinoise a ralenti, et le commerce mondial s’est essoufflé. Paradoxal. Enfin, cinq : les vraies ruptures viendraient plutôt de l’ouverture de routes au pôle nord ou du percement d’un canal au Nicaragua. Mais la première solution reste dangereuse et la seconde impayable…

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