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Quand Pékin souffle le froid-chaud…

La semaine a commencé par une fausse note. Ou, plus exactement, par ce que les marchés ont considéré comme une mauvaise nouvelle en provenance de Chine. Peut-être à tort…

La semaine a commencé par une fausse note. Ou, plus exactement, par ce que les marchés ont considéré comme une mauvaise nouvelle en provenance de Chine. Peut-être à tort… Quand le Premier ministre Wen Jiabao signale lundi, devant les 3.000 membres du Congrès national du peuple, que l’objectif de croissance annuelle est abaissé à 7,5 % pour les années à venir, l’Occident se focalise sur ce chiffre. Avec le décalage horaire, l’information est connue dès l’ouverture des Bourses en Europe. Elles ne quitteront pas la zone rouge, suivies en cela par leur consoeur américaine.

Les investisseurs occidentaux ont-ils tort de se braquer de la sorte ? Au moins partiellement, oui, pour deux raisons. D’abord, ce chiffre n’a pas la signification qu’on lui prête. Certes, 7,5 %, cela semble bien faible en regard des 10 % de croissance moyenne que la Chine a connue depuis 2003. Encore faut-il savoir que l’objectif officiel était de 8 % “seulement”. La différence est donc modeste à ce niveau et on peut imaginer que les autorités espèrent en réalité une croissance guère inférieure à ce qu’elle fut récemment. Ensuite, cette légère inflexion des ambitions a surtout valeur de symbole d’un changement de politique économique. Pour autant, bien entendu, que ce virage soit assumé par les dirigeants qui succéderont en fin d’année à l’équipe actuelle…

Wen Jiabao prône en effet une économie chinoise plus équilibrée. Cela signifie notamment une moindre dépendance à l’égard des exportations, la demande interne prenant le relais. Cette dernière représente un tiers à peine de l’économie chinoise, contre plus de la moitié dans les pays occidentaux et même 70 % aux Etats-Unis. En affirmant cela, le Premier n’a pas vraiment créé la surprise : voilà plusieurs années que divers économistes recommandent ce virage à la Chine. La crise de 2008-2009 y fut en effet durement ressentie. Le pays a alors pris conscience de la vulnérabilité engendrée par son statut d’usine du monde. Et peut-être est-il à présent acquis à l’idée d’une croissance durablement plus faible en Occident. Une conviction confirmée quelques heures après le discours de Wen Jiabao : dans l’Union européenne, premier client de la Chine, le secteur des services s’est à nouveau contracté en février, après le fugace rebond enregistré en janvier.

Ceci a conforté les Bourses dans leur mauvaise humeur.

Le virage économique annoncé par Pékin a été bien compris en Europe et aux Etats-Unis, mais il laisse sceptique : la Chine ne l’a-t-elle pas évoqué à plusieurs reprises déjà, sans lendemain ? Autre sujet de perplexité et même d’inquiétude : l’abaissement officiel de l’objectif de croissance n’a probablement pas seulement valeur de symbole, mais aussi d’avertissement. A usage interne comme externe. C’est évident : si le reste du monde ralentit, la Chine ne peut rester en lévitation. Il n’y aurait donc pas là motif à frayeur nouvelle.

Reste l’essentiel : la deuxième puissance du monde investissant moins et consommant plus, qu’est-ce que cela peut signifier pour l’Europe ? Comme les exportateurs de matières premières que sont l’Australie et le Brésil, les équipementiers, allemands en particulier, souffriraient quelque peu d’une Chine moins avide d’usines et d’infrastructures. Les entreprises axées sur les biens de consommation, par contre, à défaut même de vendre là-bas en direct, rencontreraient moins de concurrence ici, les fabricants chinois écoulant davantage chez eux. Mais tout cela n’est encore que du long terme… hypothétique.

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