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Un gouvernement fédéral en 2020 ?

La Belgique a traversé toute l’année 2019 sans gouvernement fédéral de plein exercice. Bien malin qui peut dire quand cessera cette situation inconfortable, ni même si elle peut cesser sans un renvoi de la balle dans le camp de l’électeur, en convoquant un scrutin anticipé en 2020.

Jusqu’à présent, le citoyen belge ne ressent pas trop les effets de cette non-gouvernance. Ou alors, il s’agit d’effets positifs. Ces derniers mois, la croissance économique s’est montrée un peu plus vigoureuse dans notre pays que dans la zone euro. Cela s’explique notamment par… l’absencede gouvernement fédéral. Le tax shift initié sous Charles Michel a permis d’alléger le coût du travail et de doper un peu le pouvoir d’achat. Cela apporte indéniablement de l’oxygène à l’économie belge. Mais cet oxygène coûte cher. Un exécutif soutenu par une majorité parlementaire aurait alors pris des mesures compensatoires pour canaliser toute dérive budgétaire. Mais là, depuis un an, c’est comme si les comptes publics n’intéressaient plus le monde politique. Le déficit public a plus que doublé par rapport à 2018 et les prévisions de la Banque nationale comme du Bureau du Plan laissent poindre un trou de plus de 11 milliards d’euros à l’horizon 2022. Même si les entités fédérées ont pris, elles aussi, quelques libertés avec l’orthodoxie budgétaire, ce trou provient essentiellement du niveau fédéral.

La première mission d’un nouveau gouvernement fédéral sera donc de procéder à un assainissement budgétaire très costaud. Les 11 milliards, c’est un tiers du budget de l’Etat hors sécurité sociale. L’objectif est impossible à atteindre en immunisant les quelque 85 milliards de dépenses de la sécu ou en refusant d’envisager de nouvelles recettes fiscales ou parafiscales. C’est-à-dire en respectant les promesses phares des principaux partis. On comprend dès lors les extrêmes réserves des uns et des autres à avancer sur la voie d’un compromis. Or, plus ils attendent et plus le déficit se creusera. Au cours de la législature, les dépenses sociales devraient croître deux fois plus vite que l’économie en général, en raison des coûts liés au vieillissement (pensions et soins de santé). Cette explosion des coûts était largement annoncée mais elle n’a hélas pas été suffisamment anticipée, en dépit du recul de l’âge légal de la pension.

Pour compliquer encore l’équation, les recettes habituelles ont montré leurs limites. Miser sur la compétitivité et les créations d’emploi ne suffit plus, budgétairement parlant, dans l’économie contemporaine. Les indicateurs de la Belgique en attestent : le déficit explose en dépit de la création de 260.000 emplois au cours de la législature écoulée et des 170.000 jobs encore attendus d’ici 2022. Sans doute parce que ces emplois sont souvent mal rémunérés et qu’ils ont nécessité d’importants allégements parafiscaux. Ils génèrent alors trop peu de recettes pour l’Etat.

Une récente étude de la Banque nationale nous montre que la modération salariale n’a pas permis à la Belgique de conserver ses parts de marché à l’exportation. Parce que, note la BNB, les entreprises ont utilisé une partie de la réduction des coûts salariaux pour étendre leurs marges plutôt que pour comprimer leurs prix (et donc gagner de nouveaux marchés). Les optimistes y verront une manière de thésauriser afin de financer de futurs investissements pour la transition écologique des modes de production. Peut-être. A charge alors au futur gouvernement de veiller à ce que les trésoreries des entreprises servent effectivement les intérêts à long terme. Pas sûr que cette tâche facilite la voie du compromis entre les partis de droite et de gauche.

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