Russie: la récession s’aggrave et les espoirs de reprise s’éloignent

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La récession qui frappe la Russie s’est aggravée plus que prévu au deuxième trimestre, une mauvaise surprise pour les autorités russes qui voient en outre leurs espoirs de reprise refroidis par la rechute des cours du pétrole.

La première estimation du produit intérieur brut, rendue public lundi par le service des statistiques Rosstat, reflète la gravité de la crise économique dans laquelle est plongé le pays à cause du plongeon des prix de l’or noir, sa première source de revenus avec le gaz, et les sanctions liées à la crise ukrainienne. Estimée à 4,6% par rapport au deuxième trimestre 2014, la contraction de l’activité (la pire depuis 2009) marque non seulement une nette dégradation par rapport à la baisse du premier trimestre (-2,2%), mais aussi une déception pour le gouvernement qui avait prévu -4,4%.

Pour nombre d’économistes, la période d’avril à juin devrait marquer la période la plus difficile de l’année pour l’économie russe, qui subit les effets de la pire crise monétaire depuis l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, 15 ans plus tôt. L’effondrement du rouble de décembre dernier a en effet provoqué une flambée des prix, affectant pouvoir d’achat et consommation, à laquelle s’est ajoutée au deuxième trimestre une forte baisse de la production industrielle. Pour l’ensemble de l’année 2015, la plupart des économistes prévoient une chute du PIB de plus de 3% après une croissance de 0,6% en 2014. Les autorités russes espèrent une amorce de reprise dès le troisième trimestre et une croissance de plus de 2% l’an prochain, scénario jugé de moins en moins probable. “Vu le nouvel affaiblissement des cours du pétrole, il est trop tôt pour parler d’une reprise”, a commenté Liza Ermolenko, du cabinet Capital Economics. Les chiffres mensuels du marché automobile ont donné lundi une illustration de la crise, les ventes de voitures neuves chutant en juillet de 27,5% sur un an.

La banque centrale rassurante

“Le deuxième trimestre pourrait marquer le point bas du cycle actuel”, concède Oleg Kouzmine, économiste de la société financière Renaissance Capital.

Mais si cet expert prévoit une chute de 3,6% du PIB sur l’année, il souligne qu’une telle prévision se base sur un baril à 60 dollars, contre moins de 50 dollars actuellement. “Si le pétrole reste à ses niveaux actuels, la chute pourrait être plus proche de 4%”, ajoute-t-il, interrogé par l’AFP. La rechute du marché pétrolier a déjà eu pour effet de quasiment réduire à néant le rebond du rouble du printemps, qui avait permis aux autorités russes de marteler que le pire de la tempête était passé pour l’économie russe. L’ampleur de la dépréciation de la monnaie russe (-20% en un mois et demi face au dollar) fait craindre une nouvelle déstabilisation financière, voire une nouvelle poussée de l’inflation qui commençait pourtant à refluer après avoir frôlé un taux annuel de 17% au printemps.

Pour l’instant, la banque centrale s’est montrée rassurante

Lundi encore, sa présidente Elvira Nabioullina, reçue par Vladimir Poutine, l’a répété: le système bancaire russe, fragilisé par la crise monétaire, est “hors de danger” et “stable”. Après des mois difficiles marqués par des faillites en série et des pertes, le secteur recommence à dégager des bénéfices et à délivrer les crédits dont l’économie a besoin pour repartir. Mais l’institution a laissé entendre, lors de sa dernière réunion fin juillet, qu’elle pourrait, face aux turbulences actuelles, marquer une pause dans ses baisses de taux, pourtant réclamées à grands cris par les entreprises et le gouvernement. Son taux directeur (11%), loin des niveaux extrêmes de l’hiver décidés pour défendre le rouble, reste punitif pour l’activité.

La Russie doit également faire face à la pression des sanctions occidentales, à laquelle elle a répondu par un embargo alimentaire qui vient d’être prolongé. Signe que les Etats-Unis comptent maintenir la pression sur Moscou, ils ont décidé de viser, a rapporté l’agence Bloomberg, l’un des gisements gaziers clés pour Gazprom dans l’Extrême orient russe. Dans un récent rapport, le Fonds monétaire international a estimé que des sanctions appliquées sur une longue période pourraient provoquer une perte totale atteignant 9% du PIB.

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