Retour de flamme chinois en 5 questions

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Bourse, yuan, croissance : l’économie chinoise dévisse. Que doivent craindre nos entreprises de cette situation ? Eléments de réponse.

Quand l’ogre chinois tousse, le reste du monde s’enrhume. Alors que les prévisions tablent toujours pour cette année sur une croissance de l’économie chinoise de 7 % (ce qui selon certains experts ne correspond plus à la réalité), la récente dévaluation du yuan par Pékin pour soutenir son économie (environ 5 % par rapport au dollar) ne sera pas indolore pour la compétitivité déjà difficile de nos entreprises.

1. Quelles conséquences pour nos exportations ?

Pour Geoffrey Minne, économiste chez ING Belgique, l’impact direct de la dévaluation du yuan devrait rester limité pour nos entreprises. Le poids des exportations vers la Chine dans le total des exportations belges s’élève en effet à 2 % à peine. En revanche, “l’économie belge dépend beaucoup des exportations allemandes, fait-il remarquer. Or, l’Allemagne est très exposée à la Chine (près de 6 % du total de ses exportations, Ndlr). C’est surtout via ce canal que nos entreprises, qui fournissent les entreprises européennes, et notamment allemandes, exportant vers la Chine, devraient être affectées.” Un avis que partage Jean-Pierre Marcelle, en charge des investissements étrangers en Wallonie au sein de l’Awex, qui souligne que la baisse du yuan aura également un impact dans la zone d’influence de Pékin. “Des produits chinois pourraient, suite à cette dévaluation, être plus attractifs pour des pays vers lesquels nos entreprises belges et wallonnes exportent et priver celles-ci de marchés existants.”

2. L’impact pour nos entreprises en Chine ?

Tout dépend de comment elles y font leurs affaires. “Selon qu’elles utilisent le yuan ou pas, certaines vont être avantagées et d’autres pas, prédit Geoffrey Minne. L’un des objectifs du gouvernement chinois est de relancer la croissance, notamment sur le plan de l’appareil productif, qui subit de plein fouet le ralentissement. La dévaluation du yuan va rendre les produits chinois plus intéressants, y compris ceux qui sont fabriqués là-bas par des entreprises belges.”

3. Moins de touristes chinois ?

La dévaluation du yuan touche directement le porte-monnaie des Chinois. C’est une mauvaise nouvelle pour le tourisme et le luxe made in Europe qui devraient souffrir de cette perte de pouvoir d’achat. Plus de 100 millions de Chinois voyagent en effet chaque année à l’étranger. Les produits haut de gamme, en particulier, sont très prisés par ceux-ci (chocolats, cosmétiques, maroquinerie, vêtements de marque, etc.). “Les actions des principales entreprises de ce secteur ont d’ailleurs été particulièrement en baisse la semaine dernière à la Bourse de Paris, pointe Geoffrey Minne. Un yuan plus faible face à l’euro risque de pousser une partie des touristes chinois à acheter en Chine plutôt que dans les pays qu’ils visitent.”

4. Quid des investissements chinois en Belgique ?

Jean-Pierre Marcelle se veut rassurant quant à la capacité de la Chine d’investir à l’étranger (environ 5 % du total des investissements étrangers en Wallonie). “La dévaluation de la monnaie chinoise a sans doute moins d’impact sur la volonté d’investir à l’étranger des industriels chinois que sur la balance des exportations Belgique-Chine. Si la situation économique continue à se dégrader en Chine, il n’est d’ailleurs pas impossible de voir d’importants montants de capitaux quitter la Chine pour trouver refuge dans des économies plus stables… telles les nôtres.”

5. Pékin entre-t-il dans la guerre des monnaies ?

Pour l’économiste français Christian de Boissieu, la Chine dévalue sa monnaie avec des ajustements à répétition et ce n’est pas près de s’arrêter. “L’arrimage au dollar est de plus en plus ténu, écrivait-il voici quelques jours dans Les Echos. La guerre des changes à laquelle participent agressivement le Japon, et de manière plus feutré la zone euro, pourrait s’intensifier dans les mois qui viennent.” Avec la baisse du yuan, la Fed pourrait décider de ne pas relever ses taux comme attendu, histoire de ne pas réévaluer le dollar et de ne pas pénaliser ainsi les exportations américaines… vers la Chine. De quoi ici aussi mettre nos entreprises sous pression.

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