Les petits salaires américains démunis face au coronavirus

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Ils sont en première ligne, mais sont les moins protégés en raison de leurs difficultés à boucler les fins de mois: les petits salaires aux Etats-Unis n’ont pas les reins assez solides financièrement pour arrêter de travailler afin d’éviter la propagation du coronavirus.

Coursiers, préposés au courrier, serveurs, femmes de ménage, aides à domicile, cuisiniers, hôtesses d’accueil, barmen, maçons, bagagistes: ils sont des millions d’employés à ne pas disposer de filet de sécurité s’ils ne se rendent pas au travail.

S’auto-confiner, comme le conseillent les autorités, leur reviendrait à courir le risque d’être expulsés de chez eux, faute de pouvoir payer le loyer, ou de vivre dans le noir à cause d’une facture d’électricité non honorée.

“Ils ne peuvent pas vivre sans paie. Ils n’ont pas d’argent dans des comptes épargne qui leur permettrait de payer leur loyer s’ils ne travaillaient pas pendant des semaines. Ils ne peuvent pas travailler à distance et si leur employeur dit +ne venez pas travailler aujourd’hui car les affaires ne vont pas bien+ ils ne pourront pas s’en sortir”, confie Eileen Appelbaum, du Center for Economic and Policy Research, un think-tank très progressiste.

C’est le cas de Xavier Pressley, 36 ans, un Afro-Américain qui travaille pour la société de logistique CRST, en charge de différents services de courrier au One World Trade Center à New York. “Ma paie, c’est tout pour moi. Grâce à elle, je règle toutes mes factures: le loyer, le câble, le téléphone, tout”, raconte-t-il à l’AFP. “Je ne peux pas me permettre de tomber malade”.

Contrairement à l’Europe, le congé maladie payé est un luxe aux Etats-Unis, où par exemple plus d’un salarié sur deux (55%) dans l’hôtellerie et la restauration n’en dispose pas, selon l’Economic Policy Institute.

Ces “petites mains”, dont les assurances santé ne suffisent souvent pas à couvrir le coût du test du Covid-19, choisissent malgré eux de continuer à se rendre sur leur lieu de travail, quitte à courir le risque d’attraper la maladie ou de la transmettre.

“Ils vont continuer à aller au travail à moins qu’ils soient très malades et ne puissent plus se déplacer”, explique Eileen Appelbaum. “Si vous n’allez pas travailler, vous n’êtes pas payé”, renchérit Arthur Wheaton, professeur à l’université Cornell, spécialiste des questions sociales.

– Mesures d’aide? –

Si le congé maladie payé n’existe pas sur le plan fédéral, il est obligatoire dans une poignée d’Etats, notamment démocrates comme New York ou Washington, avec une durée qui dépend souvent de l’ancienneté et du nombre d’heures travaillées. Mais sa durée dépasse rarement neuf jours, ce qui ne permet pas de couvrir les 14 jours de quarantaine minimum préconisés par les autorités sanitaires.

Face à une maladie pour laquelle il n’existe toujours ni vaccin ni traitement, les syndicats et ONG appellent à un plan de relance pour aider ces petits salaires. Ils plaident par conséquent pour un maintien des avantages sociaux dont ils bénéficiaient avant la crise sanitaire — assurance santé –, un moratoire sur les expulsions et l’accès ininterrompu à l’eau potable et à l’électricité.

La mise en place d’un fonds de soutien, à l’image de celui destiné aux agriculteurs en pleine guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, est aussi souhaitée.

“Si la paie des gens se réduit ou qu’ils sont temporairement licenciés, cela va non seulement affecter leur capacité à payer leur loyer, maintenir leur assurance santé et acheter de la nourriture, mais cela pourrait aussi avoir un effet boule de neige sur l’économie”, prévient Amanda Ballantyne, de l’ONG Main Street Alliance spécialisée dans les très petites entreprises. Après des jours d”atermoiement et un premier plan de relance de 8 milliards de dollars, le président Donald Trump devrait annoncer mardi de nouvelles mesures.

En attendant, les banques promettent de ne pas punir leurs clients qui ne seraient pas à mesure de rembourser leurs mensualités sur les cartes de crédit ou qui ne pourraient pas honorer une échéance de remboursement de leur prêt immobilier ou crédit automobile.

“Nous voulons faire savoir à nos clients que nous pouvons les aider s’ils en ont besoin”, insiste Anand Selva, le patron de la division consommateurs chez Citibank.

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