Le G20 sert-il encore à quelque chose?

© Reuters

Le G20 qui s’ouvre ce lundi à Los Cabos, au Mexique, suscite peu d’engouement par rapport à ceux de 2008 et 2009. Tous les regards se tournent désormais vers la zone euro et les prochains sommets européens.

Il est fini, ce temps où les sommets du G20 se concluaient par des tirades lyriques et des annonces fracassantes. Finies, les décisions “historiques”, la “fin des paradis fiscaux” ou du “capitalisme débridé”. Nous ne sommes plus en avril 2009 quand, après le sommet de Londres, Nicolas Sarkozy se présentait en salle de presse pour asséner sans précaution: “Le temps du secret bancaire est révolu”.

Le G20 de Los Cabos s’ouvre aujourd’hui sur la pointe des pieds. Au programme, l’aide à la Grèce ou l’augmentation des ressources financières du FMI. Il sera davantage question d’interventions ciblées que de révolution mondiale. Une réunion de plus ou une instance salutaire?

Des débuts encourageants

Créé en 1999 pour faire face -déjà- à une succession de crises économiques et financières, le G20 n’a vraiment commencé à peser qu’en 2008. Cette année là, après la faillite de Lehman Brothers, Nicolas Sarkozy et Gordon Brown plaident pour que le G20 réunisse les chefs d’État et de gouvernements. Auparavant, il ne concernait que les ministres des finances. Depuis 2008 donc, deux fois par an, une vingtaine de dirigeants se retrouve et fixe des orientations de politique économique et financière, rassemblant 19 pays plus l’Union Européenne, le FMI, la BCE, d’autres responsables de banques centrales et la Banque Mondiale. Il faut y ajouter l’Espagne et les Pays-Bas, qui ont participé aux trois dernières réunions, et seront au Mexique ce lundi, sans faire officiellement partie de l’organisation.

L’objectif était de créer un organe de décision qui regroupe les géants de l’économie mondiale et les pays émergents, comme l’Indonésie, le Mexique ou l’Afrique du Sud. Une sorte de directoire de la mondialisation, où devait apparaître le volontarisme des participants.

Et, de fait, les premières réunions après 2008 avaient accouché de décisions spectaculaires: après le sommet de Londres avait été dressée une “liste noire des paradis fiscaux”, de nouvelles règles sur la régulation bancaire avaient été promises, et 1000 milliards de dollars avaient été attribués au FMI et à la Banque Mondiale pour soutenir l’économie. Celui de Pittsburgh, en novembre 2009, s’était penché sur la question des bonus des traders, et décidé de les limiter.

G20 ou G vain?

Pourtant, ces initiatives n’ont pas été suivies d’effet. Et, aujourd’hui, beaucoup mettent en doute l’utilité du G20. C’est le cas de l’économiste Jacques Attali, qui, dans son livre G vain, déplore une instance “sans aucun pouvoir, qui ne peut imposer aucune règle planétaire”. En cause, le fait que les dirigeants cherchent avant tout à faire valoir leurs intérêts nationaux: la Chine sur la monnaie, les États-Unis sur les banques, l’UE sur les dettes. Tout cela ne pouvant aboutir qu’à des compromis à minima.

Un exemple frappant est le dernier sommet du G20, en novembre 2011 à Cannes. D’abord parce qu’il fut dominé par des considérations de politique intérieure : Nicolas Sarkozy voulait en faire un tremplin pour sa nouvelle candidature à l’Elysée, Silvio Berlusconi était empêtré dans ses démêlés judiciaires et l’ancien Premier Ministre grec Georges Papandréou venait d’annoncer la tenue d’un référendum pour ratifier le plan d’urgence décidé quelques jours plus tôt par les dirigeants européens. Sans compter l’Espagne, qui se préparait déjà à l’alternance, à moins de deux semaines des élections législatives anticipées. Et, sur le fond, aucun accord ne fut trouvé, ni pour renforcer les fonds du FMI, ni au sujet de la taxe sur les transactions financières. Résultat, un communiqué final bien fade symbolisé par cette phrase “Les pays développés s’engagent à adopter des politiques de nature à renforcer la confiance et à soutenir la croissance, et à mettre en oeuvre des mesures claires, crédibles et ciblées pour rééquilibrer leurs finances publiques”. Du coup, le G20 de cette semaine ne déchaîne pas les foules.

Pour Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, le peu d’attentes autour du sommet de Los Cabos est lié au développement de la crise : “le G20 est moins central que pendant la crise financière, en 2008-2009. Il fallait agir pour la régulation et coordonner les plans de relance. Pour cela, le G20 était la bonne institution. “Mais, aujourd’hui, les regards sont braqués sur la zone euro, et il ne faut pas attendre du G20 des décisions d’ampleur. “L’Europe est au centre des débats parce que les autres pays ne sont pas menacés de récession”, rappelle Mathieu Plane.

Pour autant, selon lui, le G20 n’est pas inutile. “Il ne faut pas le prendre pour un gouvernement mondial, d’ailleurs il n’a pas de réel pouvoir décisionnaire. Mais il sert à mettre certains sujets sur le devant de la scène, et force les gouvernements à la coordination”. Il n’est simplement pas le bon théâtre aujourd’hui. Les annonces importantes sont à attendre le 29 juin, au bout du conseil européen qui, lui, est d’ores et déjà très attendu.

Louis Amar, L’Expansion

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content