La Wallonie va-t-elle vraiment taxer l’automatisation ?

Christophe Lacroix, ministre wallon du budget: "Quand des entreprises, des multinationales, ou de grandes sociétés ont recours à une automatisation qui supprime ou engendre des pertes d'emplois, il faut qu'elles participent à l'effort global." © Belgaimage

A l’heure où les robots et les automates s’apprêtent à remplacer un nombre croissant d’emplois, le ministre wallon du Budget évoque une taxe sur l’automatisation. Une idée qui ne fait pas l’unanimité et qui semble déjà bridée.

Taxer l’automatisation en Wallonie… Voilà le pavé jeté dans la mare par Christophe Lacroix, le ministre wallon du Budget (PS) devant la commission Finances du Parlement wallon la semaine passée. Pour lui, il faut ” combattre l’automatisation qui entraîne des pertes d’emplois de personnes pas ou peu qualifiées. Quand des entreprises, des multinationales ou de grandes sociétés ont recours à une automatisation qui supprime ou engendre des pertes d’emplois, il faut qu’elles participent à l’effort global “.

Un discours qui semble faire écho aux récentes annonces de licenciements massifs dans les banques, ING en tête, alors que le groupe se porte bien mais admet se préparer à la numérisation indispensable de ses activités dans les années à venir. Concrètement, Christophe Lacroix entend intégrer cette taxation dans le cadre de la future réforme fiscale wallonne. ” Il s’agit de l’une des rares pistes de nouvelles taxes “, glisse-t-on au cabinet du ministre. Mais la portée exacte de ce projet demeure encore relativement floue, alors que des taxes existent déjà sur différents automates. Ainsi, les distributeurs de billets de banque ou les pistolets des pompes à essence (entre autres) font depuis des années déjà l’objet d’une taxe en Wallonie. Une mesure qui rapporterait environ 19 millions d’euros selon le cabinet de Christophe Lacroix. La mesure pourrait non seulement moduler les taux de cette taxe existante mais aussi être étendue à d’autres machines ” destructrices ” d’emplois. Par exemple, les caisses automatiques (self-scanning) des grandes surfaces.

L’idée de taxer les outils d’automatisation a néanmoins de quoi surprendre, voire inquiéter certains secteurs, dont l’industrie et du numérique. Surtout qu’au moment même où Christophe Lacroix évoquait son projet de taxation se tenait au Cercle du Lac un colloque organisé par l’intercommunale du Brabant wallon, devant un parterre de chefs d’entreprise sur l’industrie 4.0. Celle qui intègre le numérique, les robots et l’intelligence artificielle pour doper l’efficacité de nos entreprises. Une thématique portée notamment par Pierre Rion dans le cadre du Plan wallon du Numérique, initié par Jean-Claude Marcourt. Un pas en avant, deux en arrière ? Au cabinet Lacroix, on tempère : il ne s’agit pas de taxer les robots de l’industrie, ni d’aller contre l’innovation. ” Mais nous voulons freiner les destructions d’emplois lorsqu’ils restent rentables “, précise un proche du ministre. Ce dernier a d’ailleurs évoqué ” ce qui remplace l’emploi de manière physique “.

Or, à en croire différentes études sur le sujet, c’est dans l’industrie que les pertes d’emplois se feront sentir sous l’effet de l’automatisation, en tout cas avant une réaffectation de l’emploi dans d’autres secteurs (le numérique, les services, etc.). Mais s’attaquer à l’innovation dans l’industrie irait à l’encontre de l’innovation et de l’attrait de la Wallonie pour les multinationales ou les grandes entreprises qui voudraient y produire. Par conséquent, la mesure ressemble pour certains à un effet d’annonce et risque de faire long feu, tant les contraintes sont nombreuses et le champ d’action réduit.

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