Faut-il encore se fier aux sondages ?

Le dernier baromètre politique RTBF/La Libre/Dedicated. Le PTB y est crédité de 18,4% des intentions de vote. Quel crédit apporter à ce sondage après les surprises des urnes à l'étranger ? © PG

Ces derniers mois, des verdicts surprises ont émergé des urnes alors qu’une majorité des sondages laissaient entrevoir des prévisions contraires. Les sondeurs seraient-ils en perte de vitesse et, surtout, peut-on encore leur faire confiance ?

Il y a six mois, les sondages affirmaient que la Grande-Bretagne resterait au sein de l’Union européenne. Le Brexit l’a emporté. Il y a six semaines, les sondages déclaraient Hillary Clinton comme la probable première femme présidente des Etats-Unis. Donald Trump est sorti gagnant des urnes américaines. Il y a un mois, les sondages annonçaient le duo Sarkozy-Juppé en grand vainqueur du premier tour de la primaire de la droite française. François Fillon a émergé et s’est même offert le luxe de remporter le deuxième tour pour partir à présent à l’assaut des présidentielles.

Spectaculaires, ces trois grands faits d’actualité démontrent à quel point les sondages ne sont pas une science exacte. Certes, les marges d’erreur existent toujours dans ce type d’exercice délicat, mais les effets d’annonce de ces dernières semaines montrent à quel point il convient d’être prudent dans l’analyse des intentions de vote. Si les études d’opinion sont devenues l’obsession des politiques (et des journalistes), elles n’ont toutefois pas la prétention de se transformer en une boule de cristal. Globalement fiables mais évolutives, elles ne sont que la photographie de l’opinion publique à un moment donné de l’histoire. Traduction : entre la date à laquelle le sondage est effectué et la date du résultat pour les élections prises en considération, de l’eau et des opinions ont coulé sous les ponts. Sans compter que des éléments perturbateurs peuvent aussi bousculer les forces en présence. Ainsi, pour le premier tour des primaires en France, les sondages n’avaient effectivement pas intégré les ravages de la ” gauche-castor ” qui voulait absolument faire barrage à Nicolas Sarkozy et qui s’était donc invitée sans scrupule dans les urnes des Républicains.

Plus de didactisme

Les sondages doivent-ils être bannis pour autant ? Certainement pas. Si la photographie réalisée par les études d’opinion s’avère parfois floue ou mal cadrée, elle est cependant (plus ou moins) nette la plupart du temps. Chez nous, les principaux instituts de sondage se font d’ailleurs un point d’honneur à respecter la représentativité de leurs échantillons et ils ne semblent pas ébranlés aujourd’hui par ces mauvaises expériences vécues à l’étranger. ” A notre niveau, il n’y a absolument pas de conséquences et nos clients nous font toujours confiance “, explique Marc Dumoulin, directeur général de l’institut Dedicated qui vient de publier le tout dernier Baromètre politique pour le compte de La Libre et de la RTBF où le PTB caracole à 18,4 % des intentions de vote en Wallonie. ” Tout au plus, les marques ou les organismes pour lesquels nous travaillons nous demandent un peu plus d’informations sur notre méthodologie, poursuit-il, mais il n’y a pas de suspicion à notre égard. Nous devons simplement être un peu plus didactiques dans nos explications. ”

En Belgique, la Fédération des études de marché (Febelmar) compte une trentaine de membres dont l’essentiel du travail est dédié aux grandes marques commerciales. Voilà sans doute pourquoi les erreurs d’appréciation constatées dans les dossiers Brexit, Trump et Fillon ont eu – pour l’instant – très peu d’impact en Belgique. ” Les sondages politiques sont une discipline à part dans le monde des enquêtes, explique Laurent Moreau, managing director du bureau bruxellois AQ Rate. Les opinions des gens sont très versatiles et lorsqu’il s’agit de choisir tel ou tel candidat, des tas de facteurs liés à l’actualité peuvent encore influencer la décision finale. En revanche, lorsqu’il s’agit de donner un avis en prise directe avec une expérience vécue dans le domaine commercial, les gens sont beaucoup moins hésitants. Ils ne doivent pas se projeter dans l’avenir comme pour un sondage politique et l’étude de marché se révèle donc beaucoup plus fiable sur le plan commercial. ”

Peu de chance, en définitive, que les annonceurs décident de freiner subitement leurs envies de mieux connaître les consommateurs dans leur rapport aux marques via les études de marché. Quant aux sondages politiques, plus capricieux en termes de ressenti, on imagine tout aussi mal que les politiciens et les médias puissent se passer un jour de cet outil fascinant qui capture l’air du temps, fût-il vaporeux et donc imprévisible…

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