En Wallonie, le besoin de stabilité des pôles de compétitivité

François Héroufosse (Walgrim): "Si nous étions rigoristes, nous devrions donner un préavis à tout le monde chaque début d'année." © PG

La création de valeur ajoutée et d’emplois a bondi dans les entreprises des pôles depuis 10 ans. Et pourtant, le budget de ceux-ci n’est toujours pas garanti dans la durée, constatent leurs présidents.

En 12 ans, les six pôles de compétitivité wallons ont validé plus de 270 projets de recherche. Cela a abouti au dépôt de 235 brevets et à la création d’une série d’entreprises comme Andy-Shape (impressions 3D, récemment choisie par Airbus), Cardiatis (nouveau type de stent en cardiologie) ou CluePoints (outil statistique pour les études cliniques), à des farines de blé ” fonctionnalisées ” qu’utilisent les Moulins de Statte pour remplacer les additifs alimentaires, etc. Au total, l’emploi a progressé de 13% en 10 ans dans les entreprises membres des pôles (contre -11% pour l’ensemble de l’industrie wallonne ! ) et la valeur ajoutée produite y a cru de… 51%.

” Il est difficile de tisser un lien direct entre le nombre de projets et les entreprises créées ou les produits amenés sur le marché, nuance Bernard Piette, directeur du pôle Logistics. Beaucoup de projets portent sur l’IT ou sur un composant. Ce sont des compléments d’une chaîne de valeurs, des briques dans un ensemble beaucoup plus large. ” Les pôles de compétitivité ne financent des projets de recherche que s’ils ont une dimension collaborative entre plusieurs entreprises (dont au moins une PME) et un centre de recherche ou une université. Ils ont ainsi contribué à mailler le tissu économique wallon. ” Cela permet d’ancrer des branches de multinationales, car elles ont développé tout un réseau d’expertise ici, commente Yves Jongen (IBA), président du pôle Mecatech. Les PME peuvent, elles, valoriser leur implication dans une série de projets ambitieux. Sans les pôles, beaucoup de PME n’auraient pas la possibilité d’investir dans la recherche et l’innovation. ” Or, chacun s’accorde à dire que ce sont là les chemins de la réindustrialisation de la Wallonie.

Conserver les expertises

Ce succès n’est guère contesté dans le monde politique. Quelles que soient les majorités, il n’y a, nous assure-t-on, jamais eu la moindre intervention politique pour sélectionner tel ou tel projet de recherche (l’évaluation est menée par un jury international, présidé par Luc Vansteenkiste, ancien patron de Recticel et ancien président de la FEB). Un très bon point pour la gouvernance wallonne.

Et pourtant, les pôles ont un peu le sentiment de ne pas recevoir toute la considération qu’ils mériteraient. Ils regrettent notamment l’incertitude qui entoure constamment le déblocage des budgets de fonctionnement pour payer les salaires des quelque 60 personnes qui y travaillent. ” Nous sommes début avril et le cadre de financement pour l’année 2019 n’est pas encore bouclé, explique François Héroufosse, directeur de Wagralim. Si nous étions rigoristes, nous devrions donner un préavis à tout le monde chaque début d’année. ” D’où ce message des présidents de pôles au prochain gouvernement régional : garantissez-nous des budgets au moins pour toute la législature, nous en avons besoin pour stabiliser les équipes et conserver les expertises.

Lors d’un débat électoral face aux responsables des six pôles de compétitivité, les représentants des principaux partis wallons se sont engagés à stabiliser le budget des pôles avec, le cas échéant, une part variable en fonction de résultats chiffrés. Les partis invitent aussi les pôles à intensifier les collaborations entre eux, afin de de faire émerger des projets réellement innovants.

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