“En résumé, c’est un pas de géant que l’Europe vient d’effectuer.”

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Même s’il manque des détails, en aboutissant à des mesures de court et de long terme, le sommet de Bruxelles est une réussite, comparé aux précédents. L’analyse de Sylvain Broyer, économiste chez Natixis.

Malgré leurs divergences, les pays européens ont réussi à s’entendre sur une série de mesures. Selon vous, ce sommet est-il une réussite ?

Oui. Même si tout n’est pas parfait, il y a incontestablement du positif dans ce sommet, surtout si on le compare aux précédents. Avant le sommet, l’opinion des marchés était plutôt négative. Le discours d’Angela Merkel sur les eurobonds avait aussi pas mal refroidi. Cependant, la Chancelière était dans son rôle. De manière stratégique, elle voulait entrer dans les négociations sur une position dure. Son discours a masqué, à tort dans l’esprit des observateurs, tout le travail de négociation en amont du sommet. En fait, les dirigeants européens voulaient vraiment marquer les esprits et faire quelque chose d’important.

Quels sont les points positifs les plus importants à retenir ?

La zone euro veut mettre en place d’ici fin 2012 un mécanisme qui permettra de recapitaliser les banques directement via ses fonds de secours et d’assouplir les conditions pour qu’ils achètent de la dette souveraine sur les marchés. Cette décision va enlever de la pression sur les marchés, notamment en Espagne et en Italie. C’est donc une bonne nouvelle, puisque l’Europe répond à l’urgence de la situation économique. Malheureusement, ces recapitalisations risquent de n’être qu’un feu de paille. Par exemple, elles ne résoudront pas, à elle seules, la crise espagnole.

A mon avis, la décision positive la plus importante concerne la supervision bancaire, qui pourrait être mise en place fin 2012. Grâce à des “reportings”, la BCE va pouvoir en savoir davantage sur les pratiques des banques dans les pays européens. Ces informations permettront sans doute de diminuer les risques de crise. Par ailleurs, la supervision bancaire est la première étape menant à l’union bancaire. Cela veut dire qu’on va avoir, à terme, des règles communes pour les banques. A l’heure actuelle, les marchés du crédit sont fractionnés dans la zone euro. Vous ne pouvez pas par exemple construire un logement dans un pays avec l’épargne basée dans un autre pays. Les conditions d’emprunt sont différentes d’un pays à l’autre. Dans le futur, tout cela sera harmonisé. En résumé, c’est un pas de géant que l’Europe vient d’effectuer.

Y -a-t-il des points sur lesquels vous êtes déçu ?

Oui. Le sommet de Bruxelles n’est pas parfait. Non n’avons pas, par exemple, de feuille de route précise sur les prochaines étapes de la zone euro. Et puis surtout, il n’y a pas d’avancée sur la mutualisation des dettes. C’est important parce que les eurobonds ou les eurobills peuvent vraiment être des “crisis killer”, c’est-à-dire des mesures capables de lutter efficacement contre la crise. Par principe, les Allemands s’y opposent car ils veulent au préalable une garantie budgétaire suffisante. Or celle-ci pose la question des transferts de souveraineté, sur laquelle la France freine. Cela dit, tout n’est pas encore perdu. Il existe d’autres versions d’euro-bills qui pourraient être efficaces. Par exemple, on pourrait imaginer donner une garantie européenne à des émissions nationales de titres de dette. Ce qu’il faut garde en tête c’est que l’Europe ne manque pas d’outils économiques pour résoudre la crise.

Trends.be avec l’Expansion.com.

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