Comment acheter un petro?

Le président Maduro souhaite généraliser cette cryptomonnaie comme moyen de paiement parmi la population. © EFE

La cryptomonnaie vénézuélienne, avec laquelle le gouvernement de Nicolas Maduro entend contourner le manque de liquidités et les sanctions financières de Etats-Unis, est à la disposition du public, mais peu sont ceux qui savent l’utiliser.

Après un mois de prévente privée, qui a débouché sur 5 milliards de dollars d’intentions d’achat dans 133 pays, selon le président Nicolas Maduro, le petro est accessible à tous depuis vendredi.

Malgré le battage médiatique dans le pays, la confusion le dispute à la perplexité, y compris au sommet de l’Etat: le dirigeant socialiste et des responsables gouvernementaux ont donné des dates de lancement différentes.

Signe de ces hésitations, un des principaux grands magasins du pays, a accroché derrière ses vitrines des panneaux où l’on pouvait lire: “Nous acceptons le PETRO comme moyen de paiement”. Avant de les retirer quelques heures après, les employés ne sachant pas quoi répondre aux personnes intéressées.

“Nous ne disposons pas d’information sur la manière d’encaisser les clients (qui paieraient en petro, ndlr), c’est pourquoi nous avons retiré” les panneaux, a expliqué à l’AFP le gérant d’une des succursales, sous couvert d’anonymat.

Les cryptomonnaies sont “un concept très technique”, que “tout le monde ne maîtrise pas forcément”, fait valoir Asdrubal Oliveros, du cabinet Ecoanalitica.

La grave crise économique et sociale que vit le Venezuela est en grande partie due à la chute des cours du pétrole, dont il tire 96% de ses revenus. Le gouvernement est également mis sous pression par une série de sanctions économiques imposée par les Etats-Unis.

Washington a notamment interdit à tout ressortissant américain ou individu utilisant le système financier américain de traiter des opérations dans la monnaie électronique vénézuélienne, qui est adossée sur la richesse pétrolière de ce pays dont les réserves sont parmi les plus importantes au monde.

Le Venezuela et sa compagnie pétrolière PDVSA sont déjà considérés comme étant partiellement en défaut de paiement par plusieurs agences de notation à cause de retards lors du règlement du capital ou des intérêts de la dette.

Le pays ne dispose plus que de 9,5 milliards de dollars de réserves et devait rembourser quelque 8 milliards en 2018.

– “Aucune idée” –

Les experts doutent du succès du petro dans ce pays en plein marasme économique: le déficit public se situe à 20% du PIB et l’hyperinflation est attendue à 13.000% en 2018 par le FMI.

Le président Maduro souhaite généraliser cette cryptomonnaie comme moyen de paiement parmi la population. Jeudi, il a ordonné l’utilisation du petro pour les opérations financières de l’Etat, y compris celles de PDVSA.

Le tourisme fait partie des services qui devront être réglés en petro. Mais Ariadna Zamora, responsable d’une agence de voyage, ne sait pas comment faire.

“Personne ne nous a absolument rien expliqué. Comment faire confiance à quelque chose que tu ne connais pas?”, demande cette femme de 52 ans.

Les petros pourront être achetés avec des euros, des roubles, des yuans, des livres turques et trois cryptomonnaies: le bitcoin, l’ethereum et le zen, selon le chef de l’Etat socialiste.

Pour cela, le particulier devra s’inscrire sur un site web et télécharger un porte-monnaie électronique. Il devra ensuite se tourner vers des maisons de change virtuelle, où le petro n’était pas encore disponible.

L’Etat va aussi réaliser des ventes aux enchères de petro chaque semaine, d’après le gouvernement.

“Je ne sais rien… Aucune idée”, répond en pouffant de rire Carolina Mendez lorsqu’on lui demande si on peut payer en petro dans sa boutique de glaces.

José Angel Alvarez, président de l’association nationale des cryptomonnaies, estime que le petro peut s’installer dans le paysage, mais il demande de la transparence et de “briser le mur de la désinformation”.

En faisant le bilan de la prévente privée, Nicolas Maduro n’a pas précisé combien de petros avaient été vendus, ni leur cours. “On ne sait pas d’où sortent ces 5 milliards de dollars”, a souligné M. Oliveros.

L’économiste César Aristimuño, président de l’entreprise Aristimuño Herrera & Asociados, a récemment indiqué à l’AFP que le prix de prévente se situe entre 20 et 30 dollars, loin des 60 dollars annoncés comme “prix de vente de référence” par le gouvernement.

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