Jean-Pierre Buyle : le réseau d’un énergique bâtonnier

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Jean-Pierre Buyle, bâtonnier du barreau francophone de Bruxelles, a patiemment tissé sa toile dans le microcosme du barreau et dans les milieux bancaire et financier. Sans y perdre son âme d’artiste.

En 30 ans de barreau, Jean-Pierre Buyle s’est construit un réseau bien fourni dans le monde du droit. Qu’ils soient avocats, banquiers, professionnels de la finance ou hommes politiques, la plupart de ses proches contacts ont fréquenté les facultés de droit de l’UCL ou de l’ULB. Lui-même est un ancien des deux universités.

Licencié en droit à Louvain, et titulaire d’une spécialisation en droit économique à Bruxelles, le bâtonnier a l’art de ménager la chèvre et le chou. Cette double appartenance lui a d’ailleurs permis de succéder à son prédécesseur louvaniste, suivant la sacro-sainte règle de l’alternance en vigueur à la tête de l’ordre des avocats bruxellois francophones. Un microcosme dans lequel il a su se faire respecter et apprécier. Lors de son élection en tant que dauphin – la rampe de lancement pour devenir bâtonnier – il a même réussi le tour de force d’obtenir plus de suffrages que son prédécesseur Yves Ochinsky.

“Des ennemis, moi ? Non. J’ai des adversaires, mais nos relations restent toujours confraternelles”, explique l’avocat. Parole à l’un de ses confrères, justement : “Il est très humain. Mais en plaidoirie, il ne fait aucun cadeau, il peut même être très agressif”, nuance Benoît Feron, associé chez Nautha Duthil. L’avocat-photographe, qui a réalisé les clichés du livre Visages d’avocats, a croisé la route de Jean-Pierre Buyle dans une série de dossiers, dont l’affaire Fortis. Il lui a également succédé à la tête de l’Association européenne pour le droit bancaire et financier (AEDBF), qui rassemble des professionnels du secteur.

Relais judiciaires

Depuis le début de son mandat, le bâtonnier fréquente assidûment son coreligionnaire du barreau néerlandophone de Bruxelles, Dirk Van Gerven. Jean-Pierre Buyle met un point d’honneur à arrêter des positions communes avec son homologue, afin de peser du poids des 7.000 avocats du barreau bruxellois (4.500 francophones, 2.500 néerlandophones) dans les dossiers-clés de son mandat.

Comme le dossier Salduz, du nom de cet arrêt de 2008 jamais appliqué par la Belgique, qui impose la présence d’un avocat lors de la toute première audition d’un suspect. Il a fait jouer les contacts privilégiés qu’il entretient avec Luc Hennart, le président du tribunal de première instance de Bruxelles, pour mettre sur pied une véritable permanence d’avocats. Autres relais dans l’institution Justice : le président de la Cour de cassation Ghislain Londers, qui l’appuie dans sa défense de l’affectation judiciaire du palais de justice, et Francine De Tandt, la présidente du tribunal de commerce, qui l’a encore récemment invité pour signer une “charte pour lutter contre les faillites d’entreprise”.

L’associé chez Philippe & Partners a aussi développé des relations dans les domaines bancaire et financier, matières qu’il traite depuis le début de sa carrière. Axel Miller, avocat honoraire et ancien patron de Dexia, est dans sa short list des pros du métier. L’associé chez Petercam vient même de réaliser une petite étude pour le bâtonnier sur la corporate governance de l’Ordre. “Il a conclu que tout était… en ordre”, conclut Jean-Pierre Buyle, semblant presque regretter que son ex-confrère n’ait pas trouvé un petit quelque chose à lui reprocher.

Eric De Keuleneer (Solvay Business School), qu’il a côtoyé au club de réflexion Transparency International, fait également partie de son cercle restreint de financiers de référence. Tout comme Bruno Colmant (Ageas), Etienne de Callataÿ (Degroof) et trois juristes : Filip Dierckx (BNP Paribas Fortis), Philippe Lambrecht (FEB) et Jean-Paul Servais (CBFA).

Mais le bâtonnier n’est pas monomaniaque pour autant. En marge de ses accointances juridico-financières, il cultive un esprit rebelle qui le pousse à rencontrer des personnages plus originaux, comme le célèbre “gloupier” Noël Godin, spécialiste des attentats pâtissiers. Ou encore le président de la Ligue des optimistes, Luc Simonet (encore un juriste), qu’il a invité pour animer une journée de réflexion sur le métier d’avocat, à l’occasion de laquelle il a également appris à faire la connaissance d’Eric-Emmanuel Schmitt.

L’écrivain n’est pas le seul artiste avec lequel Jean-Pierre Buyle aime philosopher. Marie-Jo Lafontaine, dont certaines oeuvres décorent le bureau de l’avocat, est certainement une proche de celui qui est aussi à l’origine de la fondation Roger Somville, cet artiste-peintre dont l’une des fresques bariolées décore une salle anonyme du palais de justice. Le lien entre le monde juridique et le monde de l’art ? “Les artistes sont au centre de l’émotion, de la contradiction. Comme les avocats.”

Gilles Quoistiaux

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