Un joujou devenu collector

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La MX-5, c’est l’archétype du roadster authentique, qui offre une sacrée dose de plaisir sans débordement de puissance et à prix raisonnable. Retour sur l’histoire de cette décapotable, qui a su rester simple malgré un succès engrangé au fil de quatre générations.

C’est l’histoire d’une géniale imitation… Lancée en 1989, la première MX-5 n’a en effet rien inventé, mais elle a marqué le monde automobile en faisant renaître le concept du roadster abordable, popularisé par les marques anglaises dans les années 1960. On pense bien sûr aux fameuses MG B, Triumph TR & Spitfire ou Lotus Elan. Des cabriolets biplaces stylés, pas trop puissants mais néanmoins sportifs car légers. Le tout proposé à un tarif raisonnable. Ces automobiles simples et pures se sont ensuite progressivement effacées devant l’embourgeoisement et la montée en puissance qui ont marqué le secteur automobile. Il suffisait d’un retour aux sources pour relancer la machine. Ce qui est étonnant, c’est que ce soit un constructeur comme Mazda, à l’esprit plutôt futuriste que nostalgique, qui ait ouvert les tiroirs de l’histoire. A vrai dire, le constructeur japonais n’a pas eu cette idée-là tout seul…

Naissance d’une icône

La première MX-5 a été présentée au salon de Chicago, en février 1989. Mais le projet est né 10 ans plus tôt. Tout commence à l’initiative d’un journaliste automobile américain : Robert Hall. Lors d’une interview en 1979, il suggère au directeur technique de Mazda, Kenichi Yamamoto, de développer un petit roadster léger et abordable, qui allierait le style anglais et la fiabilité japonaise. Le journaliste va même jusqu’à griffonner une ébauche de dessin sur le tableau de la salle de conférence… Un Américain plutôt gonflé, mais diablement bien inspiré, puisque le petit croquis a fait cogiter les têtes pensantes du constructeur nippon.

Après avoir testé une Triumph Spitfire sur les collines japonaises, Kenichi Yamamoto est convaincu par l’idée de produire un petit roadster. Mais il doit encore persuader ses patrons. Le projet n’est pas prioritaire, mais tout va néanmoins s’enchaîner rapidement : en 1981, Mazda installe un centre de recherche et développement à Irvine, en Californie, pour mieux séduire le grand marché américain ; la même année, le journaliste Robert Hall change de casquette et rejoint les rangs de Mazda USA ; et en 1983, Kenichi Yamamoto est nommé directeur général de Mazda Motor Corporation. Le projet de petit roadster prend alors tout son élan. Il est étudié conjointement par le QG japonais et le centre de recherche américain.

Néo-rétro

Traction ou propulsion, moteur avant ou central arrière : tous les types d’architecture sont étudiés. La réalité de l’époque aide à trancher : le marché de la petite traction sportive est déjà investi par la Honda CRX, tandis que la Toyota MR perce la niche des petites sportives à moteur arrière. C’est donc finalement le projet du centre de recherche américain qui s’impose : la MX-5 sera une propulsion à moteur avant, arborant un style rétro, qui s’inspire assez nettement de la Lotus Elan des années 1960.

Les dessous sont par contre modernes : la Mazda MX-5 repose sur une carrosserie autoportante à quatre roues indépendantes, freinée par quatre disques et guidée par une suspension affûtée, composée de quatre doubles triangles. Le tout est enrobé dans une carrosserie rigide, capable de répondre aux normes de sécurité américaines. Etudiée pour procurer une excellente interaction avec le conducteur, la MX-5 est bien équilibrée (répartition des masses avant/arrière de 52/48%) et entreprend une véritable chasse aux kilos. Celle-ci s’étend jusqu’au bout des jantes, qui adoptent le dessin des fameuses Minilite britanniques, mais amputé d’un rayon, pour réduire les masses non suspendues. Au bout du compte, la première MX-5 accuse moins d’une tonne à la pesée.

Eprouvée dès l’origine

Pour contenir les coûts, le constructeur pioche un moteur dans sa banque d’organes de grande série : le bloc à essence 1.6 l à quatre cylindres est emprunté à la 323 de l’époque. Outre une implantation longitudinale et presque centrale avant, ce moteur profite de quelques améliorations : il se couvre d’une culasse à double arbre à cames en tête comptant 16 soupapes et reçoit une alimentation par injection multipoint, qui ne lui coupe le sifflet qu’à 7.200 tours/minute. Ce bloc développe au total 115 ch, qui sont envoyés dans les roues arrière via une boîte cinq vitesses, issue de la gamme existante mais dotée d’une commande plus précise, grâce à un sélecteur planté dans le tunnel central. Un différentiel autobloquant était proposé également, pour assurer la motricité en sortie de courbe. Mazda ne s’est donc pas contenté de singer l’apparence des roadsters britanniques de la belle époque. La MX-5 en a modernisé la structure et a aussi éradiqué leurs caprices mécaniques.

Au volant de la première

Visuellement, la MX-5 de première génération étonne par sa taille de guêpe. Ce roadster mesure seulement 3,97 m de long et son toit nous arrive à la taille (1,23 m de haut). A bord, l’ambiance est assez spartiate. Engoncé entre le panneau de porte et le tunnel de transmission, le conducteur profite d’une position de conduite correcte, malgré l’absence de réglage en hauteur du siège et du volant. Les exemplaires les plus recherchés disposent du petit volant à trois branches griffé Momo, qui évoque la compétition et dont la fine jante garnie de cuir incite à l’action. Le moteur démarre au quart de tour. Il reprend sans hoqueter dès les plus bas régimes, mais respire pleinement entre 5.500 et 7.000 tours/minute. Les performances étaient très bonnes pour l’époque (0 à 100 km/h en environ 10 s) et restent dans le coup aujourd’hui, d’autant que les sensations sont bien présentes à bord, surtout lorsque l’on roule cheveux au vent. Le conducteur marque la cadence d’un mouvement de poignet sur le minuscule levier de vitesses parfaitement guidé. On ressent presque les pignons s’entrecroiser dans le creux de notre main… La direction assistée (optionnelle à l’époque) est légère mais précise et le train avant répond sans temps mort. La MX-5 saute d’un virage à l’autre, posée sur ses petits pneus (185/60 R 14), sans jamais perdre l’équilibre. A son volant, on perçoit un étonnant mélange de sensations vintage et d’efficacité moderne. Le meilleur de deux mondes !

Au volant de la nouvelle

Changement de décor à bord de la dernière MX-5, lancée fin 2015. Le modèle semble avoir renoncé au voeu de dépouillement de son aïeul : l’équipement s’est enrichi. Bien dans son époque, la nouvelle MX-5 peut disposer d’un système multimédia et de navigation avec écran de 7 pouces et plusieurs fonctions de connectivité. Elle reçoit aussi de nombreuses assistances à la conduite : détecteur d’angles morts, avertisseur de sortie involontaire de voie, etc. On peut heureusement faire sauter ces bretelles électroniques qui tentent de nous prendre le volant des mains. Sous le capot, point de turbo ! Les ingénieurs japonais ne jurent toujours que par le moteur atmosphérique. Deux blocs sont proposés : le 1.5 Skyactiv de 131 ch et le 2.0 Skyactiv de 160 ch. Les moteurs sont alimentés par une injection directe et associés à une boîte manuelle à six rapports.

Pour décapoter, il suffit toujours de tirer sur une poignée et de jeter la toile vers l’arrière. L’opération prend moins de 5 secondes. Et refermer le toit est facile car la capote est légère grâce à son armature en aluminium. En conduite courante, on apprécie l’élasticité du petit 1.5, qui reprend sans broncher dès les plus bas régimes. Et ce moteur grimpe allègrement jusqu’à la zone rouge, fixée à 7.500 tours/minute. En action, le rythme est vite élevé, grâce aux bonnes performances (0 à 100 km/h en 8,3 s) et au châssis affûté, composé d’un train avant à double triangles et d’un essieu arrière multibras.

Bien balancée (répartition des masses AV/AR de 50/50%), la nouvelle MX-5 se dandine toujours d’un virage à l’autre avec agilité. Son équilibre la rend très facile à piloter et il est tout à fait possible d’enrouler de l’arrière en virage serré sans se faire peur. La MX-5 avale aussi les bosses sans broncher grâce à sa rigidité et une suspension offrant un excellent compromis confort/tenue de route. La version 2 litres nous tasse davantage les vertèbres car elle repose d’office sur une suspension sport. Son moteur pousse fort (0 à 100 km/h en 7,3 secondes) et est plus coupleux, mais il est moins joyeux à haut régime que le 1.5 l qui remporte donc nos suffrages, d’autant qu’il coûte moins cher (à partir de 22.590 euros contre 27.690 pour la version 2 litres).

Une union d’esprit

Malgré son relatif embourgeoisement, la MX-5 a finalement peu grossi avec le temps. La nouvelle est parvenue à transposer dans son époque les valeurs prônées par son aïeule. Fidèle à l’esprit du roadster authentique, la MX-5 d’aujourd’hui revendique toujours le plaisir de conduite sans excès de poids ni de puissance. Un véritable joujou extra, dont la saga se poursuit cette année avec l’arrivée de la variante RF (Retractable Fastback), qui est en fait une ” Targa “, puisque le toit ne se replie pas totalement : le modèle conserve en effet des montants arrière fixes, sous lesquels viennent se ranger le panneau de toit rigide et la lunette arrière en verre. La manoeuvre d’ouverture (et de fermeture) du toit est électrique et ne prend que 13 secondes. Cette version RF reprend les moteurs du roadster à capote en toile, mais coûte logiquement plus cher : à partir de 26.090 euros en 1.5 l et de 30.190 euros en 2 l. Enfin, on notera aussi que la nouvelle MX-5 est tellement réussie qu’un autre constructeur a décidé d’acheter son squelette… Ainsi naquit l’an dernier la nouvelle Fiat 124 Spider, clone technique de la Mazda MX-5. Celle qui a imité les roadsters britanniques d’antan est donc à son tour copiée. La boucle est bouclée…

OLIVIER MALOTEAUX

Mazda ne s’est pas contenté de singer l’apparence des roadsters britanniques de la belle époque. Sa MX-5 en a modernisé la structure et a aussi éradiqué leurs caprices mécaniques.

Fidèle à l’esprit du roadster authentique, la MX-5 revendique toujours le plaisir de conduite sans excès de poids ni de puissance.

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