Le nouveau visage des tatoueurs

© hublot

Jadis stigmatisés, les tatouages ont depuis quelques années envahi l’anatomie de monsieur et madame Tout-le-Monde. Prisés par plusieurs générations, tous horizons confondus, ils ont même intégré le panier de la ménagère parmi d’autres produits de consommation. Le profil de la clientèle ayant évolué, le marché de l’aiguille s’est, lui aussi, transformé.

1.558 tatoueurs

Environ 500.000 tatouages seraient réalisés par an en Belgique et le nombre de salons ne cesse de croître. ” On compte 1.558 tatoueurs pour la Belgique entière, révèle Vinciane Charlier, porte-parole d’Health Belgium, auprès de qui les professionnels s’enregistrent après avoir réussi une formation en prévention et hygiène, obligatoire pour procéder à des activités de tatouage et de piercing. Des formations organisées dans des centres reconnus, comme l’IFAPME et Syntra. “En 2018, il y a eu 390 réussites. La formation est payante (480 euros environ au moment de l’inscription). L’enregistrement auprès d’Health Belgium est gratuit.”

Un métier d’artistes et d’artisans

Il n’existe pas de formation en tatouage proprement dite. Les tatoueurs sont majoritairement issus du milieu artistique (illustration, design, graphisme, etc.) et s’initient ensuite à l’art de l’aiguille auprès de tatoueurs professionnels. A l’instar de Hedi Baka, originaire de Hyères, tatoueur depuis trois ans, installé à Bruxelles depuis un an. “J’ai un master en design graphique. Illustrateur, j’ai ajouté le tatouage parmi mes activités après avoir suivi une formation. C’est un métier artistique, mais aussi artisanal, qui demande un apprentissage et un savoir-faire.” Alex Lejeune exerce pour sa part la profession depuis près de 20 ans et a monté le salon Singulier (singulier.net) rue Haute à Bruxelles voici trois ans : ” J’ai tenu un salon durant une quinzaine d’années avant d’ouvrir celui-ci où travaillent une douzaine de tatoueurs. Avec des pros et des jeunes en formation. On a voulu une structure dédiée aux jeunes générations. En parallèle, on a entamé les démarches pour ouvrir une école car il y a un manque. Il existe parfois des formations rapides, de trois mois, mais ce n’est pas suffisant.”

Un métier de plus en plus spécialisé

Avec le boom du tatouage, le profil de la clientèle a changé, mais aussi sa démarche. “Auparavant, les gens poussaient la porte de n’importe quel tatoueur, qui faisait de tout, pour se faire poser le motif qu’ils avaient en tête, expliquent Antoine et Arnaud, vendeurs chez ITC (itcpiercing.com), société française spécialisée dans la fourniture de matériel de tatouage et piercing. Aujourd’hui, les gens n’ont plus nécessairement une idée précise de ce qu’ils désirent se faire tatouer. Par contre, ils choisissent avec soin leur tatoueur. Ils veulent un artiste qui leur inscrira une oeuvre sur la peau.” Une nouvelle demande qui pousse les tatoueurs à affiner leur style : tribal, old school, dotart (art du point), géométrique, biomécanique, etc. “Les profils deviennent ultra spécialisés”, confirme le duo.

Le nouveau visage des tatoueurs
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Une installation qui a un coût

“On peut débuter avec un poste de travail basique, sans les machines ni les consommables (aiguilles, cartouches, manchons, encre, etc.), pour environ 800 euros”, explique Hedi Baka. Mais les prix grimpent vite. “Pour un poste complet, avec du matériel de qualité, le jeu de machines, le matériel stérile, les lampes, le support informatique, etc., comptez plutôt 5.000 euros, commente Alex Lejeune. Et pour tout ce qui est consommable, on tourne facilement autour des 200 euros par semaine.” A titre indicatif, il faut compter entre 300 et 600 euros pour une machine à tatouer, entre 20 et 40 euros pour un pot d’encre noire de 150 ml, entre 25 et 45 euros pour un jeu de 20 aiguilles (source : ICT). A cela, il faut ajouter le prix de la location ou de l’achat du lieu, sa mise en place, son entretien, et le cas échéant, du personnel…

Chaque oeuvre a son prix

Le prix de départ d’un tatouage oscille entre 80 et 100 euros pour ce que l’on appelle dans le jargon “la sortie de l’aiguille” (soit la mise à disposition du matériel avant même que la peau ne soit piquée). Le montant final dépend de la taille du dessin, du temps qui y est consacré et de la renommée de l’artiste. On peut déjà se faire faire un petit tatouage pour 150 euros. “Mais on monte facilement jusqu’à 3.500, voire 5.000 euros pour un bras complet par exemple, explique le tatoueur Alex Lejeune. Paradoxalement, les oeuvres les plus imposantes ne sont pas les plus intéressantes financièrement car elles prennent beaucoup de temps. Un tatoueur fera plus de chiffre sur des petits tatouages.”

Le nouveau visage des tatoueurs
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Instaboom

Les réseaux sociaux, Instagram en tête, jouent un rôle clé dans le développement de la discipline, en particulier auprès du jeune public. Et les posts Instagram (et Pinterest) dédiés au tatouage se comptent par… millions ! “Myspace et Tumblr ont beaucoup contribué à la diffusion du tatouage avec des communautés très actives, expliquait le célèbre tatoueur suisse Maxim Büchi au journal Le Temps. Mais le tatouage a vraiment profité du boom d’Instagram, d’abord comme une simple histoire d’images, ensuite en faisant la promotion d’une pratique.”

Une clientèle de plus en plus jeune

Aujourd’hui, les tatouages s’affichent sur les célébrités, hommes d’affaires, chefs étoilés, mais surtout sur monsieur et madame Tout-le-Monde, de toutes classes et de tout âge. “Notre client type a entre 18 et 35 ans, confie Alex Lejeune. Parfois plus. Phénomène nouveau : on voit de plus en plus de mineurs pousser la porte du salon, avec une autorisation parentale ( obligatoire avant 18 ans, Ndlr). Personnellement, je déconseille un tatouage si jeune. Pour moi, le bon âge pour un premier tatouage, c’est 25 ans car la croissance est terminée, on a pris de la chair… et du plomb dans la cervelle ! ” Car oui, malgré l’essor du détatouage, un tatouage reste, à la base, une oeuvre destinée à durer toute une vie.

80 euros

C’est le prix de moyen de ce qu’on appelle dans le jargon “la sortie de l’aiguille”, soit la préparation du matériel avant même que la peau ne soit piquée et quelle que soit la taille du motif à réaliser.

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