La cuisine des amoureux

C’est ce qu’on appelle une belle histoire. Et pourtant il n’y avait ni brouillard, ni Midi, mais les plages d’Ibiza… Antoine et Slava se sont rencontrés en vacances sur l’île espagnole. Elle était l’étoile montante de Novartis en Russie, il était doctorant en marketing dans son Nord natal. Le Français et la native de Saint-Pétersbourg ont tout plaqué par amour. Et après quelques mois en Bretagne dans la crêperie de la grand-mère, voilà que le jeune couple décide de se lancer dans l’aventure des crêpes bretonnes à Comines. Dans la partie belge mais à 30 mètres de la Lys, et donc de la frontière. De fil en aiguille, la cuisine de Slava, totalement autodidacte, va évoluer et s’éloigner des spécialités bretonnes. Aujourd’hui, à côté des koulebiaks de son enfance qu’elle propose dans des boutiques spécialisées ou sur commande, Slava Tcherbak décline, dans sa Fleur de Sel, une cuisine de bistronomie enlevée et audacieuse. Un talent récompensé d’un Bib Gourmand Michelin cette année et d’un joli 13,5 chez Gault & Millau.

Comme bon nombre de restaurants depuis la pandémie, Antoine et Slava ne travaillent qu’au départ d’un menu carte. On le décline en trois, quatre ou cinq services (de 35 à 55 euros) avec un accord mets-vins (de 21 à 35 euros). Antoine avoue ne pas avoir vendu de bouteilles depuis des semaines. On comprend pourquoi: sa sélection est au poil avec de jolies découvertes que le patron connaît sur le bout des doigts. Il nous a, au passage, joliment piégé sur le dessert avec un vin orange… belge. Un épatant 100% solaris de l’appellation Heuvelland produit par le domaine Klein Rijselhoek.

Lors de notre visite, après un chouette oeuf parfait accompagné d’une émulsion de carottes et de fruits de la passion, d’une salade de fenouil et de pickles de carotte, la cheffe a servi un ris de veau de coeur cuit à la perfection sublimé par une fricassée de champignons de Comines (la commune dispose de la plus grand champignonnière de France), noix et estragon et de figues poêlées au gingembre. La présentation n’était pas très sexy mais dieu, quel goût! Mention bien pour la caille au chou-rave et à la grenade. Avec une jolie curiosité: un gratin dauphinois où la cheffe alterne la pomme de terre et la pomme. Enfin, Slava est une pâtissière (une autre de ses activités) et une très bonne, de surcroît. En témoigne ce dessert bien enlevé: un macaron au massepain et à l’oseille accompagné d’un sorbet à la mûre, à l’oseille et au thé rooibos.

Voilà une adresse authentique et sympathique en diable qui vaut le détour ou un arrêt lors d’un week-end ou une excursion dans les Monts des Flandres ou le nord de la France.