L’Intrusion

Gaspard, le narrateur, s’est fait pirater ses données. C’est arrivé bêtement, on peut dire. Un jour, il ouvre un mail énigmatique qu’il croit provenir de l’adresse de sa collègue Anne (une femme qu’il désire – les pirates le savaient-ils ? ) et il tombe ainsi dans le piège lancé contre l’entreprise pour laquelle il travaille. ” Vous êtes l’une des premières victimes du monde nouveau “, lui répond l’informaticien de la boîte. Victime collatérale. Des années d’e-mails personnels (amoureux, familiaux, amicaux) de Gaspard se retrouvent en ligne, disponibles à la lecture de n’importe qui. A commencer par sa compagne Sophie : ” Mais Sophie n’est pas une inconnue : elle n’est pas faite pour me connaître entièrement. Elle est faite pour m’aimer, pour aimer ce que je veux bien lui montrer “. Gaspard est nu et cette nudité a quelque chose de profondément terrifiant (” Je suis ce que je cache “), quelque chose qui va mettre en danger son couple, ses relations amicales, son rapport aux autres et à l’écrit. Dans la vraie vie, Quentin Lafay, qui publie là son deuxième roman, a été piraté de la sorte alors qu’il travaillait pour le candidat… Emmanuel Macron. Ses e-mails sont toujours consultables sur le site de Wikileaks dont il continue de soutenir le fondateur Julian Assange, malgré ce qu’il lui est arrivé. A lire pour une plongée dans ce que le Web peut faire de nos intimités et de notre intégrité. Un texte qui, sur ce thème, nous rappelle Les yeux rouges de l’écrivaine belge Myriam Leroy qui traitait du cyberharcèlement commis par un homme à l’encontre d’une journaliste.

Quentin Lafay, ” L’intrusion “, éditions Gallimard, 128 pages, 14 euros.

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