L’Europe du Sud sous la loupe

De nombreux investisseurs préfèrent depuis longtemps éviter les obligations publiques de la zone euro. À raison. Elles ne procurent guère de rendement. Dans certains cas, le rendement est même négatif. Pourtant, il est possible de trouver des rémunérations intéressantes sur certains titres.

Plus-values au Portugal

En 2011, les obligations publiques portugaises ont été reléguées au rang d’obligations de pacotille (junk bonds). Leur cours a diminué de moitié. Le Portugal a en effet beaucoup souffert de la crise. Mais grâce à une énorme aide financière de l’Europe, le budget portugais a pu être assaini et la compétitivité des entreprises exportatrices a pu être rétablie. L’économie portugaise enregistrera une croissance d’environ 3 % cette année.

Les évaluateurs de crédit ont revu leur opinion. Standard & Poor’s a relevé le statut du Portugal à BBB-. Nous avons vu la semaine dernière dans cette même rubrique que cela correspondait à une qualité acceptable. Les obligations portugaises à dix ans ont immédiatement bondi de trois points. Les détenteurs de ces obligations réalisent donc une belle plus-value sur leurs titres. L’obligation qui vient à échéance le 21 juillet 2016 et porte un coupon de 2,875 % s’échange aujourd’hui à 105,60 % de sa valeur nominale. Soit un rendement qui atteint toujours 2,17 %. Un choix acceptable.

Rendement élevé en Grèce

La situation économique semble enfin s’améliorer en Grèce. Ce n’est pas trop tôt, car la récession dure déjà depuis près de dix ans. Le produit intérieur brut (PIB) pourrait enregistrer une croissance de 1,5 % cette année. Il est même question d’un excédent budgétaire de 1,75 % du PIB. La Belgique pourrait donc prendre exemple sur la Grèce dans ce domaine. Mais la Grèce n’est pas pour autant sortie d’affaire. Les impôts ont augmenté, les pensions ont été réduites et près de la moitié des jeunes sont sans emploi. Mais comme les marchés financiers estiment que la situation économique se normalise, la Grèce a pu placer récemment pour 3 milliards d’euros d’obligations. Elles combinent une échéance de cinq ans et un coupon de 4,375 %. Il y a trois ans, on offrait un peu plus (4,75 %). La nouvelle obligation a été mise sur le marché à 98,91 % de sa valeur nominale. Aujourd’hui, elle coûte déjà un point de pourcentage de plus. Le rendement atteint ainsi 4,4 %.

Ce rendement élevé est bien entendu attribuable à la nature toujours (très) spéculative de la dette grecque (note B-). D’autre part, les perspectives sont positives. Cela signifie qu’un relèvement de la note est envisageable à moyen terme. L’agence de notation Moody’s reconnaît cependant que le risque de faillite n’a pas encore totalement disparu. Selon nous, cette obligation est destinée à ceux qui peuvent se permettre de prendre ce risque.

Agitation catalane

L’Espagne doit aujourd’hui payer un taux de 1,6 % sur ses obligations publiques. En Italie, c’est (un peu) plus de 2 %. Selon Bloomberg, l’augmentation du différentiel de taux met fin à une période où les investisseurs n’ont guère fait de distinction entre les obligations italiennes, espagnoles et portugaises. Car les risques politiques des différents pays de la périphérie de la zone euro commencent à diverger. À notre estime, un investisseur raisonné ne peut loger à la même enseigne les obligations publiques d’Europe du Sud.

Le nord de l’Espagne connaît une période très turbulente en raison des aspirations indépendantistes de la Catalogne. Les tensions se sont accrues ces dernières semaines. Des hauts fonctionnaires de la région catalane ont été arrêtés et des milliers de personnes ont défilé dans les rues à Barcelone. Pour les marchés financiers, ces troubles sont une mauvaise nouvelle. Une remontée des taux est très possible, ce qui entraînerait une baisse des cours des obligations. Nous préférons attendre que la situation s’apaise avant de nous intéresser à nouveau aux obligations espagnoles.

Italie vulnérable

Ces dernières semaines, le taux italien à dix ans a une nouvelle fois dépassé la barre des 2 %. Les cours des obligations en ont logiquement souffert. Mais selon la maison de Bourse Nomura, il est encore trop tôt pour acheter des obligations publiques italiennes. La situation politique y est tendue et la nouvelle politique monétaire attendue de la BCE (réduction du programme d’achats d’obligations) démontrera sans doute à quel point l’Italie est chancelante. Le dynamisme sous-jacent de l’économie italienne suscite de nombreuses inquiétudes. L’Italie est très vulnérable à un regain de volatilité sur les marchés. L’ampleur de sa dette n’y est pas étrangère. À 120 % du PIB, la dette publique compte parmi les plus élevées d’Europe. La croissance économique semble y avoir atteint son pic. Et il y manque le courage politique nécessaire pour mener à bien des réformes indispensables. Les prochaines élections auront normalement lieu avant mai 2018. Le pays restera fragile au moins jusqu’au printemps prochain. Le moment n’est donc pas propice à un investissement en obligations publiques italiennes.

Le moment n’est pas propice à un investissement en obligations publiques italiennes.

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