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Fiscalité: “Combattants acharnés de l’avion”

Souvent, ceux qui militent pour des mesures fortes contre le changement climatique insistent pour s’en prendre au trafic aérien. Les plus “verts” vont jusqu’à exiger une interdiction de tous les vols de moins de 1.000 km, prétextant qu’il existe dans ce cas des alternatives, notamment le train.

On a vu, après les tragiques attentats de Bruxelles, combien la fermeture de l’aéroport pendant quelques semaines, a causé un traumatisme économique dans la ville. Or, 40 % des vols depuis Brussels Airport portent sur des destinations se trouvant à moins de 1.000 km. En clair, on ne voit pas comment l’aéroport, ses très nombreux travailleurs, ceux de tous les commerces et les entreprises qui en dépendent, pourraient supporter le choc d’une réduction de 40 % de ses activités. Et il en est de même du reste de la ville : un aéroport performant est aujourd’hui indispensable pour attirer des visiteurs, hommes d’affaires et touristes dans une ville, et il est également nécessaire pour les entrepreneurs de Bruxelles de disposer de moyens de transport efficaces et rapides pour se rendre ailleurs.

Or, il est faux de soutenir qu’il existe des alternatives crédibles, sauf pour les villes les plus proches, comme Amsterdam, Paris ou Londres, desservies par le Thalys ou l’Eurostar. Il faut près de 7 h pour se rendre en train à Berlin, au moins 6 h pour aller à Zurich, 11 h pour rejoindre Copenhague, plus de 7 h pour Glasgow. Et toutes ces villes sont distantes de nettement moins de 1.000 km de Bruxelles. Il ne faut donc pas s’imaginer que le transport ferroviaire soit un choix acceptable : s’il n’y a plus d’avion, il n’y aura pratiquement plus de transport tout court avec les conséquences que cela implique sur le plan économique et tout simplement sur la vie en Europe.

Si l’on veut mettre sur le même pied l’avion et le rail sur le plan fiscal, on peut soit taxer de la même manière les deux modes de transport, soit les exonérer tous les deux.

D’autres, ceux qui prônent ” l’écologie bleue “, sont moins radicaux : ils ne veulent pas interdire, mais seulement taxer. Ils se disent choqués parce que l’avion est systématiquement, et de loin, beaucoup moins cher que le train. Ils revendiquent une suppression de l’exonération de TVA sur les transports aériens, sans dire que cela ne changera pas grand-chose au niveau de la concurrence. Sur un vol de 39 euros, la TVA représenterait à peine plus de 8 euros. C’est beaucoup moins que la différence de prix entre le train et l’avion low cost. Et même en taxant le kérosène, l’écart ne sera jamais comblé. Ces politiciens ne veulent-ils pas voir que le train est cher parce qu’il s’agit d’un monopole public tandis que l’avion bénéficie de la concurrence entre entreprises privées ?

Une caractéristique de notre monde politique est que la réaction à tout problème passe toujours par une idée de taxation. Si l’on veut mettre sur le même pied l’avion et le rail sur le plan fiscal, on peut soit taxer de la même manière les deux modes de transport, soit les exonérer tous les deux. Bien sûr, personne n’a suggéré d’étendre au train l’exonération fiscale des vols aériens !

Au niveau du rapprochement entre les peuples et les cultures en Europe, on s’est bien gardé de relever que les compagnies low cost ont certainement fait beaucoup plus que l’Union européenne. Et que les réalisations de celle-ci présentées comme positives, tel le programme Erasmus, perdront de leur attrait si les transports deviennent plus coûteux ou plus lents, et a fortiori s’ils sont interdits. Les premiers qui en supporteront les conséquences, ce seront ceux qui ont le moins de moyens, notamment les jeunes, dont une petite partie manifeste depuis quelques semaines ” pour le climat “.

Le combat contre l’avion que mènent certains n’est qu’un exemple, parmi de multiples autres, du coût, sans doute disproportionné, qu’impliquent les mesures prônées dans tous les domaines par les tenants de la cause climatique. Il faut cesser de penser qu’il s’agit là exclusivement d’un problème dont la solution est l’apanage des climatologues. Leur concours est précieux, comme celui de tous les scientifiques. Mais les choix à faire sont d’ordre économique et politique. Sans doute faudrait-il commencer par comparer les coûts humains et environnementaux que représentent, d’une part l’acceptation d’un certain réchauffement et, d’autre part, des propositions extrêmes de quelques fondamentalistes. Ce débat ne peut être confisqué par les spécialistes d’une seule science ; il affecte potentiellement tout le monde et sûrement pas chacun de la même manière. Il est sans doute regrettable qu’il n’y ait pas de discussion sérieuse sur ce thème-là, à tout le moins entre les partis politiques francophones en Belgique.

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