Blandine Rinkel est très forte

Blandine Rinkel, "Vers la violence", Fayard, 378 pages, 20 euros.

“Vers la violence”,troisième roman de la Française, impressionne par la maîtrise dans l’écriture et, surtout, le dégradé de nuances de son propos.

Elle est très forte, Blandine Rinkel. Impressionnante artiste qui, à 30 ans, cumule déjà une belle carrière de chanteuse et performeuse au sein du groupe Catastrophe à côté de son activité de critique littéraire et surtout de son métier d’écrivaine. On l’avait découverte en 2017 avec son premier roman, L’Abandon des prétentions, portrait tout en contradictions et justesse de la Mère, en l’occurrence Jeanine, jeune retraitée, isolée, qui donnait de son temps pour accueillir réfugiés et autres laissés-pour-compte de la banlieue nantaise. Un texte très mature et abouti qui l’avait placée dans les radars des cénacles. Blandine Rinkel n’avait ensuite déçu ni avec Le Nom secret des choses, roman sur le transfert de classe sociale d’une étudiante de province qui arrive à Paris, ni avec Tout tremble, réflexion plus théorique sur l’acte de créer.

Ici, son troisième roman, Vers la violence, s’attaque à la figure du Père. Et si l’on a mis des majuscules à ces deux termes – Mère, Père -, c’est qu’il y a bien matière à démythifier, exercice auquel s’emploie la romancière avec brio tant dans la forme que dans la finesse du fond. Gérard – c’est le Père – aime sa fille au moins autant que sa fille l’aime. Elle veut l’épouser. C’est ce qu’ils feront quand elle sera grande, se promettent-ils. Mais que deviennent les promesses lorsque s’éteint l’enfance? Et que devient l’admiration pour le Père quand s’éteint l’insouciance? La magie peut disparaître, laissant voir un décor sombre où s’invite la peur. Blandine Rinkel décrit la violence rampante, pathétique au sein du foyer ; ce que l’on pourrait nommer aujourd’hui, en raccourci, la masculinité toxique. Bon Gérard, Mauvais Gérard, le but n’est pourtant pas de trancher et c’est en cela que ce livre est un vrai bon roman: il se situe par-delà la morale.

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