Avec le retour de l’argent gratuit, ” greed is back “

Amid Faljaoui Rédacteur en chef de Trends-Tendances

En dépit de la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, malgré les tensions avec l’Iran et le possible blocage du détroit d’Ormuz (par lequel transite 30% du pétrole mondial), Wall Street ne joue pas la carte de la déprime. C’est même plutôt l’euphorie. D’ailleurs, une bonne partie de cette euphorie boursière est alimentée par des sociétés nouvellement cotées en Bourse. Leur rôle principal ? Faire fantasmer les investisseurs. C’est le cas de Slack, une messagerie d’entreprises qui vient d’être introduite en Bourse alors qu’elle affiche 140 millions de dollars de pertes. Mais peu importe, la Bourse américaine ne s’arrête pas à ce genre de détail mesquin et cela n’empêche pas Slack d’être déjà valorisée à 20 milliards de dollars par les investisseurs. Comprenne qui pourra.

Avec des taux d’intérêt en baisse des deux côtés de l’Atlantique, les investisseurs sont uniquement attirés par ce qui brille (l’or) ou par ce qui fait saliver (les faux steaks hachés).

Mais l’euphorie boursière a aussi percolé sur la mode végane. En particulier sur l’action Beyond Meat, une société spécialisée dans la fabrication de steaks végétaux dont le goût imite celui de la viande grillée. La société Beyond Meat qu’on pourrait aussi appeler la ” Reine du faux steak haché ” a vu son titre flamber en Bourse avant de jouer au yoyo. Fondée en 2009, hier donc, et bien qu’étant elle aussi en perte, cette société vaut déjà plus de 10 milliards de dollars en Bourse de New York. Là aussi, comprenne qui pourra.

Mais il est vrai que ce marché des produits alimentaires à base de protéines végétales fait rêver et semble avoir un bel avenir devant lui. A l’évidence, les substituts à la viande plaisent à une certaine clientèle dans les pays occidentaux. Ce marché pourrait même croître de 1.000% au cours des 10 prochaines années selon la banque britannique Barclays. La raison ? En Occident, nous sommes de plus en plus nombreux à nous préoccuper du changement climatique et du bien-être des animaux. Et puis, dans l’intérêt porté par les investisseurs aux actions Beyond Meat, il y a aussi l’aspect moutonnier. Ne serait-ce que parce que parmi les premiers investisseurs de cette société, on retrouve des gens célèbres comme Bill Gates ou Leonardo Di Caprio.

Mais la réalité est parfois aussi plus triviale : la spéculation joue son rôle autour des actions liées à la mode végane. D’ailleurs, certains spécialistes comparent cette euphorie pour les sociétés fabriquant des substituts à la viande à l’euphorie pour le marché des cryptomonnaies. Voire à l’engouement de Wall Street pour les actions liées au cannabis thérapeutique. Pour rappel, l’action Beyond Meat a grimpé à un moment donné de 600% en quelques mois, alors que cette société ne gagne pas encore d’argent. Bien entendu, la spéculation n’est jamais loin. Dans le cas présent, les spéculateurs espèrent qu’un grand acteur comme McDonald’s signera un accord de collaboration avec la société Beyond Meat. Les détenteurs de l’action Beyond Meat y croient d’autant plus fort que le patron de McDonald’s est entré au capital de Beyond Meat.

Les investisseurs plus prudents restent à l’écart de cette frénésie boursière, car ces alternatives végétales sont un produit de niche destiné à une clientèle aisée et basée dans les pays développés. Bref, selon ces optimistes documentés (la vraie définition des pessimistes), il faudrait consommer ces faux steaks hachés avec beaucoup de modération. Pour l’heure, la Bourse ne semble pas entendre le message. Avec des taux d’intérêt en baisse des deux côtés de l’Atlantique, les investisseurs sont uniquement attirés par ce qui brille (l’or) ou par ce qui fait saliver (les faux steaks hachés). Avec le retour de l’argent gratuit, greed is back.

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