L’acte d’avocat satisfait les notaires

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Les avocats auront bientôt une nouvelle corde à leur acte : l’acte d’avocat. Les notaires ne se sentent pas menacés.

La Commission Justice du Parlement fédéral vient d’adopter, le 4 janvier dernier, une proposition de loi créant l’acte d’avocat. Elle est sensiblement différente de la première mouture du texte, déposée en mai 2011 par le député et actuel président du PS Thierry Giet. Après une série d’auditions de professeurs de droit, d’avocats et de notaires, le mécanisme adopté ressemble à s’y méprendre au dispositif en vigueur depuis peu en France.

L’acte d’avocat est un acte sous seing privé contresigné par les avocats représentant les différentes parties. Il peut s’agir par exemple d’une reconnaissance de dette, d’un contrat, d’une vente ou encore d’un compromis de vente d’immeuble… auquel les parties souhaitent apporter une sorte de ” caution juridique ” en concluant cet acte sous le contrôle d’un homme en toge. ” Ce système renforce la sécurité juridique de certains actes, à côté de celle attribuée aux actes notariés “, indique l’avocat Jean-Pierre Buyle, qui a soutenu l’adoption de l’acte d’avocat au cours de son bâtonnat à la tête du barreau francophone de Bruxelles.

Les actes contresignés par des avocats bénéficieront d’une force probante plus solide que s’ils sont simplement signés sous seing privé, entre parties. Les contestations de ce type d’acte en justice seront rendues plus compliqués en raison du ” sceau légal ” apposé au document par un avocat. Ce qui a pour objectif, notamment, de réduire dans certains cas le recours à la justice, et donc in fine de désengorger (à la marge sans doute) les cours et tribunaux.

Sur les plates-bandes des notaires ?

Les notaires se sentaient menacés par la première version du texte. Ils sont désormais parfaitement rassurés. La première mouture de la proposition de loi prévoyait en effet d’apporter une force exécutoire à certains actes d’avocat concernant des transactions (une vente par exemple). La force exécutoire signifie que l’exécution d’un acte peut être exigée (en recourant éventuellement à un huissier), sans devoir passer devant un tribunal.

Grâce à leur lobbying auprès de la commission Justice, les notaires sont parvenus à faire retirer cette disposition. S’ils étaient d’accord pour conférer une force probante renforcée à l’acte d’avocat, la force exécutoire leur restait en travers de la gorge. ” Le notaire, en tant qu’officier d’état civil, offre un contrôle de légalité plus fort qu’un avocat “, explique le notaire Pierre Nicaise, qui a participé aux auditions devant le Parlement, au nom de la Fédération royale du Notariat belge. ” Un acte d’avocat doté de la force exécutoire aurait pu être contesté devant un juge, mais uniquement pour contrariété à l’ordre public, ce qui comporte un risque au niveau de la sécurité juridique “, poursuit Pierre Nicaise.

” Un texte équilibré “

” Je ne comprends pas vraiment le problème des notaires, commente Jean-Pierre Buyle. La force exécutoire n’aurait été accolée qu’aux actes d’avocat concernant une transaction, ce qui n’est pas le coeur de leur métier. Les avocats ne sont pas demandeurs d’empiéter sur les compétences des notaires. ” Ces derniers ont néanmoins analysé cette demande de force exécutoire comme une attaque frontale de la part des avocats sur leur business d’officier d’état civil. Les parlementaires ont donc accédé à la demande des notaires, et conféré une simple force probante à l’acte d’avocat. ” La proposition de loi est plus équilibrée, explique le notaire Pierre Nicaise, qui a participé aux auditions devant le Parlement. Elle respecte les spécificités de chaque profession. “

Reste à voir si cet acte d’avocat séduira les justiciables et s’il contribuera à réduire l’engorgement des cours et tribunaux.

Gilles Quoistiaux

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