Une étude prône une réorientation plus sociale du bonus logement

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A l’occasion du transfert du bonus logement aux Régions dans la cadre de la dernière réforme de l’Etat, celles-ci, et singulièrement la Région bruxelloise, auraient tout intérêt à reconfigurer le dispositif dans un sens plus social, ressort-il du dernier numéro de Brussels Studies, la revue scientifique électronique destinée à la mise en valeur de recherches portant sur des questions bruxelloises.

Pour ne pas prendre le risque de déstabiliser le marché immobilier qui lui offre 40% des recettes régionales, le gouvernement bruxellois a décidé de ne rien changer avant une réforme fiscale appelée à entrer en vigueur en 2017. Une prudence que les auteurs de l’étude, Nicolas Bernard, professeur de droit à l’Université Saint-Louis, et Valérie Lemaire, juriste et ancienne chercheuse dans cette même université, semblent juger un peu excessive.

Le gouvernement Vervoort aurait ainsi pu déjà réduire de 45% à 40% comme la Flandre et la Wallonie, le taux de réduction d’impôt contenu dans la dispositif, jugent-ils. Dans le numéro 83 de Brussels Studies diffusé lundi, les auteurs formulent des pistes de réorientation d’un outil “aussi plébiscité que controversé”.

D’une valeur moyenne annuelle de 1.348 euros à Bruxelles (contre 1.395 euros en Flandre et 1.310 euros en Wallonie), l’aide est répétée à chaque exercice imposable, tout le temps du remboursement du prêt. Avec une durée moyenne du crédit hypothécaire de vingt ans, l’avantage fiscal dépasse au total les 25.000 euros. Et 50.000 euros s’il s’agit d’un couple.

L’étude met d’abord en avant l’iniquité du système. L’avantage fiscal est octroyé sans condition de revenus, ce qui a pour effet d’en faire bénéficier surtout ceux qui n’en avaient pas vraiment besoin et “qui de toute façon seraient sans doute passés à l’acte”. La moitié de l’enveloppe budgétaire est captée par les deux déciles supérieurs de revenus, tandis qu’à peine 1% du dispositif vont au premier.

Autre effet pervers du dispositif pointé par l’article: le soutien est plus fort lorsque le ménage est composé de deux personnes alors que les personnes seules – nombreuses en Région bruxelloise – disposent le plus souvent de revenus plus faibles. Par ailleurs, il pèse sur la demande de la classe moyenne et sur les prix du marché immobilier.

Qui plus est, octroyé sans condition de revenus, il coûte un pont au Trésor public: toutes régions confondues, 2,2 milliards par an si on le cumule aux dépenses liées au régime fiscal antérieur à 2005. Selon les auteurs de l’étude, la déduction fiscale fédérale et la palette de soutiens régionaux au logement consacrent en Région bruxelloise quelque 219 millions aux propriétaires, soit bien plus que les moyens consacrés aux locataires, proportionnellement fort nombreux.

Ceux-ci estiment que s’il devait être conservé, il pourrait être utile de réserver le bonus logement à ceux qui acquièrent un bien pour la première fois. Actuellement, s’ils revendent le bien unique qu’ils occupent, les propriétaires peuvent bénéficier du bonus logement pour leur nouvelle habitation acquise. Pour Nicolas Bernard et Valérie Lemaire, il importe donc, pour la Région bruxelloise, de reconfigurer le bonus logement pour s’adapter aux réalités régionales, dans un sens plus social notamment.

A l’avenir, on pourrait également lier cet avantage à des exigences en matière de salubrité ou de performance énergétique, ou le réserver par exemple aux primo-acquéreurs, mais toujours en veillant à ne pas tuer la poule aux oeufs d’or: les droits d’enregistrement pèsent 40% dans les recettes fiscales de la Région-capitale.

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