Scinder un achat immobilier: tout un art!

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La technique de l’achat scindé d’un bien immobilier par des parents et leurs enfants est très populaire. Encore faut-il que l’opération soit réalisée dans les règles pour être intéressante.

Cette technique de planification successorale est simple : les parents achètent l’usufruit d’un bien immobilier, les enfants en achètent la nue-propriété. Au préalable, les parents font généralement don à leurs enfants de la somme équivalente à la nue-propriété. A leur décès, les enfants deviendront pleins propriétaires du bien sans devoir s’acquitter de droits de succession. Mais la clause de fiction (art. 9 du Code de succession) est venue compliquer quelque peu l’opération en 2013.

Fiction non autorisée

Pour que la construction soit admise par le fisc, il faut d’une part que les enfants puissent démontrer qu’ils détenaient les moyens nécessaires au paiement de la nue-propriété et qu’ils les ont effectivement mobilisés pour cet achat, et d’autre part, que l’usufruit et la nue-propriété aient été évalués correctement. En outre, depuis le 1er septembre 2013, lorsque les enfants reçoivent d’abord des parents l’argent nécessaire à l’achat de leur part, l’opération n’est probante pour le fisc – lire : les enfants ne seront pas redevables, au décès de leurs parents, de droits de succession sur la valeur totale du bien – que dans deux cas : si des droits d’enregistrement ont été payés sur la donation préalable ou si les enfants peuvent prouver que la donation n’était pas spécifiquement destinée à l’achat de la nue-propriété.

On peut déduire de cette condition de preuve “que la donation n’était pas spécifiquement destinée à l’achat de la nue-propriété” que si un laps de temps suffisant s’est écoulé entre la donation et l’achat de la nue-propriété et si le montant donné ne correspond pas exactement au montant à payer (on peut aussi envisager une donation en plusieurs tranches), on échappe probablement au cas de fiction. L’incertitude demeurant à cet égard, on conseillera aux parents de privilégier un don bancaire aux enfants dont ils feront enregistrer un document probant (les droits d’enregistrement s’élèvent, en ligne directe, à 3% de la valeur de la donation à Bruxelles et en Flandre, et à 3,3 % en Wallonie).

Juste valorisation

L’usufruit des parents peut tout à fait être limité dans le temps. Dans ce cas, la valeur de la nue-propriété des enfants sera plus élevée – et la donation préalable devra l’être aussi. Il est important de ne pas sous-estimer la nue-propriété pour qu’au décès des parents, les enfants puissent prouver qu’ils ont bien payé leur part. Dans cette optique, les enfants conserveront précieusement les factures, extraits de compte et preuves de paiement. Pour mémoire, les banques ne conservent les extraits de compte que durant dix ans. Idéalement, la clé de répartition sera fixée dans l’acte d’achat ou dans un document sous seing privé présenté à l’enregistrement.

Pensez au droit d’habitation

Pour éviter le risque de fiction précité, les parents peuvent acheter non pas l’usufruit mais le “droit d’usage et d’habitation”. Les enfants achètent ensuite les autres droits de propriété. Nul besoin d’enregistrer la donation préalable aux enfants dans le cadre de cette construction qui convient en principe aux parents souhaitant jouir d’un bien immobilier toute leur vie, sans intention de le louer ; le droit d’habitation ne leur confère pas le droit de louer le bien sans l’accord des enfants. Mais ces derniers peuvent donc les y autoriser.

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