Les sicafi nouvelles sont arrivées

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Le nouvel arrêté royal concernant les sicafi (sociétés d’investissement à capital fixe immobilières) est entré en vigueur le 7 janvier 2011. Une refonte réalisée en concertation avec les acteurs

Les nouvelles règles en vigueur modernisent le cadre légal des sicafi pour l’adapter au développement des marchés financiers et renforcer l’attrait de ces véhicules boursiers pour les investisseurs. Mais ce cadre fixe également de nouvelles balises qui se veulent plus transparentes. Nous avons tenté de cerner les principales innovations avec l’aide des spécialistes du cabinet d’avocats Clifford Chance, Philippe Hamer et Thierry Blockerye.

1. Arrimer des véhicules institutionnels aux sicafi publiques

“La plus grande nouveauté introduite par cet arrêté royal est de toute évidence la possibilité pour une sicafi publique de constituer, soit seule, soit avec le concours d’investisseurs institutionnels ou professionnels tiers, une sicafi institutionnelle qui aura aussi pour objet d’investir en immobilier (*)”, font observer d’emblée les juristes.

Plus pragmatiquement, les actions de cette sicafi institutionnelle ne devront pas être cotées en Bourse et peuvent rester dans les mains de la sicafi publique et d’investisseurs institutionnels ou professionnels. Et ce véhicule non coté bénéficiera du même régime fiscal favorable que la sicafi publique d’origine. Cette dernière peut donc désormais, au travers de véhicules spécialisés, mener des projets immobiliers bien déterminés avec des investisseurs institutionnels ou professionnels (par exemple dans le cadre d’un partenariat public-privé).

“Toutefois, dans le souci de préserver l’intérêt des actionnaires de la faîtière publique, le contrôle de ce véhicule institutionnel devra rester dans les mains de la première (ou être exercé conjointement par celle-ci avec les investisseurs tiers). De même, cette sicafi institutionnelle devra être inscrite auprès de la CBFA et sera soumise à son contrôle”, prévient-on au cabinet Clifford Chance.

Autre balise à cette libéralisation : la sicafi publique ne pourra détenir à la fois des filiales ayant le statut de sicafi institutionnelle et d’autres n’ayant pas ce statut.

2. Faciliter la levée de fonds rapide : trois jours de Bourse seulement

“En abolissant l’interdiction de limiter ou de supprimer le droit préférentiel de souscription des actionnaires existants pour autant qu’un droit d’allocation prioritaire irréductible leur soit octroyé, le nouvel arrêté royal établit également de nouvelles règles, plus flexibles, permettant de faciliter le financement des sicafi sur les marchés de capitaux”, ajoute-t-on chez Clifford Chance. Pour ce faire, la période minimum de souscription à une augmentation de capital en numéraire de la sicafi a été drastiquement réduite : de 15 à seulement trois jours (de Bourse).

Une autre innovation importante est la possibilité d’émettre des valeurs mobilières autres que des actions, comme par exemple des obligations convertibles (l’émission de parts bénéficiaires demeure cependant interdite).

Les sicafi pourront également proposer un dividende optionnel. Enfin, la détermination du prix d’émission minimum pour les actions émises dans le cadre d’une augmentation de capital par apport en nature devient également plus flexible.

3. Rendre plus flexible – et transparent – le fonctionnement de la sicafi

A cet effet, de nouvelles règles de gouvernance sont désormais d’application. Parmi les plus significatives, notons que le conseil d’administration de la sicafi devra comprendre au moins trois administrateurs indépendants. De nouvelles règles de prévention de conflits d’intérêt, plus larges, ont également été introduites. Plus significatif, surtout par temps de crise : les Sicafi sont dorénavant obligées d’alterner les experts qu’elles désignent pour évaluer leur patrimoine immobilier à plusieurs sources, même si ces experts peuvent encore se voir conférer un mandat d’une durée consécutive de trois ans. En outre, leur rémunération ne pourra plus être liée à la valeur du patrimoine immobilier expertisé.

L’obligation pour la sicafi (publique ou institutionnelle) de distribuer au moins 80 % de ses revenus nets est également recadrée et subordonnée au respect d’autres règles, notamment en matière de dividende versé (article 617 du Code des sociétés limitant le montant distribuable par une société anonyme ou une société en commandite par actions) et de ratio d’endettement maximum.

4. Un régime fiscal globalement plus intéressant

Comme indiqué ci-dessus, la sicafi institutionnelle bénéficie du même régime fiscal favorable que la sicafi publique (exit tax de 16,995 %, step-up d’actifs, augmentation de fonds propres, etc.). Elle sera soumise à l’impôt des sociétés en Belgique sur une base très réduite.

La possibilité offerte aux sicafi publiques de créer des filiales jouissant du même régime fiscal favorable pour réaliser certains projets immobiliers leur permettra de rendre plus liquides leurs investissements et facilitera la cession de ces investissements à des tiers, la cession des actions d’une sicafi institutionnelle pouvant se faire sans coût fiscal indirect (exonération de droits d’enregistrement).

Ce nouveau véhicule financier de sicafi institutionnelle devrait constituer un instrument d’investissement fiscalement intéressant. Non seulement pour les sicafi publiques, mais aussi pour les investisseurs institutionnels et professionnels. “Il est d’ailleurs relativement aisé d’obtenir le statut d’investisseurs institutionnel et professionnel pour les personnes morales ayant leur siège statutaire en Belgique”, font remarquer les avocats spécialisés. Ces dernières doivent simplement en faire la demande à la CBFA. Une simplicité que les principales sicafi existantes se permettent de nuancer.

Philippe Coulée

(*) La notion de “sicafi institutionnelle” se différencie de celle de “sicafi publique” principalement par le fait que ses actions ne peuvent être souscrites que par des investisseurs institutionnels ou professionnels (notamment les établissements bancaires, les compagnies d’assurances, les collectivités publiques, certaines autres sociétés, etc.) alors que les actions d’une sicafi publique peuvent être souscrites sans restriction particulière par tout investisseur privé.

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