La “location-écureuil”, nouveau sésame d’accès à la propriété ?

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Pour faciliter l’accès à la propriété, une nouvelle formule rencontre son petit succès sur le marché de l’immobilier: la “location-écureuil”. En quoi consiste-t-elle ?

La “location-écureuil” est une formule qui permet de louer un bien neuf avec l’option de l’acheter plus tard. Les “locataires-écureuils” contractent un bail de location avec une option de vente avec l’entrepreneur immobilier. Tant que les personnes louent le bien, elles sont considérées comme locataires. Si la chaudière tombe en panne, c’est donc le propriétaire qui couvrira les frais. Aucun compromis de vente n’est signé, juste une option d’achat.

Après cinq ans maximum, les loyers payés sont transformés en capital utilisé comme apport pour financer l’achat. Cela signifie que la somme totale payée jusque-là en loyers sera retirée à 100 % du prix d’achat. En outre, le prix d’achat reste le même pendant cinq ans et une période de réflexion à l’achat du bien prévaut pendant maximum 10 ans. Si les personnes qui occupent le bien décident ne pas passer à l’acte pour une raison ou une autre, elles peuvent continuer de le louer. Les 10 ans passés, il ne sera toutefois plus possible d’acquérir le bien.

Cette formule, de plus en plus populaire au nord du pays (“hamsterhuren” en néerlandais), a été lancée l’année dernière par l’entreprise de construction Gilen originaire de Saint-Trond. Elle rencontre, selon son initiateur, un tel succès qu’il n’arrive pas à suivre la demande. Une centaine de candidats se trouveraient sur liste d’attente actuellement a déclaré Laurens Gilen au Belang van Limburg. L’entreprise a également lancé des projets en Wallonie.

La formule, unique en Belgique, est principalement intéressante pour les jeunes couples et les familles monoparentales qui n’ont pas les finances suffisantes pour acheter directement un bien. Selon iVox, 8 Belges sur 10 qui louent un appartement n’ont en effet pas les moyens financiers d’acheter une maison ou un appartement. Et avec la nouvelle recommandation de la Banque Nationale de la Belgique (BNB) qui impose aux acheteurs de financer au moins 20 % du prix d’achat d’une habitation eux-mêmes, les obstacles à la propriété se sont multipliés ces dernières années. Le plus grand des avantages procurés par l’accession progressive à la propriété est qu’il n’est pas nécessaire de contracter un crédit immobilier avec les conditions strictes inhérentes.

En pratique: dans le cas d’une maison affichée à 290.000 euros avec le versement d’un loyer les 5 premières années de 950 euros, lors de l’achat éventuel au bout de cette période de 5 ans, la somme de 57.000 euros sera soustraite de la somme totale de l’achat de la maison. Il ne restera donc “plus que” 233.000 euros à payer.

Une autre formule du même genre a été mise sur pied par l’entreprise Dewaele en 2017, elle se dénomme “Rent to Buy” et a, elle aussi, son petit succès sur le marché. “Dans cette formule, le prix d’achat est défini dès le début pour un terme de maximum 3 ans, pour éviter les surprises avec la TVA et les droits d’enregistrement“, déclare Sarah De Geest, agent immobilier chez Dewaele, au Morgen. Elle ajoute : “Il est en effet important que chaque partie concernée sache à quoi s’attendre et que les droits et obligations soient transparents.”

En 2016, une formule de “location-vente” de logement a aussi été lancée dans la commune wallonne d’Engis, rapporte la RTBF. “L’idée ici, c’est, au travers d’un bail assorti d’une clause d’option d’achat, que ces personnes puissent pendant 18 à 24 mois capitaliser leurs loyers, qui seront conservés sur un compte spécifique, et que la moitié de ce loyer leur soit remboursé au terme de la location et leur permette d’aller trouver une banque et sans doute d’obtenir un prêt hypothécaire plus facilement puisqu’ils apporteront un capital qui pourrait quand même être de l’ordre de 10 000 euros “, précise sur le site de la radiotélévision publique Philippe Lhomme, l’administrateur délégué de la régie communale autonome. Ce système offre aussi un autre avantage: il permet de tester le logement et le quartier pendant la période définie, avec ses atouts et ses inconvénients.

Anguille sous roche?

La Commission Logement du parlement flamand s’est penchée sur la formule et n’y a pas vu d’entourloupes. Mais les experts immobiliers sont plus réticents et mettent en garde sur certains aspects, notamment fiscaux.

Les taux hypothécaires sont en effet très bas actuellement, mais pourraient bien augmenter dans les années à venir, lorsque les “locataires-écureuils” devront contracter un emprunt.

Les experts conseillent aussi de bien se renseigner sur les détails et les modalités du contrat proposé. Au niveau fiscal notamment, l’expert Michel Maus prévient dans le quotidien flamand De Morgen : “La fiscalité est désespérément dépassée et ne suit pas avec ce nouveau type de formule d’habitation”.

Les loyers peuvent dans ce genre de construction être au-dessus des prix moyens pratiqués. “Comme cela concerne des nouvelles constructions; le taux de TVA de 21% est applicable. En principe, c’est l’acheteur qui paie la TVA, mais tant qu’il loue la maison, c’est l’entrepreneur qui doit la prendre à sa charge. Cela peut donc être répercuté sur le loyer.”

Quand le bien est acheté plus tard, des frais d’enregistrement sont aussi appliqués. “Les droits d’enregistrement sont d’application pour la valeur totale de l’habitation. Les loyers déjà payés ne sont donc pas déduits des droits d’enregistrement. Finalement, il faut aussi prendre en compte l’avantage fiscal d’un crédit hypothécaire : un prêt hypothécaire peut être déduit fiscalement, les loyers pas”, conclut Maus.

Par contre, louer est souvent meilleur marché qu’acheter un bien et emprunter de l’argent à cette fin, même si le candidat acheteur perçoit un avantage fiscal pour l’achat de son habitation ou une exonération de droit d’enregistrement jusqu’à 175.000 euros du prix d’achat à Bruxelles.

Location-écureuil versus location-vente

La “location-vente” (ou “location-accession” en France) permet d’accéder à la propriété sans avoir à débourser une somme importante au départ, en payant un loyer. Au terme du contrat et selon les modalités définies dans celui-ci, la personne devient propriétaire du bien. Concrètement, au lieu de payer l’intégralité du prix de vente déterminé lors de l’achat du bien, il va s’écouler une période où le futur propriétaire va payer son logement sous forme de loyer et d’épargne pour se constituer une avance.

La “location-écureuil” est plus flexible. Avec cette formule, deux accords distincts sont conclus : d’une part, un bail et d’autre part, une option d’achat, qui comprend le prix fixé pour l’achat du bien. Avec cette option, il n’y a pas d’obligation d’acheter le bien dans un délai défini (10 ans dans la formule de l’entreprise Gilen).

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