Avis de grand frais sur le marché immobilier incandescent de Hong Kong

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Après son prochain mariage, le Hongkongais Wilson Leung, 30 ans, espère franchir un second cap cette année, s’acheter un appartement. Un rêve devenu un peu moins inaccessible depuis qu’un marché immobilier parmi les plus chers du monde montre des signes de ralentissement.

Après une décennie de hausse quasi constante, la pierre a perdu de sa valeur ces derniers mois dans la mégapole hérissée de gratte-ciel qui figure régulièrement en tête du classement des villes les moins abordables de la planète. Des vents immobiliers contraires soufflent aussi dans des grandes villes comme Londres, Vancouver, Sydney ou Shanghai.

D’après les analystes, la bonne nouvelle pour les primo-accédants comme M. Leung, qui travaille comme commercial et vit chez ses parents, devrait se confirmer cette année. En cause, la guerre commerciale entre Pékin et Washington et le ralentissent économique chinois.

“Maintenant, les prix sont ok pour moi”, dit M. Leung à l’AFP. Des propos qu’on entend pas souvent dans une ville où de nombreux jeunes économisent dans les appartements minuscules de leurs parents la trentaine largement passée.

“Je n’attends pas que le marché recule encore, j’attends une offre plus variée. Une fois que j’aurais trouvé l’endroit idéal, je sauterais dessus”, dit le jeune homme tout juste fiancé et qui aimerait devenir propriétaire avant son mariage.

Mais il ferait peut-être bien d’attendre encore. Certains analystes tablent sur de nouvelles baisses, l’affaiblissement du yuan et la perspective de hausses supplémentaires des taux d’intérêts ajoutant à la morosité ambiante.

En décembre, l’organisation professionnelle britannique Royal Institute of Chartered Surveyors (RICS), qui regroupe des experts du monde entier, a signalé deux mois de recul consécutifs du prix du mètre carré ainsi que quatre mois consécutifs de baisse des ventes d’appartements, soit la plus longue période de rouge depuis la crise financière de 2008.

“Multiples catalyseurs”

La demande des acheteurs chinois du continent, qui ont grandement alimenté la bulle immobilière au détriment de nombre de Hongkongais, est aussi en berne.

“Dans ce contexte, les attentes concernant les prix et les volumes de ventes restent fermement enracinées en territoire négatif, pour les trois et douze prochains mois”, écrit RICS.

D’après Iris Pang, économiste chez la banque ING, le mètre carré résidentiel a perdu jusqu’à 15% dans certains quartiers. Les craintes sur les retombées de la guerre commerciale jouent le plus “compte tenu de leur impact potentiel sur l’économie hongkongaise, y compris la sécurité de l’emploi, l’augmentation des salaires et les actifs en général”.

Ce “sentiment négatif perdura à moins qu’il n’y ait de vrais progrès en matière de trêve commerciale”, dit-elle à l’AFP, prévoyant une nouvelle dégringolade de la pierre de 10 à 15% en 2019.

Jusqu’alors, l’immobilier représentait un investissement sûr pour les plus fortunés, les prix ayant doublé depuis 2008.

L’ancienne colonie britannique revenue en 1997 sous tutelle chinoise s’est illustrée avec ses “micro-appartements” de la taille d’une place de parking à 2,85 millions de dollars hongkongais (320.000 euros).

Les prix de l’immobilier n’avaient brièvement chuté qu’en 2015-2016, quand les autorités avaient tenté de décourager les achats multiples de Chinois du continent sur fond de dégringolade boursière.

La tendance ne fit pas long feu. Sean Ellison, économiste chez RICS, juge que le recul actuel va durer plus longtemps.

“Cette fois, c’est différent car il y a de multiples catalyseurs”, explique-t-il à l’AFP.

Inquiétudes des vendeurs

Y a-t-il des risques de crash?

En septembre, la banque UBS avait placé Hong Kong dans le haut de son tableau pour les risques d’éclatement de la bulle.

Un appartement de 60 m2 coûte 22 années de revenus d’un salarié qualifié contre 12 années de revenus dix ans auparavant. Les salaires stagnent depuis 2008.

Certains analystes hésitent quand même à prédire l’effondrement de l’immobilier, du fait de la situation particulière de Hong Kong, territoire minuscule et densément peuplé, où la demande est immense.

“Il faudrait un choc exogène assez énorme pour que le marché dégringole vraiment”, dit M. Ellison, citant la crise financière asiatique de 1997 et l’épidémie meurtrière de Sras (Syndrome respiratoire aigu sévère) de 2003.

Il table plutôt sur une baisse de 5% des prix au cours des 12 prochains mois, sauf si les négociations commerciales entre Washington et Pékin échouent d’ici leur date-butoir de mars. Alors, “les conséquences pourraient être significatives”, prévient-il.

Côté vendeurs, c’est l’attente. “Je suis indécise et inquiète”, dit Bonnie Chan. Son appartement de 42 m2 est en vente pour 8,5 millions de dollars hongkongais (950.000 euros), soit moins que l’estimation initiale de 9 millions.

“J’ai mis mon appartement en vente mais je n’ai pas encore décidé de le vendre”.

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