Rentrée littéraire : peut-on faire des affaires en numérique ?

Environ le quart des titres de la rentrée littéraire 2010 sont disponibles en version numérique, ce qui était loin d’être le cas l’année dernière. Inutile d’espérer faire des économies substantielles si vous cherchez les blockbusters, cependant. Les prix restent élevés et le choix restreint.

Contrairement à l’an dernier où l’offre était insignifiante, près d’un quart des livraisons de la rentrée littéraire 2010 sont disponibles au format numérique. Une réalité qui doit beaucoup au n° 1 du secteur, Hachette Livre, et à la ténacité de quelques grandes maisons d’édition qui ont compris que le numérique leur offrait aussi le moyen de se diversifier.

Exemple : l’un des projets développés par Gallimard concerne la collection Smart City, version numérique de ses guides de voyage utilisant des outils et services de géolocalisation, accessibles sous forme d’applications depuis l’App Store d’Apple et l’App World de BlackBerry. Côté romans, cependant, il y a encore du chemin à faire.

L’offre numérique quatre à cinq fois supérieure à celle d’il y a un an

La Fnac constate à l’évidence une tendance vers un élargissement de l’offre numérique. Marie-Pierre Sangouard, directrice du livre, estime même que “le marché est vraiment à un moment de bascule. Sur les 700 romans publiés à l’occasion de la rentrée littéraire 2010, entre 20 % et 25 % sont disponibles en numérique. L’an dernier, cette fourchette ne dépassait pas 5 % à 7 %. Quant à la production française, soit environ 150 romans et une cinquantaine d’essais, la part des ouvrages numérisés oscille entre 25 % et 30 %.”

Des ratios que l’on retrouve, peu ou prou, si l’on passe au crible quelques Tops 10 de blockbusters publiés ici ou là. Quant aux prix affichés, “ils varient dans une fourchette comprise entre – 10 % et – 30 %”.

S’agissant des romans étrangers, leur disponibilité en numérique reste en revanche beaucoup plus aléatoire : “Les négociations avec les éditeurs étrangers sont encore très rudes, remarque Marie-Pierre Sangouard. Certains arrivent le jour même, d’autres quelques jours après. Cela dépend des éditeurs, de leur degré de maturité sur le sujet, et des auteurs.”

L’offre numérique sur une sélection de livres sortis à la rentrée :

Pour certains éditeurs, la question du numérique ne se pose plus

Les grandes maisons d’édition semblent décidées à jouer la carte du numérique. Plusieurs d’entre elles ne se posent même plus la question de savoir si telle ou telle nouveauté doit sortir en numérique. Chez Hachette Livre, le n° 1 français du secteur, qui regroupe notamment Calmann-Lévy, Grasset, Fayard, JC Lattès et Stock, le parti pris stratégique est d’être présent sur les deux formats, physique et numérique : “En littérature générale, tous les livres sortent également en version numérique sauf exception, lorsque nous n’avons pas les droits ou lorsque l’auteur ne le souhaite pas”, déclare un porte-parole d’Hachette Livre.

Chez Gallimard, même constat. Toutes les nouveautés sortent en numérique et 90 % d’entre elles simultanément à la mise en rayon des livres physiques : “Notre souhait est de proposer les livres à nos lecteurs quel que soit le support de lecture qu’ils choisissent (PC, liseuse, iPad et autres tablettes multimédia), confirme Eric Marbeau, responsable de la diffusion numérique chez Gallimard. Toute nouveauté papier sort simultanément en numérique dès lors que l’auteur cède ses droits.”

Derrière la dynamique numérique affichée par certains, la plupart des éditeurs avancent à pas comptés. Pour notre confrère Livres Hebdo, l’offre d’ouvrages numériques reste “très limitée et proposée à dose homéopathique. Tout n’est pas encore décidé au niveau des droits et de la politique de rémunération des auteurs.”

Des disparités que l’on retrouve au niveau des circuits de distribution. Hachette Livre a par exemple choisi d’être présent sur l’App Store, via l’application iBooks. Une option écartée chez Gallimard : “Nous aurions dû rentrer dans des grilles tarifaires spécifiques imposées par Apple, explique Eric Marbeau. Nous n’avons pas voulu souscrire.”

Une demande encore embryonnaire

Si l’offre commence tout juste à s’étoffer, la demande reste, elle, embryonnaire : “L’offre éditoriale doit être beaucoup plus importante que celle dont nous disposons aujourd’hui, insiste la directrice du livre de la Fnac. Dès que nous proposons des nouveautés, cela relance immédiatement les ventes, surtout en ce qui concerne les blockbusters, les policiers et la littérature générale. Quant au prix, ce n’est pas mal mais il faut aller plus loin encore.”

Le faible catalogue de liseuses disponibles sur le marché constitue également un handicap. Certes, comme le souligne Hachette Livre, “un pas a été franchi en matière d’équipements avec l’arrivée de l’iPad”. Mais en dépit de ses atouts, l’outil demeure cher. Son prix limite de fait l’accès au livre numérique.

Gilles Musi, L’Expansion.com

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