L’UE veut imposer un chargeur unique pour smartphones mais Apple joue les rebelles

La Commission européenne a dévoilé jeudi sa proposition législative pour imposer au secteur technologique un chargeur universel pour les smartphones et autre petit électronique multimédia portatif (tablettes, appareils photo, casques, haut-parleurs et consoles de jeux vidéo).

Le port USB Type-C deviendrait le port standard, et il serait obligatoire de proposer l’appareil et le chargeur séparément si le consommateur le souhaite, pour éviter qu’il n’accumule des chargeurs inutiles.

Finis les chargeurs incompatibles encombrant les tiroirs? La Commission européenne veut imposer un chargeur universel pour téléphones mobiles et autres appareils électroniques, au nom des droits des consommateurs et de l’environnement, un projet qui suscite l’opposition du géant américain Apple.

La réglementation proposée jeudi par l’exécutif européen, qui devra être approuvée par les eurodéputés et les Etats membres, vise à harmoniser les ports de chargement pour les smartphones, tablettes, appareils photo, casques audio, enceintes et consoles de jeu portatives… et pourrait menacer les câbles de connexion des iPhones du groupe californien.

Ce projet avait été lancé dès 2009 par la Commission et a fait l’objet en janvier 2020 d’une résolution du Parlement européen, mais il s’est jusqu’à présent heurté aux vives réticences de l’industrie, bien que le nombre de types de chargeurs existants se soit fortement réduit au fil des ans. D’une trentaine en 2009, ils sont passés à trois: le connecteur Micro USB qui a longtemps équipé la majorité des téléphones, l’USB-C, une connexion plus récente, et le Lightning utilisé par Apple.

L’UE veut désormais imposer le port USB-C à l’ensemble des appareils électroniques, ce qui permettrait d’utiliser indifféremment n’importe quel chargeur, tandis que l’harmonisation des technologies de charge rapide garantira la même rapidité de chargement –évitant qu’elle soit bridée en cas d’utilisation avec un appareil d’une marque différente.

Logiquement, Bruxelles entend découpler la vente d’appareils électroniques et de chargeurs: “Une victoire pour les consommateurs et l’environnement (…) les Européens en ont assez des chargeurs incompatibles s’entassant dans leurs tiroirs”, a déclaré la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, citée dans un communiqué.

“Nous avons donné plein de temps à l’industrie pour trouver des solutions. Désormais, le temps est venu de légiférer”, a-t-elle insisté. “Il est temps de mettre fin à ce serpent de mer”, a ajouté le commissaire au Marché intérieur Thierry Breton devant la presse, espérant une entrée en vigueur du texte d’ici “quelques semestres”.

– “Étouffer l’innovation”-

Apple, qui fait valoir que sa technologie Lightning équipe plus d’un milliard d’appareils dans le monde, a aussitôt réitéré son opposition. “Cette réglementation étoufferait l’innovation au lieu de l’encourager et nuirait aux consommateurs en Europe et dans le monde”, a indiqué le groupe à l’AFP.

La firme à la pomme, qui estimait l’an dernier qu’une telle législation générerait “un volume sans précédent de déchets électroniques” en rendant obsolètes une partie des chargeurs en circulation, s’alarme de la transition de 24 mois proposée par Bruxelles, jugée précipitée, et du bouleversement de ses filières de recyclage actuelles.

La Commission rétorque que les consommateurs européens, qui dépensent environ 2,4 milliards d’euros par an pour des achats de chargeurs seuls, pourraient économiser au moins 250 millions d’euros annuellement, et que les déchets de chargeurs non utilisés, évalués à 11.000 tonnes par an, pourraient être réduits de presque 1.000 tonnes.

Les géants technologiques américains “jouent toujours le coup de l’innovation qu’on étrangle. Ce n’est pas une réglementation contre l’innovation ou contre qui ce soit, elle vise à rendre la vie des consommateurs européens plus facile”, a commenté Thierry Breton.

Bruxelles assure préserver la capacité d’innovation des entreprises – notamment sur les techniques de charge sans fil, précisément exclues du projet de directive car elles sont considérées encore largement en développement sur un marché actuellement “peu fragmenté”.

L’association ANEC, qui défend les droits des consommateurs sur les questions liées aux normes technologiques, a salué le projet de directive, tout en regrettant que les systèmes de chargement sans fil, en plein essor, ne soient pas concernés.

“Il est essentiel d’éviter une fragmentation sur ce créneau! Comme la législation prendra du temps pour être discutée et adoptée, il faudrait qu’elle couvre aussi la charge sans fil” afin de s’appliquer aux technologies en passe d’être majoritaires d’ici quelques années, plaide l’ANEC.

Des eurodéputés applaudissaient également: Róza Thun (PPE, droite), rapporteure sur ce dossier, a vanté “un immense bénéfice pour les consommateurs (…) qui verdira l’environnement et rendra la vie plus confortable”.

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