Et la 3D sans lunettes, c’est pour quand ?

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Les premiers clients des TV 3D n’auront pas le choix. Que ce soit chez Sony, Panasonic, Samsung ou LG, les lunettes actives sont incontournables. Sharp, lui annonce une technologie sans lunettes, mais réservée aux appareils portables. Sur grand écran, il faudra encore patienter… au moins pour le grand public.

Les premiers clients des TV 3D n’auront pas le choix. Que ce soit chez Sony, Panasonic, Samsung ou LG, les lunettes actives sont incontournables. Sharp, lui annonce une technologie sans lunettes, mais réservée aux appareils portables. Sur grand écran, il faudra encore patienter… au moins pour le grand public.

Les premiers téléviseurs 3D s’apprêtent à débarquer dans les grandes surfaces. Tous exigeront le port de lunettes conçues précisément pour profiter du relief. Pourtant, la 3D sans lunettes existe déjà. Le japonais Nintendo a d’ailleurs annoncé le lancement début 2011 d’une version de sa console portable DS équipée de cette solution. Mais pour des tailles d’écran plus importantes, elle reste encore confinée à des utilisations professionnelles car le coût et les volumes de données à gérer explosent. Esquisses d’un monde 3D sans lunettes.

Nintendo ouvre le bal

Les fabricants d’écrans voient aujourd’hui dans la 3D un excellent moyen de relancer un marché dont la croissance en valeur s’essouffle déjà. On le sait, désormais, la technologie 3D retenue par les industriels de l’électronique grand public nécessite le port de lunettes spécifiques. Sans elles, vouloir profiter du relief et des effets 3D s’avère tout simplement impossible. Dans ce contexte, l’information communiquée il y a quelques semaines par Nintendo apparaît d’autant plus originale. Le fabricant japonais a en effet annoncé qu’il comptait lancer d’ici au 31 mars 2011 une version 3D sans lunettes de sa console portable DS. La “3DS” utiliserait à cette occasion un petit afficheur de 4 pouces environ conçu par Sharp pour les téléphones mobiles et autres appareils portables.

De là à imaginer que l’on puisse un jour décliner cette technologie pour l’appliquer aux écrans de TV, il n’y a qu’un pas. Pouvoir s’immerger chez soi dans des images en 3D tout en s’affranchissant de ces fameuses lunettes est évidemment séduisant. Sur le blog Electron Libre, François Bliss de la Boissière, enfonce le clou : “Déjà, la 3DS se passe de lunettes pour fonctionner et montre la nécessaire évolution du relief qui ne sera définitivement et globalement adopté que lorsque les utilisateurs pourront le regarder sans avoir recours à des lunettes, quelle que soit la taille des écrans. D’ici 5 ans, estiment les experts”.

Des technologies bridées par les tailles d’écrans

Reste “juste” à régler quelques problèmes et contraintes techniques. Car dans sa forme actuelle, la 3D sans lunettes appelée également auto-stéréoscopie ne se prête guère à une utilisation dans un cadre familial. Deux technologies autorisent l’auto-stéréoscopie : le premier se fonde sur un réseau lenticulaire – technique adoptée pour visualiser notamment des images en relief sur les cartes postales -, le second sur un système à barrière de parallaxe. C’est celui qui aurait été retenu par Sharp, et donc Nintendo. Ces deux technologies, appliquées à la TV, nécessitent un positionnement précis du spectateur par rapport à l’écran.

“Ces deux systèmes restituent à l’écran cinq à huit points de vue, avec un champ de vision 3D extrêmement limité pour chacun d’entre eux. Entre ces points s’intercalent des zones d’occultation et de non-confort. Ces technologies se prêtent donc très bien à la console ou au téléphone portable, qui sont des équipements individuels. Mais si l’on parle cinéma ou TV, il s’agit d’un usage collectif. Les contraintes deviennent alors importantes”, pointe Laurent Roger, président et fondateur de Cinéact, entreprise spécialisée dans les projets 3D pour annonceurs, régies publicitaires ou exploitants de salles de cinéma. Pour mémoire, les écrans TV 3D actuellement commercialisés avec des lunettes actives permettent à chaque oeil de recevoir la bonne image, et a fortiori à chaque spectateur de recevoir la bonne information, quelle que soit sa position face à l’écran.

Autre inconvénient de l’auto-stéréoscopie : plus l’écran est grand, plus on doit avoir du recul : “Il faut être à peu près à 4 mètres de distance de l’écran pour profiter du relief”, mentionne pour sa part Laurent Mahy, directeur technique de CLCorporation, intégrateur de technologies 3D, interactives et multimédias.

Des coûts et des volumes de données difficiles à gérer

Il y a donc encore du pain sur la planche pour les ingénieurs et leurs équipes de R&D. En Bretagne, le pôle de compétitivité Images et Réseaux fédère nombre d’acteurs à l’instar d’Orange Labs, réputé pour son savoir-faire dans le domaine de la 3D, avec ou sans lunettes. Mais, sollicité par lexpansion.com, France Telecom n’a pas voulu s’exprimer sur ce sujet. “Pour l’heure, il s’agit de technologies professionnelles, essentiellement utilisées dans le cadre de présentation de produits pour les entreprises, ou pour des salons”, poursuit Laurent Mahy. C’est le cas d’Alioscopy, entreprise française spécialisée dans les technologies d’écrans 3D auto-stéréoscopiques, et dont les applications touchent la communication, l’évènementiel ou la muséographie.

En amont, la production d’images en vue d’une diffusion auto-stéréoscopique génère des contraintes supplémentaires, en termes de coûts et de volumes d’informations à traiter. De deux choses l’une : soit les images sont créées de façon native en 3D, et il faut donc filmer avec plusieurs caméras pour obtenir les différents points de vue, soit ce travail doit être réalisé en post-production à l’aide d’algorithmes. Dans les deux cas, les flux d’images sont 6 à 8 fois plus nombreux. “Depuis un an, Alioscopy arrive à produire des images en ‘Full HD’, mais c’est extrêmement lourd à gérer”, estime Laurent Roger. “Par ailleurs, la diffusion de contenus TV 3D par Internet nécessiterait la mise en place de techniques de compression élevée qui dégraderait inévitablement la qualité de l’image”.

Un sentiment plutôt partagé par Erwan Mahé, co-gérant d’Artefacto, entreprise spécialisée dans la simulation 3D et l’animation virtuelle : “On ne pourra pas faire de HD en auto-stéréoscopie car il y aura une perte de résolution. Au-delà d’une taille d’écran supérieure à 40 pouces, la qualité diminue”, juge-t-il.

L’holographie, technologie de rupture ?

Pour ces experts, cinq, dix, voire quinze ans seront encore nécessaires avant que l’on puisse s’affranchir des lunettes pour regarder des contenus 3D sur sa télé. À moins qu’une technologie de rupture, un nouveau système de projection radicalement différent de ce qui existe aujourd’hui surgisse et mette tout le monde d’accord. Certains parient déjà sur l’holographie, un procédé de photographie en relief. Mais pour Erwan Mahé “on en est encore loin. Les expériences qui sont réalisées restent du domaine de l’artisanal”, conclut-il.

Trends.be, L’Expansion.com

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