Apple va-t-il tuer la carte SIM ?

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La nouvelle Apple Watch sera équipée d’une SIM virtuelle. Un premier pas vers un abandon de la carte SIM dans les smartphones ? Les opérateurs doivent s’y préparer. Et ça ne leur fait pas forcément plaisir.

Cette annonce d’Apple pourrait bien bousculer l’écosystème des télécoms dans les années à venir. Lors de la présentation des derniers produits de la marque à la pomme, le CEO Tim Cook a dévoilé la nouvelle Apple Watch. Particularité de cette montre connectée : elle pourra se relier à l’Internet mobile indépendamment de l’iPhone, grâce à une carte SIM intégrée. Aussi appelée eSIM (embedded SIM), cette carte ” virtuelle ” remplace la traditionnelle carte SIM escamotable que l’on insère habituellement dans nos appareils connectés.

Pour le consommateur, ce système offre la possibilité de changer d’opérateur mobile quand bon lui semble, sans devoir commander une nouvelle carte et remplacer sa carte existante. Une simple activation chez son nouvel opérateur suffit. Malgré les avantages évidents pour le consommateur, l’eSIM, qui existe depuis plusieurs années, ne s’est pas répandue à grande échelle sur le marché des télécoms. Et pour cause : elle n’a jamais suscité un grand enthousiasme du côté des opérateurs.

Le risque, pour eux, est de perdre la main sur la relation client, au profit des fabricants de terminaux. Si Apple vend ses appareils équipés d’une SIM virtuelle, il court-circuite en quelque sorte les opérateurs, qui sont généralement le premier point de contact des consommateurs. Avec l’eSIM, le client n’a plus besoin de se rendre en boutique, et peut passer à la concurrence d’un simple clic. ” On supprime la carte SIM, et ça redistribue les cartes, commente Vincent Fosty, associé TMT chez Deloitte. L’équilibre acquis depuis 25 ans dans le secteur de la téléphonie sera bousculé. La carte SIM, c’est le sésame du mobile. Si elle est soudée au smartphone, le processus d’activation est transféré au fabricant du terminal. Quant aux vendeurs de cartes, ils continueront à en fabriquer, mais ils profiteront moins du marché de renouvellement. ” Tous ces acteurs se tenant par la barbichette, rien ou presque n’a bougé.

Près d’un milliard d’eSIM en 2021

Jusqu’à présent, l’eSIM s’est cantonnée à des appareils ” périphériques ” comme les tablettes (certains iPad Pro) ou les montres connectées (Samsung Gear, Apple Watch). La véritable révolution serait une intégration des cartes virtuelles dans les smartphones, qui constituent le vrai marché de masse. D’après le consultant IHS, le mouvement pourrait être lancé en 2019 par les trois géants du smartphone : Samsung, Apple et Huawei. Le nombre d’eSIM vendues dans le monde passerait de 108 millions en 2016 à 986 millions en 2021.

Du côté des opérateurs belges, on observe le mouvement, mais on n’y participe pas encore. Aux dernières nouvelles, l’Apple Watch équipée de l’eSIM n’est pas disponible sur notre marché, au contraire de la France. Ni Orange Belgique ni Telenet n’ont souhaité faire de commentaire au sujet de l’eSIM.

Chez Proximus, on suit avec intérêt cette technologie, qui s’installe à des vitesses différentes en fonction des segments de marché. ” Sur le marché corporate, les développements sont très avancés. C’est le cas dans le domaine des voitures connectées, où les constructeurs automobiles sont en train de nouer des partenariats avec les opérateurs “, explique Vincent Vanderstraeten, head of device management chez Proximus.

Les choses vont par contre moins vite sur le marché des consommateurs. Proximus évoque des discussions en cours sur les normes de standardisation visant à assurer l’activation des eSIM. Certains points s’avèrent délicats : ” Techniquement, avec l’eSIM, il serait possible de prendre un abonnement différent pour les communications vocales et pour l’Internet mobile. Les opérateurs sont réticents “, souligne Vincent Vanderstraeten. Le numéro un belge de la téléphonie mobile accueille cependant favorablement l’arrivée de la carte SIM virtuelle : ” L’eSIM améliorera l’expérience client, dans le sens où ses démarches seront facilitées, ajoute le responsable. Mais ce nouveau système ne réinvente pas non plus la roue : on peut déjà changer de plan tarifaire sur le Web. Nous ne craignons donc pas une plus grande volatilité des clients “. Verdict en 2019.

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