“Une étoile au Michelin fait augmenter les prix de 27%”

© Epa

Le guide gastronomique français le plus vendu au monde vient de publier sa 101e édition. Olivier Gergaud, maître de conférences en économie à l’université de Reims et membre de la société de gastronomie quantitative, décrypte l’impact économique de l’attribution des étoiles Michelin.

Pour un restaurant, combien rapporte l’obtention d’une étoile au guide Michelin ?

Le guide Michelin fait la pluie et le beau temps sur les restaurants parisiens. L’étude que j’ai réalisée en 2007 avec Linett Montano Guzman et Vincent Verardi, montre que, quand un restaurant entre dans la sélection du guide Michelin, la hausse de la fréquentation qui en découle tire ses prix à la hausse de 9%.

Ensuite, les prix augmentent de 18% , soit une hausse totale des prix de 27% sur un an – et ce dans tous les restaurants étoilés, quel que soit le nombre d’étoiles reçues. De même, lorsqu’un restaurant est rétrogradé, la demande faiblit, et les prix s’ajustent à la baisse.

Cet “effet Michelin” peut aussi s’observer à New York. Lors du lancement du Guide en 2006, qui était en concurrence avec le célèbre guide américain Zagat, il n’y avait eu aucun impact. Mais dès 2008, on a observé une augmentation moyenne des prix de 2% dans les restaurants listés par le Guide rouge. Chez les restaurants ayant obtenu une étoile, les prix ont augmenté de 3%, puis de 4,5% chez ceux qui en avaient obtenu deux, et de 12,5% chez les trois étoiles.

Les étoiles décernées par le Michelin reflètent-elles uniquement la qualité des assiettes?

Non. Les restaurants de luxe obtiennent des étoiles beaucoup plus facilement que les autres, alors que le guide Michelin affirme que seul le contenu de l’assiette compte. Dans le guide, le cadre des restaurants est mesuré par l’attribution de fourchettes noires et rouges. Une fourchette rouge vaut plus qu’une fourchette noire, mais moins que deux fourchettes noires. De sorte que les établissements sont classés sur une échelle de onze niveaux, qui varie de “aucune fourchette” à “cinq fourchettes rouges”. Nous avons montré que pour le restaurant médian – celui qui a reçu plus d’étoiles que 50% des restaurants listés, mais moins que 50% des établissements distingués – le fait d’obtenir une fourchette supplémentaire lui donnait 17% de chance de plus d’obtenir une étoile, 11% d’en obtenir deux et de 1% de rejoindre le camp très sélectif de ceux qui en ont trois. Cela met hors jeu de nombreux restaurants extrêmement bons, mais qui n’investissent pas sur le cadre.

Trop élitiste, le guide Michelin ?

Sans doute. Le Michelin se préoccupe beaucoup moins des consommateurs que le Zagat, fondé sur l’appréciation de ces derniers. Près de 21% des restaurants répertoriés dans le guide Zagat ne sont pas listés par le guide Michelin. La cuisine ethnique a beaucoup moins de chance de recevoir une étoile, de même que les restaurants situés à l’Est de Paris. Heureusement, Michelin a bien réagi en lançant la catégorie “Bib Gourmands”, moins élitiste, qui classe plus de 500 établissements.

Propos recueillis par Violette Robinet

Trends.be, L’Expansion.com

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content