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Pourquoi les multinationales ont raison de pratiquer l’optimisation fiscale

Des politiciens, des syndicalistes, et aussi quelques journalistes ont tendance, depuis quelque temps, à se prendre pour des contrôleurs fiscaux. Une de leurs cibles favorites, ce sont les multinationales, accusées de payer trop peu d’impôts dans les pays où elles travaillent parce qu’une part importante de leurs recettes serait “détournée” vers des pays à fiscalité accommodante, voire de véritables paradis fiscaux.

Les commentaires sont souvent peu explicites quant à la nature des sommes qui se retrouveraient ainsi exclues de la base imposable de certains pays. On admet néanmoins en général qu’il ne s’agit pas de véritable fraude fiscale, mais seulement de méthodes légales répondant à un choix de la voie la moins imposée, et les critiques se font alors moralisatrices.

Les autorités européennes envisagent d’introduire une règle, bien floue, suivant laquelle les revenus doivent être taxés dans les pays où les activités sont exercées. Sans doute ne se rend-on pas compte que ce principe, apparemment logique, ne changerait pratiquement rien à la répartition de l’impôt entre les pays, et ne modifierait pas grand-chose aux pratiques que l’on dénonce. Très souvent, en effet, les sommes payées par des sociétés opérationnelles dans des pays à forte taxation à des entités du même groupe établies dans des pays à moindre taxation correspondent à des redevances pour des droits intellectuels, ou pour un type d’organisation, qui constituent la justification de l’essentiel du profit réalisé.

Si Apple ne possède aucune infrastructure dans un pays, n’y a ni site de production, ni bureau d’études, ni magasin, et que les clients de ce pays, comme par exemple la Belgique, achètent les produits sur un site internet se trouvant en Irlande, on ne voit pas quel revenu peut être taxable en Belgique, tout simplement parce qu’il n’y a pas d’activité. Tant qu’il en sera ainsi, ce groupe n’aura aucune raison de payer un impôt sur le revenu dans un pays où il ne fait rien, même s’il y a de nombreux consommateurs.

Pourquoi les multinationales ont raison de pratiquer l’optimisation fiscale

Ce qui vaut pour les produits vaut, même si cela paraît être plus surprenant, pour les services. Howard Behar a ainsi publié un ouvrage exemplaire montrant que, si Starbucks a du succès, “ce n’est pas pour le café”. Il justifie que l’essentiel du profit de cette entreprise trouve son origine dans l’utilisation de sa marque, dans le concept de ses points de vente et de son organisation. Si vous vendez au même endroit le même café sans la marque et le concept Starbucks, vous ne ferez qu’une infime partie de ses bénéfices. Tous ces éléments ont été définis dans des pays autres que ceux où le café est vendu et la part du profit qui résulte de l’activité de vente proprement dite ou de la manière dont les employés appliquent des règles conçues ailleurs est tout à fait marginale. Si des firmes de ce type payent peu d’impôts dans les pays où elles prestent leurs services aux consommateurs, c’est parce que leur véritable richesse, et le rendement qu’elle produit, ce sont des droits intellectuels ou des droits dérivés qui, pour reprendre l’exemple de la Belgique, ne résultent d’aucune activité locale.

Dire que l’on taxe à l’endroit de l’activité suivant un principe de réalité économique, cela conduit à reconnaître le modèle choisi par ces multinationales, précisément parce que l’essentiel de la valeur, de l’activité réellement productive, résulte d’actifs incorporels et non du travail exercé localement.

L’on peut difficilement reprocher aux dirigeants de multinationales, pourvu que, ce faisant, ils respectent la loi, d’installer leurs activités les plus productives dans les pays qui taxent le moins. Faire le contraire, ce serait un acte de mauvaise gestion puisqu’ils engageraient leur entreprise à supporter des coûts non productifs pour elle, les impôts, alors qu’ils sont évitables dans le respect de la loi. S’ils choisissent de localiser de tels actifs dans des pays fiscalement attrayants, c’est parce que ceux-ci ont fait le bon choix d’attirer chez eux les activités innovantes. Les pays à forte taxation qui n’ont pas vu venir l’importance de l’innovation dans l’économie de l’avenir feraient mieux de remettre en cause leur propre système de taxation plutôt que de critiquer les entreprises qui choisissent librement de créer des richesses ailleurs.

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