Le télétravail peut-il être taxé ?

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Lorsque le travailleur ou le dirigeant d’entreprise travaille à domicile sur son propre ordinateur, grâce à sa connexion internet, son employeur ou son entreprise peut lui allouer une indemnité. Cette indemnité est-elle imposable ou non ? Une circulaire récente de l’administration fiscale répond à la question.

Le télétravail a le vent en poupe. Les travailleurs et dirigeants d’entreprise qui travaillent à domicile pendant les heures de bureau normales sont de plus en plus nombreux. Parfois sur leur propre ordinateur, grâce à leur connexion et à leur abonnement internet personnels. Dans ce cas, l’employeur ou l’entreprise intervient dans les frais liés à l’utilisation de l’ordinateur et de la connexion internet privés. Qu’en est-il fiscalement parlant ? Réponse dans une récente circulaire du fisc (n° Ci. RH. 241/616.975 du 16 janvier 2014). Télétravail et technologies de l’information Voici comment le fisc définit le télétravail dans sa circulaire : “toute forme d’organisation et/ou de réalisation de travail, utilisant les technologies de l’information, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière ou occasionnelle”. La circulaire du fisc ne concerne pas :

– les travailleurs/dirigeants d’entreprise qui travaillent régulièrement ou occasionnellement à la maison en dehors des heures normales de travail (le soir ou le week-end par exemple) ;

– les travailleurs dont la mobilité fait partie intégrante de la fonction (comme les délégués commerciaux) ;

– le travail réalisé dans un bureau satellite de l’employeur ;

– le travail exécuté chez un client, un fournisseur, sur un chantier, etc.

Le fisc définit également les termes “connexion internet”, “abonnement internet” et “ordinateur”. Ainsi, par “connexion internet”, le fisc entend tous les dispositifs liés au branchement du PC sur Internet, quel que soit le système utilisé (câble téléphonique, ADSL, câble TV, etc.). On entend par “abonnement internet” la fourniture d’un provider ou fournisseur d’accès au réseau internet (abonnements ADSL, télédistribution, etc.). On entend par “ordinateur” tous les types d’installations informatiques, à savoir tant les desktops, que les laptops et les tablettes, ainsi que les périphériques et logiciels nécessaires à l’exercice du télétravail.

L’intervention vue par le fisc L’employeur ou la société paie généralement une intervention à son travailleur ou à son dirigeant en échange de l’utilisation professionnelle par celui-ci de son ordinateur et de sa connexion internet. Le fisc précise dans la circulaire que cette intervention est considérée comme un “remboursement de dépenses propres à l’employeur/la société non imposable”. Le travailleur et le dirigeant d’entreprise ne seront donc pas imposés sur cette intervention, à condition toutefois que l’employeur/ la société puisse apporter la double preuve que cette indemnité :

– soit destinée à couvrir des frais “propres” à l’employeur ou à la société ;

– ait effectivement été consacrée à de tels frais.

Lorsque le travailleur ou le dirigeant d’entreprise utilise réellement Internet dans le cadre du télétravail, le fisc ne demandera aucune justification lorsque le montant de l’intervention de l’employeur est fixé à un forfait de 20 euros par mois. Si le montant mensuel alloué dépasse 20 euros et l’employeur ou la société ne peut justifier ce montant supérieur, la partie imposable de l’indemnité, à savoir la quotité de l’indemnité excédant les 20 euros, est considérée comme un revenu professionnel imposable perçu par le travailleur ou le dirigeant d’entreprise et à ce titre, soumise au précompte professionnel.

Le travailleur ou le dirigeant d’entreprise peut en outre percevoir de l’employeur ou de la société une indemnité pour l’utilisation de son ordinateur personnel. Dans ce cas, une indemnité non imposable de 20 euros peut lui être allouée. Ce coût est également propre à l’employeur.

Il convient de faire une distinction si le matériel informatique est mis gratuitement à la disposition du travailleur ou du dirigeant d’entreprise par l’employeur ou la société. Dans ce cas, le travailleur ou le dirigeant n’est pas propriétaire du matériel, ni titulaire de l’abonnement internet, ni redevable des factures internet. Si ce matériel peut également être utilisé à des fins personnelles par le travailleur ou le dirigeant, le fisc considère qu’il s’agit d’un avantage imposable de toute nature. Cet avantage — imposé à 50 % maximum — est fixé forfaitairement à 180 euros par an (pour le PC) et 60 euros par an (pour la connexion et l’abonnement internet). Si l’installation informatique mise à disposition est utilisée par le télétravailleur à des fins professionnelles exclusivement, aucun avantage de toute nature n’est imposable dans son chef à condition que soient respectées les conditions suivantes :

– l’utilisation privée par le travailleur ou le dirigeant de l’installation informatique mise à sa disposition est formellement interdite sur la base de dispositions réglementaires ou contractuelles écrites ;

– le travailleur ou le dirigeant s’engage par écrit à respecter cette interdiction d’utilisation privée ;

– l’employeur ou la société prend les dispositions techniques nécessaires — un pare-feu par exemple — pour limiter au maximum l’utilisation de l’installation informatique à des fins privées.

Quelques exemples Le fisc cite quelques exemples dans sa circulaire.

– Un travailleur effectue du télétravail tous les vendredis du mois de mars et utilise dans ce cadre son propre ordinateur et son propre abonnement internet. Pour le mois de mars, son employeur l’indemnise forfaitairement à concurrence de 40 euros — 20 euros pour l’ordinateur et 20 euros pour Internet. Dans ce cas, l’administration fiscale considère sans plus cette indemnité comme un remboursement de dépenses propres à l’employeur non imposable.

– Mêmes données que dans l’exemple ci-dessus mais l’employeur octroie une indemnité forfaitaire de 50 euros par mois pour l’ordinateur et Internet. A défaut de justificatifs, l’administration considère les 10 euros excédentaires comme une rémunération imposable.

– Un travailleur télétravaille tous les vendredis du mois de mars et utilise dans ce cadre un ordinateur et un abonnement internet mis à sa disposition par son employeur. S’il n’utilise pas l’installation à des fins privées, il n’est pas imposé sur un avantage de toute nature. Par contre, s’il l’utilise également à des fins privées, il est censé percevoir pour le mois de mars un avantage de ((180 + 60) x 1/12) = 20 euros sur lequel il paiera maximum 50 % de précompte professionnel.

– Un travailleur télétravaille tous les vendredis du mois de mars et utilise dans ce cadre son propre abonnement internet mais l’employeur met un ordinateur à sa disposition. Le télétravailleur n’utilise pas l’ordinateur à des fins personnelles. L’employeur lui alloue pour le mois de mars un forfait de 20 euros pour l’abonnement internet. Cette indemnité constitue un remboursement de dépenses propres à l’employeur non imposable. Aucun avantage de toute nature ne doit être déclaré pour l’utilisation de l’ordinateur.

– Mêmes données que l’exemple ci-dessus mais le télétravailleur utilise l’ordinateur à des fins personnelles également. L’employeur alloue pour l’abonnement internet une indemnité forfaitaire de 20 euros. Cette indemnité est considérée sans plus comme un remboursement des dépenses propres à l’employeur non imposable. Pour ce qui est de l’utilisation privée de l’ordinateur, il sera toutefois imposé sur un avantage de toute nature évalué à 180 euros x 1/12 = 15 euros.

JOHAN STEENACKERS

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