Le boom des webinaires: une alternative numérique qui prend tout son sens

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Avec le confinement, les séminaires, formations et conférences en présentiel ont disparu de la circulation. Les webinaires ont pris le pouvoir.

Cédric Alter est avocat associé au cabinet Janson. Habitué à intervenir dans des conférences sur ses matières de prédilection (il est spécialisé en droit de l’insolvabilité), il se réoriente actuellement vers des alternatives en ligne. Et plus précisément vers les webinaires. L’avocat a eu l’occasion de tester cette nouvelle formule de séminaire ” covid proof “ mise en place par des éditeurs juridiques . ” Il y a du pour et du contre, avance Cédric Alter. Un webinaire dure environ une heure et demie : c’est un gain de temps intéressant par rapport aux journées ou demi-journées de séminaire qui sont généralement la norme en présentiel. Par contre, il faut respecter une certaine discipline pour rester concentrer sur le webinaire et ne pas faire autre chose en même temps. On perd aussi l’aspect essentiel du networking. Mais je constate que la formule est assez fluide, j’ai reçu des feed-back positifs. ”

Confrontés aux mesures de confinement, les organisateurs de séminaires font temporairement une croix sur leurs événements en présentiel pour se focaliser sur les webinaires. Certains avaient déjà ce type d’offre dans leur portefeuille. D’autres défrichent un terrain jusque-là inconnu. C’est le cas de l’éditeur juridique Anthemis : ” Toutes nos formations ont été annulées. En réaction, nous avons décidé de nous lancer dans cette nouvelle formule d’ e-learning. Et ça fonctionne plutôt bien “, témoigne Anne Eloy, directrice éditoriale chez Anthemis.

Seuil de rentabilité

Les webinaires les plus populaires organisés par l’éditeur juridique atteignent une audience d’une centaine de personnes. ” Pour un marché de niche comme le nôtre, c’est une belle réussite “, souligne Anne Eloy. Un séminaire juridique en présentiel qui rassemble une centaine de personnes est rentable pour l’éditeur. Transposé sur Internet, ce type d’événement atteint même plus rapidement le seuil de rentabilité. ” Les frais fixes d’un webinaire ne sont pas énormes “, confirme Anne Eloy.

Les frais liés à la plateforme numérique sont largement compensés par les économies réalisées sur la location de la salle, le catering et les frais de déplacement des orateurs. Cela permet à l’éditeur de proposer des tarifs moins élevés pour son alternative en ligne. Anthemis facture ses webinaires autour d’une centaine d’euros par participant. ” C’est proche du tarif horaire d’un avocat ou d’un consultant “, explique Anne Eloy. L’éditeur propose ses séances en direct et teste actuellement une formule de webinaire en différé qui donne accès à tout le contenu, sauf bien sûr la possibilité d’interagir avec les orateurs.

Anne Eloy (Anthemis):
Anne Eloy (Anthemis): “Les frais fixes d’un webinaire ne sont pas énormes.”© PG

Un outil de communication

Si les webinaires semblent être une formule rentable pour Anthemis, ce n’est pas l’unique raison qui pousse l’entreprise à proposer ce type d’événement en ligne. Dans le contexte du confinement, les contacts ont tendance à se distendre. Il faut donc réinventer les moyens de communication avec ses clients et partenaires : ” Avec cette formule, notre idée est de garder le lien entre nos auteurs et nos clients. Nous voulons être présents sur ce marché qui se transforme “, atteste Anne Eloy. Si la directrice espère relancer ses séminaires en présentiel, elle compte aussi à l’avenir conserver la formule des webinaires afin de construire une offre complémentaire alliant événements ” physiques ” et numériques.

Proposer une combinaison de produits, c’est aussi la stratégie poursuivie par Quality Training, un opérateur de formations à destination des entreprises spécialisé dans des secteurs comme la bureautique, le graphisme ou la communication digitale. ” Le webinaire a toujours fait partie de notre offre. On en organise depuis des années “, souligne Marie Vandenberghe, managing director de Quality Training. Pour cette PME bruxelloise, le webinaire est vu comme un complément à une formation ” classique ” organisée au sein d’une entreprise cliente. Vu les circonstances, l’offre de webinaires a été élargie.

Marie Vandenberghe (QualitY Training):
Marie Vandenberghe (QualitY Training): “Les webinaires sont un produit d’appel.”© PG

Les webinaires organisés par l’entreprise ont toujours été proposés gratuitement et ils le restent en ces temps de confinement. ” C’est un produit d’appel “, explique la directrice. Quality Training compte sur d’autres formules en ligne pour faire face à la diminution drastique des sessions organisées en présentiel. Si les webinaires sont utilisés comm séances d’information générales, la PME développe aussi des systèmes de classes virtuelles interactives animées par un formateur. Cette formule payante, tout comme les systèmes classiques d’ e- learning, sont des alternatives toutes trouvées en cette période de restriction des contacts sociaux et de télétravail forcé. ” Nous organisons plusieurs centaines de journées de formation par mois. Nous avons dû réagir très vite et réorienter notre portfolio vers des formules en ligne. Les tarifs sont les mêmes qu’en présentiel mais nous gagnons du temps et économisons des frais de transport. Nous tirons bien notre épingle du jeu “, se réjouit la directrice générale de Quality Training.

Un pendant logique au télétravail

La directrice prédit que son secteur évoluera vers une plus forte utilisation des formules ” distancielles “. Même si le déconfinement se poursuit et permet de retrouver progressivement des interactions sur le lieu de travail, Marie Vandenberghe est persuadée que le travail à distance va s’implanter durablement. Or, les formations à distance sont un pendant logique du télétravail.

Tout ne pourra cependant pas s’organiser numériquement : ” Pour des formations en bureautique, c’est tout à fait adapté. Mais pour d’autres thématiques, un contact plus proche est nécessaire. Certaines informations passent aussi par le non verbal, ce qui reste difficile à transmettre via des plateformes comme Zoom “, observe Marie Vandenberghe.

La société Now.be est confrontée aux mêmes problématiques. La PME namuroise organise des formations à destination de grandes entreprises belges et françaises dans des domaines comme le management, la communication ou les relations clients. ” Notre coeur de métier, ce sont les dispositifs de formation. La situation actuelle nous pousse à transformer nos méthodes d’apprentissage. Chaque formation doit avoir de l’impact, être interactive, pour s’assurer que les participants retiennent ce dont ils ont besoin “, pointe Laure Martin, responsable développement et projets chez Now.be.

L’entreprise a, elle aussi, fait migrer ses formules de séminaires vers les webinaires et ses modules de formation vers des classes virtuelles. ” Nous avons transformé 50 % de notre offre “, indique Laure Martin. Si les montants facturés pour ces formules numériques sont légèrement inférieurs à ceux de leurs équivalents ” physiques “, cette baisse est compensée par des économies sur le transport et l’hébergement des formateurs. ” Financièrement, cela fait peu de différence “, avance Laure Martin, qui s’attend à un impact à long terme sur le secteur de la formation. ” Un grand groupe cosmétique m’a confié que 50 % de ses séminaires étaient tout simplement supprimés, notamment pour des raisons écologiques, pointe Laure Martin. Nos clients auront toujours besoin de formules d’apprentissage, mais elles se construiront avec de nouvelles contraintes. ”

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