Le bon job vous fera vivre plus longtemps

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Marc Buelens Professeur

“Les personnes hautement qualifiées occupent des postes plus sains et moins stressants.” Professeur émérite à la Vlerick Business School, Marc Buelens examine les facteurs socioéconomiques et la nature des emplois pour expliquer l’espérance de vie plus longue des profils hautement qualifiés.

Les personnes ayant un niveau d’éducation élevé vivent jusqu’à dix ans de plus que les travailleurs peu qualifiés. Aujourd’hui, nous nous penchons sur les facteurs socioéconomiques et la nature des emplois pour trouver une explication.

Le bon job augmente l’espérance de vie

Les personnes hautement qualifiées occupent des postes plus sains et moins stressants. Le stress chronique a des effets néfastes sur la santé, notamment en raison de la sécrétion de cortisol. Celui qui a peu d’emprise sur son job est davantage stressé. La formation professionnelle est l’un des moyens les plus efficaces de lutter contre le stress. Il existe ainsi un lien de causalité quasi direct entre le niveau d’instruction et la santé.

Par ailleurs, de nombreuses addictions malsaines ne servent qu’à compenser une vie triste et stressante. Le gratin des scientifiques britanniques vit (en moyenne) très longtemps. Il est visiblement agréable de se consacrer à la recherche. Le verre de vin rouge devient alors un plaisir à l’état pur et ne compense pas une existence insatisfaisante.

Les personnes hautement qualifiées occupent des postes plus sains et moins stressants

Lorsqu’un mur s’effondre, l’ouvrier est plus susceptible de décéder que l’ingénieur. Et en cas d’accident de camion, le chauffeur est grièvement blessé tandis que le propriétaire de la société de transport – probablement plus instruit – en sort indemne.

Une autre explication est la classe socioéconomique. Les aliments sains sont moins accessibles et généralement bien plus chers que la junk food, dont les calories sont néfastes pour notre santé. Chaque classe sociale se voit inculquer un certain type de “bonnes manières”, mais aussi des habitudes alimentaires et tout un mode de vie. Il est normal de manger sainement pour une personne qui y est habituée dès son plus jeune âge. La classe socioéconomique la plus élevée est en meilleure santé et roule dans des voitures plus sûres. Elle est en quelque sorte moins susceptible de marcher accidentellement sur un clou rouillé que la classe la plus défavorisée. Les terrains de golf sont rarement touchés par l’insalubrité…

Il est normal de manger sainement pour une personne qui y est habituée dès son plus jeune âge

Étant donné que les personnes hautement qualifiées ont en moyenne déjà gagné à la loterie des gènes, on peut, dans une société soucieuse de l’équité, plaider en faveur d’une protection supplémentaire des populations moins instruites. Toutes les campagnes en matière d’ordre et de propreté profitent avant tout aux personnes moins qualifiées. Les actions relatives à la qualité et à la prévention des accidents rétablissent quelque peu l’équilibre.

On peut blâmer les employeurs qui ne fournissent pas des conditions de travail décentes à leurs travailleurs, mais les syndicats ont fait preuve, pendant des décennies, de passivité et d’étroitesse d’esprit concernant la “gestion intégrale de la qualité”.

Cependant, bon nombre des principes du Six Sigma et même du Lean Management constituent un merveilleux moyen d’éliminer les disparités inacceptables en matière de santé. Paradoxalement, les progrès de la robotisation réduiront également ces différences. Chaque travailleur sera, plus que jamais, un travailleur du savoir. Si vous décrochez un nouvel emploi, il y a de fortes chances qu’il soit plus sain.

On peut blâmer les employeurs qui ne fournissent pas des conditions de travail décentes à leurs travailleurs, mais les syndicats ont fait preuve de passivité pendant des décennies

Un facteur qui, à mon avis, est souvent sous-estimé est que le personnel des soins de santé appartient généralement aux groupes les plus favorisés en matière d’éducation. Les populations instruites comprendront donc mieux le jargon – intellectualisé – des médecins par exemple. Elles sont par définition mieux formées pour poser des questions pertinentes ou établir une distinction entre des conseils sérieux et des propos futiles. Elles osent également interrompre un médecin plus rapidement ou demander un second avis. Et la probabilité qu’elles rencontrent un expert dans un cercle informel, où l’on peut parler plus librement et plus longtemps de la santé, est bien entendu beaucoup plus grande si vous êtes avocat que docker.

L’employeur peut également apporter sa pierre à l’édifice. Une petite formation qui permettra au personnel médical d’une société de parler la langue du “client” ne nécessitera pas un gros investissement. Les connaissances acquises pourront ensuite être partagées en dehors de l’entreprise, car un écart de huit à dix ans entre l’espérance de vie des personnes hautement qualifiées et celle des groupes moins instruits, ce n’est pas rien.

Traduction : virginie·dupont·sprl

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