L’image de Renault est-elle en danger ?

© Reuters

Fausse affaire d’espionnage, délocalisations, un patron remis en cause… Renault multiplie les déboires. Au risque de ternir durablement son image ?

Une fausse affaire d’espionnage qui fait tache

Qui aurait cru qu’un groupe comme Renault puisse se retrouver au coeur d’une affaire aussi grotesque? L’affaire d’espionnage, qui a fait l’effet d’une bombe chez le constructeur automobile en janvier dernier, n’a en fait jamais existé. Aujourd’hui c’est Dominique Gevrey, le chef de la sécurité de Renault, qui est soupçonné d’avoir créé de toute pièce cette histoire rocambolesque. Mais en plus de s’être fait magistralement escroqué, le groupe n’a cessé d’accumuler les erreurs : il a licencié sans aucune preuve trois de ses cadres, il a fait une confiance aveugle en un homme (le fameux corbeau), dont l’existence même est fortement discutée, il a volontairement omis de prévenir les renseignements généraux, et pourrait même avoir fait espionner le responsable de Nissan au Japon pour éviter un nouveau scandale. Le tout sans aucune preuve. Difficile de savoir jusqu’où ira cette affaire : chaque jour de nouvelles révélations viennent entacher un peu plus le professionnalisme du groupe (voir ici les enregistrements de la réunion du 14 février dans le bureau du directeur juridique). Ce vendredi, c’est Michel Luc, un enquêteur privé qui facturait de fausses factures à Dominique Gevrey, qui affirme au Parisien que la direction elle-même avait mis en place ce dispositif….

Des délocalisations qui font scandale

Renault est régulièrement accusé de participer à la désindustrialisation de la France. Ce vendredi, Libération révèle une nouvelle délocalisation : le constructeur a prévu de confier à une usine roumaine la fabrication d’un de ses petits moteurs à essence basse consommation. Une décision qui selon le quotidien “devrait détruire 200 à 400 emplois” à l’usine de Douvrin. Renault a beau démentir ces suppressions de postes, la suspicion est là. L’année dernière déjà Carlos Ghosn avait été rappelé à l’ordre par le président de la République au sujet d’une éventuelle délocalisation de la Clio IV en Turquie. Contrairement à PSA, la production de Renault en France est en constante diminution. En 2010, elle est passée sous la barre des 20% (contre 37% pour PSA). Preuve que l’internationalisation de la production n’est pas la seule explication à ces courantes délocalisations… De fait la structure de gamme de Renault explique elle aussi le phénomène des délocalisations : depuis plusieurs années, le groupe a en effet décidé de se concentrer sur les petits modèles peu coûteux et à faibles marges.

Une marque qui se porte mal

Le groupe Renault peut au moins se rassurer sur un point. En 2010 ses résultats ont été excellents : 3,42 milliards de bénéfices, dont 2 proviennent de la vente de ses actifs dans Volvo AB. Mais là encore, les observateurs sont critiques. Car, l’essentiel de ces profits n’est pas à mettre sur le compte de la marque Renault, en perte de vitesse. Dans l’ensemble en effet, les vrais succès de Renault sont à chercher ailleurs, du côté de Nissan – détenue à 43% par Renault- ou de Dacia, la filiale low cost du groupe automobile (1/3 des ventes du groupe). “Le groupe connaît un vrai problème de positionnement. A part la Mégane, qui a bien fonctionné cette année, aucun de ses véhicules n’enthousiasme vraiment”, expliquait d’ailleurs récemment à L’Expansion.com François-Pierre Arth, analyste du secteur chez Groupama Asset Management. Depuis 2009 en effet, le renouvellement de la gamme déçoit. Hormis les lancements récents du 4×4 Duster de Dacia des berlines Fluence et Latitude et du petit coupé Wind, Renault s’est contenté d’un léger lifting sur plusieurs de ses modèles vedette.

Un PDG dans la tourmente

Il s’est fortement impliqué dans la fausse affaire d’espionnage. Beaucoup plus que son numéro 2 Patrick Pélata, qui s’était proposé de jouer les fusibles. Et pourtant Carlos Ghosn est toujours en poste. Il a certes fait ses excuses aux 3 cadres licenciés injustement. Mais le ton employé n’était pas à la hauteur de l’enjeu. Carlos Ghosn, est allé trop loin, estiment les syndicats, qui réclament sa tête. Une démission qui ne semble pas à l’ordre du jour – désormais le gouvernement joue plutôt l’apaisement – mais qui n’est pas à exclure. D’autant que depuis quelques temps, c’est la stratégie de Carlos Ghosn qui commence à être remise en cause. Le PDG a certes réussi à merveille le rapprochement avec Nissan, mais il est aujourd’hui accusé de délaisser la marque Renault. Chez certains actionnaires, on regretterait aussi que le PDG ait beaucoup plus misé sur la voiture électrique (4 milliards d’euros), que sur l’hybride, contrairement à ses concurrents.

L’Expansion.com

Une image de marque dégradée

Le dernier baromètre Posternak Ipsos de février 2011, qui mesure chaque trimestre l’image des grandes marques françaises, tous secteurs confondus, a classé Renault au 14e rang, loin derrière Peugeot (1er) et Citroën (2e). Entre octobre 2010 et février son “indice d’image” a baissé de 16 points, portant clairement les stigmates de l’affaire d’espionnage.

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