France Soir prêt à abandonner le papier pour internet

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Après des années de difficultés, le quotidien français France Soir envisage de passer au tout numérique. La décision pourrait être annoncée vendredi.

France Soir s’apprête à abandonner sa version papier pour tenter de survivre sur le web, plombé par ses pertes abyssales et un tirage en chute libre, lui qui comptait plus d’un million de lecteurs du temps de Pierre Lazareff dans les années 50 et 60.

La décision pourrait être annoncée vendredi lors d’un comité d’entreprise, a-t-on indiqué de source proche du dossier, alors que la direction refusait de confirmer ou démentir ce projet. L’abandon du papier devrait s’accompagner d’un plan social, a-t-on précisé de même source, un point sur lequel la direction s’est aussi refusée à tout commentaire.

Le quotidien historique, relancé à grand frais en 2010 après avoir été repris par le milliardaire russe Alexander Pougatchev, n’a pas atteint les objectifs ambitieux qu’affichait son repreneur. Avec moins de 70.000 exemplaires en moyenne contre 200.000 visés lors de sa reprise, le journal a accumulé les pertes avant d’être placé sous la protection de la justice jusqu’à la fin de l’année. Fin août, la direction du journal avait demandé à être placée sous sauvegarde pour six mois, mais le tribunal de commerce ne lui en avait accordé que quatre.

La date de passage au “tout digital” n’a pas encore été fixée et devra être avalisée dans un plan d’ensemble par le Tribunal de Commerce, selon la source proche du dossier.

Dans un communiqué, les salariés de France-Soir ont dit “refuser le scénario envisagé de la disparition du titre à brève échéance accompagnée d’un grand nombre de licenciements”, décidant en assemblée générale de ne pas faire paraître le titre mardi.

Depuis son rachat par le jeune Russe, fils d’un puissant oligarque, près de 100 millions d’euros ont été injectés sans pour autant faire décoller les ventes. Plusieurs directeurs de la rédaction se sont succédés. La directrice générale de longue date, Christine Vulvert, qui avait la confiance des actionnaires successifs, avait été sèchement remerciée en novembre 2010.

A l’époque, le nouveau propriétaire estimait à environ 2 millions d’euros les pertes mensuelles. “Je remets chaque mois de l’argent en compte courant”, confiait-t-il. En 2010, France-Soir a réalisé un chiffre d’affaires de 17 millions d’euros, essuyant une perte d’exploitation de 31 millions. L’année précédente, le chiffre d’affaires était de 9,6 millions avec des pertes de 12,9 millions.

Dans l’hypothèse d’un refus du Tribunal de Commerce d’avaliser ce “plan Pougatchev” de passage à internet, France Soir pourrait alors être placé en redressement judiciaire. Le choix du repreneur appartiendrait au Tribunal de Commerce qui pourrait aussi aller jusqu’à décider d’une liquidation. Plusieurs médias, dont le site d’information PressNews, indiquaient récemment que Christine Vulvert aurait déjà préparé un tour de table et serait, parmi d’autres, en embuscade pour la reprise du titre. Si France Soir passait au “100% web”, il serait le premier quotidien national en France a quitter le support papier, une démarche déjà constatée à l’étranger.

Aux Etats-Unis plus de 200 quotidiens, essentiellement régionaux, ont abandonné, pour des raisons économiques, le papier pour le web, selon une récente étude de l’ONU. En France, seul le quotidien économique La Tribune, lui aussi sous protection judiciaire, s’est jusqu’alors risqué à supprimer son édition “papier” pour n’être présent que sur le net, mais seulement pour deux semaines et au mois d’aout.

France Soir comptait dans les années 1960 quelque 400 journalistes, dont des signatures prestigieuses comme Joseph Kessel et Henri Amouroux. Il pulvérisa les ventes en novembre 1970, avec plus de 2,2 millions d’exemplaires pour la mort du général de Gaulle.

Trends.be avec L’Expansion.com

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