Enchères: les agents immobiliers concurrencent les notaires

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Lancée en 2010 par un agent anversois, l’initiative www.unefois-deuxfois.be s’était vu contester par les notaires, soucieux de préserver leur chasse gardée : les ventes publiques. Mais ces derniers ont perdu la bataille juridique.

Lancée en 2010 par un agent anversois, l’initiative www.unefois-deuxfois.be s’était vu contester par les notaires, soucieux de préserver leur chasse gardée : les ventes publiques. Mais ces derniers ont perdu la bataille juridique.

Le principe était pourtant simple : un agent immobilier, mandaté pour la vente d’un bien, invite les potentiels acquéreurs à participer à une mise aux enchères, sur internet. Il a pourtant débouché sur une question juridique complexe, propulsée de la première instance en Cassation, tout en passant par la case appel. C’est que l’organisation de ventes publiques est l’apanage des seuls notaires, qui entendaient bien conserver leurs prérogatives.

La cour de Cassation a tranché récemment, confirmant les arrêts et jugements précédents : la mise aux enchères, telle que pratiquée par le site litigieux, n’est pas une vente publique. “La Cour vient de confirmer définitivement la légalité de cette technique”, se réjouit-on du côté de l’IPI, l’Institut professionnel des agents immobiliers. Soulagement également pour Paul Voerman, agent anversois et père du site www.unefois-deuxfois.be, lancé en février 2010 avant de subir les foudres notariales, sous l’impulsion de la chambre des notaires anversoise. Pour l’heure, à peine 150 transactions ont transité via la plateforme, essentiellement centrées sur Anvers et Gand. Un maigre résultat dû à l’incertitude juridique qui planait sur le site, insiste son créateur. Qui ne s’adonnera pas à la publicité ciblant le grand public. A l’agent immobilier souhaitant utiliser le système de le proposer à ses clients. Alors que la pratique est monnaie courante en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, elle peine à s’implanter dans le plat pays. Pour l’instant du moins.

Quels avantages offre-t-elle ? Le vendeur voit “rassemblés” tous les candidats, avec l’espoir que le prix monte et que la vente se déroule plus rapidement. Côté acheteur, on est nettement plus vite fixé du sort réservé à son offre, et ce de manière vraisemblablement plus transparente. Le tout sans la sécurité juridique qu’apporte la vente publique, ajoutent, à raison, les notaires. Eh oui, la mise aux enchères et la vente publique diffèrent essentiellement en ce point : la première n’est en rien juridiquement contraignante, tant pour le vendeur que pour l’acheteur. Le site ne sert que de facilitateur ; par la suite, tous les mécanismes de la vente de gré à gré reprennent leurs droits. Mais voilà : avant la signature d’un compromis de vente en bonne et due forme, le vendeur peut toujours décider d’opter pour le candidat n’ayant pas placé la barre du prix le plus haut mais ne se protégeant pas au moyen d’une clause suspensive liée à l’obtention d’un crédit hypothécaire, par exemple. Plus fondamental : malgré leurs offres lancées en ligne, les acheteurs potentiels peuvent effectuer demi-tour tant que rien d’officiel n’est signé. “Un seul acheteur ayant remporté les enchères s’est rétracté”, tempère Paul Voerman.

Pas de ça lors d’une vente publique effectuée sous la houlette notariale : toute offre est contraignante ; on ne joue pas. “C’est important que le citoyen soit bien informé”, précise Bart van Opstal, président de la Fédération royale du notariat belge. Et de se faire un rien piquant : “S’il n’y a d’engagement ni du vendeur ni de l’acheteur, on se demande bien à quoi sert encore ce site. La vente publique est la seule à assurer la sécurité juridique.” Agents immobiliers versus notaires : la concurrence est relancée de plus belle. Les notaires ont eux aussi dégainé l’arme du Web, puisque www.notaclick.be, lancé en septembre 2011, a porté le cérémonial de la vente publique sur internet.

Benoît Mathieu

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