Des résultats décevants font plonger l’action bpost de 20%

Le CEO de bpost Koen Van Gerven. © Belga

Bpost a ouvert en baisse de 13% ce mercredi à la Bourse de Bruxelles, après avoir présenté des chiffres plus bas qu’attendu. La perte a même atteint 20%, soit 1,4 milliard d’euros en valeur boursière. Il s’agit de la chute de cours la plus importante depuis l’introduction de bpost en Bourse en 2013.

La chute de l’action était tellement importante vers 09h45, que le cours a été interrompu. Il s’agit d’une interruption automatique en cas de volatilité trop élevée. Les investisseurs ont fait part de leur déception quant aux prévisions énoncées par bpost pour 2018.

Bpost a vu son volume de courrier domestique baisser de 5,8% l’an dernier, ressort-il mardi de la publication de ses résultats annuels, soit un peu plus que les 5% attendus. Au dernier trimestre 2017, le recul en la matière a même été de 6,4%.

Sur la même période, le chiffre d’affaires de l’entreprise, qui appartient pour moitié à l’Etat belge, a par contre bondi de 38,3% grâce aux nombreux colis qu’elle a traités durant les fêtes de fin d’année et au rachat de la société américaine Radial.

La baisse du courrier domestique a été partiellement compensée par la tendance positive des volumes de courrier publicitaire, qui a connu une légère progression. Les colis ont, eux, connu une forte croissance, de plus de 28% pour l’ensemble de l’année.

Les revenus de bpost ont augmenté d’un quart, à plus de 3 milliards d’euros. En raison des coûts importants liés à la mise en service du nouveau centre de tri à Bruxelles et les coûts plus élevés nécessaires pour couvrir le pic de fin d’année, le bénéfice est cependant légèrement plus bas que l’an dernier.

“D’une action croissante, bpost a mué vers une action stable”

Sur le plan opérationnel, l’entreprise enregistre un résultat de 492 millions d’euros. Le bénéfice net est passé de 346 millions d’euros en 2016 à 323 millions l’an dernier.

Bpost maintient un dividende stable pour l’année 2017 à 1,31 euro brut par action. Un dividende intérimaire de 1,06 euro a déjà été payé en décembre dernier et un dividende final de 0,25 euro devrait suivre après approbation des actionnaires.

Selon l’économiste de KBC, Tom Simonts, ce n’est pas tant les chiffres qui ont déçu les investisseurs, mais bien la perception. “D’une action croissante, bpost a mué vers une action stable. Et ça lui a couté 20%”, estime-t-il. “Les chiffres annuels étaient raisonnables, mais pas vraiment exceptionnels. Ils étaient en dessous des attentes qui n’étaient déjà pas très optimistes.” Ce dont l’entreprise a pris conscience, c’est que les moteurs de bpost – les colis notamment – peuvent aussi faire face à des vents contraires, comme la hausse des coûts du transport. “Les locomotives comme les colis et Radial semblent avoir des wagons plus lourds que prévu”, illustre le spécialiste. “Tout comme leurs concurrents, bpost semble avoir moins de contrôle sur le marché qu’attendu”. Le fait que le courrier postal ait baissé si rapidement, a également pesé sur le cours.

La mutation de bpost ne se fera pas sans mal

L’administrateur délégué de bpost avait tempéré mardi soir de trop grandes attentes pour son entreprise après une bonne année 2017.

Celle-ci “est en train de muer et cela ne se fera pas sans mal”, prévient ainsi Koen Van Gerven, en marge de la publication des résultats annuels de la société. “Nous n’aurons plus en 2018 un certain nombre de bonnes surprises financières que nous avons eues l’année passée”, prédit-il, alors que bpost a connu une baisse plus rapide qu’attendu du courrier traditionnel et que la reprise de Radial aux Etats-Unis va de pair avec des coûts importants.

Le patron de l’entreprise postale est d’abord revenu sur une bonne année 2017. “Nous pouvons en être fiers. Regardez les colis: nous y avons enregistré une croissance de 28,2%”, se félicite-t-il. “Durant les fêtes de fin d’année, nous avons atteint un pic jamais connu: nous avons traité 360.000 colis par jour!”

Bpost a par ailleurs repris l’an passé l’entreprise d’e-commerce américaine Radial et a pu augmenter le prix du timbre en Belgique et s’appuyer sur une loi postale qui lui apporte de la stabilité.

2017 fut une année charnière, selon Koen Van Gerven. “Pour la première fois, nous avons généré plus de trois milliards d’euros de chiffre d’affaires et avons tiré moins de la moitié de ce montant de l’échange de courrier. Nous muons de l’ancien vers le nouveau monde.” Un nouveau monde symbolisé par l’e-commerce, d’après l’administrateur délégué. “Tout ce qui se passe à partir du moment où le client appuie sur le bouton pour commander quelque chose”, décrit-il.

Mais cette “mue” ne se fera pas sans mal, prévient le patron. Il faudra en effet remettre un certain ordre au sein de l’entreprise dans le cadre de la reprise de Radial, ce qui coûtera de l’argent à bpost. “Nous connaissions déjà un certain nombre de défis mais nous avons aussi découvert des choses qui nous ont un peu choqués”, reconnaît Koen Van Gerven. “Mais celles-ci sont loin d’être insolubles. Je reconnais des choses que nous avons déjà connues plus tôt chez nous.”

En Belgique, la société quitte également de plus en plus vite “l’ancien monde”. Au 4e trimestre, le volume de courrier postal a ainsi diminué de 6,4% sur base annuelle. Si celui du courrier publicitaire a légèrement augmenté, celui des lettres classiques a baissé d’environ 8%. “Sur ce plan, le quatrième trimestre n’a pas été bon du tout”, analyse l’administrateur délégué. “Nous nous attendons à ce que le courrier postal puisse reculer jusqu’à 7% cette année.”

“Nous allons voir et sentir” cette baisse, attend-il. Ce qui se reflète notamment dans les prévisions financières pour 2018. “En 2017, nous avons généré un ebitda récurrent (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement, ndlr) de 598 millions d’euros. Pour cette année, nous nous attendons à atteindre entre 560 et 600 millions d’euros. Cela prouve que nous sommes en train de muer.”

Dans ce contexte, Koen Van Gerven voit-il des possibilités de reprises supplémentaires? Si l’espace financier est là, le patron de bpost estime aussi qu’il faut désormais avancer un dossier à la fois. “Nous voulons que Radial grandisse et avons l’ambition de grandir également en Europe avec ce genre d’activité”, explique-t-il. “Notre vieil iceberg est en train de fondre. La logistique de l’e-commerce doit devenir notre nouvel iceberg”, conclut-il.

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