Comment les défenseurs de l’environnement augmentent la pression sur les entreprises

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Dénoncer “l’avidité immorale du capitalisme”: à coups d’actions spectaculaires et de déclarations coup de poing, les défenseurs de l’environnement font monter la pression sur les entreprises.

Illustration mardi aux abords de l’assemblée générale du constructeur automobile Volkswagen à Berlin: des manifestants se couchent au sol pour un “die-in”, au milieu de pneus et jantes de voitures éparpillés, derrière un faux cordon de police barré de la mention “scène de crime climatique”.

“Volkswagen représente pour moi l’avidité immorale du capitalisme”, confie à l’AFP Clara Marisa Mayer, militante de 18 ans du mouvement “Fridays for future” (“les vendredi pour l’avenir”).

Fin avril, des tonneaux remplis de cadavres d’abeilles, et des militants déguisés, mimant des insectes à l’agonie au milieu de fumigènes, avaient accueilli les actionnaires du géant pétrochimique allemand Bayer, propriétaire de l’américain Monsanto, un producteur de pesticides honni des écologistes.

Plusieurs marches seront organisées ce week-end dans le monde, contre Monsanto et d’autres géants de l’agrochimie pour réclamer un autre modèle agricole, à l’appel d’un collectif d’ONG.

A Paris, Genève, Londres, d’autres assemblées générales ont été perturbées. L’an dernier, des dizaines de militants de Greenpeace avaient envahi celle de Total, défiant un important système de sécurité.

Face à “l’urgence”

“Les campagnes de dialogues, les expertises ne marchent plus face à l’urgence”, estime Gabriel Mazzolini, chargé de mobilisation climat aux Amis de la Terre en France. “La désobéissance civile de masse permet d’impliquer les citoyens dans une action non violente mais qui peut dépasser le cadre légal”.

Pour Dominique Bourg, tête de liste Urgence écologie pour les élections européennes, où figure notamment l’ancienne ministre de l’Écologie Delphine Batho: “Les partis verts traditionnels n’intègrent pas les courants de protestation, cela ne ‘matche’ pas. Ces initiatives vont se multiplier”, prédit-t-il.

Fin avril, une “semaine de la rébellion” orchestrée par plusieurs ONG de défense de l’environnement a donné lieu à des blocages et mobilisations soigneusement préparés dans deux hauts lieux de la finance et de l’économie: la City de Londres et le quartier de la Défense à Paris.

“Extinction Rebellion veut agir sur l’Etat et mobiliser l’opinion publique. Pour cela, ils ont besoin d’un ennemi, et ce sont notamment les grandes multinationales du pétrole”, analyse Graeme Hayes, sociologue à l’université d’Aston en Angleterre.

Désamorçage

Ces mobilisations éclipsent d’autres méthodes plus techniques, comme l’achat d’actions, donnant le droit de poser des questions aux directions lors des assemblées générales des multinationales, voire d’espérer peser sur certaines décisions.

“Les opérations chocs sont nécessaires mais ne suffisent pas” juge Mauro Meggiolaro, responsable des actions de la fondation italienne Finanza Etica, centrée sur les investissements “éthiques”.

“On utilise les questions écrites pour poser des questions techniques et garder des engagements traçables, et des questions grand public (à l’oral) pour l’assemblée générale”, poursuit-il.

Finanza Etica a lancé un réseau d’investisseurs européens “Shareholders for Change” (“Actionnaires pour le changement”) en 2017. “On a pris 34.100 actions de chez H&M et déposé une résolution externe à l’assemblée générale pour intégrer des critères environnementaux et sociaux dans la rémunération variable des dirigeants”, explique Aurélie Baudhuin, du fonds Meeschaert AM, membre de Shareholders for Change.

“La famille détient 75%, donc ça n’allait pas passer, mais on envoie un message fort”, estime-t-elle.

Les entreprises tentent de répondre à ces diverses initiatives. Certains géants du secteur financier, particulièrement visés, ont annoncé réduire leurs investissements dans certaines activités polluantes.

“Pensez à l’environnement, pensez aux déchets plastiques. Toutes les entreprises doivent faire face à ces problèmes et devront montrer comment elles y répondent”, a assuré le PDG de Nestlé, Mark Schneider, dans une journée pour les investisseurs aux États-Unis, le 7 mai. Avant de vanter les initiatives de son groupe pour aider à mettre en place des systèmes de recyclage.

Ce qui n’avait pas empêché la directrice de Greenpeace International, Jennifer Morgan, d’intervenir à l’assemblée générale en avril pour demander à Nestlé d’arrêter les plastiques à usage unique, ni les militants de l’ONG de défiler quelques jours plus tard devant le siège avec une immense marionnette en forme de dragon, réalisée à partir de déchets en plastique récupérés en mer.

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