Faire payer les criminels en col blanc plutôt que les juger ?

HSBC © Reuters

La filiale suisse de la banque HSBC s’apprête à négocier avec la justice belge pour trouver un accord à l’amiable, comme elle vient de le faire avec la Suisse à qui elle a versé 38 millions d’euros. Une pratique qui semble se généraliser…

Soupçonnée d’avoir aidé 3.000 Belges à frauder le fisc, la filiale suisse de la banque HSBC s’apprête à négocier avec la justice belge pour trouver un accord à l’amiable, rapportent ce vendredi De Tijd et L’Echo. Selon nos confrères, le parquet de Bruxelles a planifié une réunion avec les avocats belges de l’institution dans le courant du mois. Objectif ? Définir la somme d’argent que ce “deal” éventuel pourrait rapporter au Trésor belge. Pour mémoire, c’est suite aux révélations du scandale SwissLeaks que le juge d’instruction Michel Claise a inculpé en novembre dernier la banque pour “fraude fiscale grave et blanchiment”. Six milliards auraient fui la Belgique pour atterrir sur des comptes détenus par des contribuables belges auprès de la banque à Genève.

Tendance actuelle

Ce n’est pas la première fois que la justice belge (et le juge d’instruction Michel Claise en particulier) procède de la sorte. Fin 2013 déjà, le holding belge La Compagnie du Bois Sauvage et ses dirigeants concluaient un accord à l’amiable avec la justice bruxelloise pour mettre fin aux poursuites engagées pour cause de délit dans le cadre du démantèlement en 2008 du groupe Fortis. A l’époque, le montant du chèque s’élevait à 9 millions d’euros. Et le parquet de Bruxelles ne faisait qu’appliquer la nouvelle mouture de la législation relative à la transaction pénale, dont le champ d’application a été élargi en en 2011 et qui couvre depuis 2011 aussi certaines fautes comme la fraude fiscale, le blanchiment d’argent ou le délit d’initié. Plusieurs accords de ce type se sont succédé depuis. Avec à la clé plusieurs dizaines de millions d’euros encaissés (par l’Etat).

Pragmatique et économique

Certains voient dans cette manière de faire le retour d’une justice de classe qui permet aux plus aisés de négocier discrètement avec les autorités judiciaires une amende et d’échapper ainsi à un procès public. Pour d’autres, c’est une façon non seulement de faire rentrer rapidement de l’argent dans les caisses publiques mais aussi et surtout d’éviter d’interminables procès. Des procès qui s’éternisent jusqu’à ne jamais aboutir (pour cause de prescription ou de dépassement de délai raisonnable). Songez au fiasco KB Lux ou à l’affaire de Croÿ. Face à ce genre de dossiers financiers généralement compliqués, et dans lesquels on trouve bien souvent d’éminents avocats d’affaires qui connaissent toutes les ficelles, les partisans de la procédure estiment que la transaction pénale en matière de délit financier est de nature à apporter une solution moderne, économique et pragmatique.

L’exemple américain

C’est en tous cas dans ce sens que le gouvernement veut aller. Dans son plan de réformes présenté dernièrement, le ministre de la Justice Koen Geens (CD&V) propose d’adapter le système afin d’encourager son utilisation (sauf lorsqu’un jugement est déjà intervenu ou que des procédures sont en cours devant la cour de Cassation). Pour plus de transparence, il préconise par exemple d’inscrire les transactions pénales dans une sorte de registre central. Histoire de pouvoir déterminer la juste peine et le profil du suspect concerné en cas d’infraction ultérieure. Pas question pour autant de transiger sur des faits graves portant notamment atteinte à l’intégrité physique des personnes, qui doivent rester en dehors du champ de la transaction pénale. Pour ce qui est de la criminalité financière par contre, n’y a-t-il pas matière en effet à s’inspirer de l’exemple de la justice américaine qui a récupéré – sans trop se fatiguer – plusieurs dizaines de milliards de dollars suite aux affaires UBS, BNP Paribas et autres scandale du Libor ? Reste à voir combien la justice belge obtiendra quant à elle d’HSBC. Les autorités suisses viennent de leur côté de trouver un accord avec la banque pour 38 millions d’euros.

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