Vigoureuse reprise des SIR

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Selon le segment dont elles relèvent, les sociétés immobilières réglementées (SIR) ont diversement survécu à la crise sanitaire. Reste qu’elles ont, pour un certain pourcentage, une place de choix dans tout portefeuille judicieusement diversifié.

Ex-SICAFI, les SIR doivent, pour bénéficier du régime fiscal favorable qui leur est réservé, distribuer chaque année à leurs actionnaires 80% au moins de leur bénéfice (courant). Les dividendes élevés, et généralement en hausse, qu’elles versent, ont fait des SIR un investissement de plus en plus prisé au fil des ans, cet immobilier “papier” remplaçant avantageusement les obligations. Les rendements moyens (hausse du cours + dividende) des SIR ont largement dépassé ceux d’un investissement dans l’indice Bel 20.

La pandémie de Covid-19, qui a éclaté en Europe en 2020, a eu de graves conséquences sur la plupart des SIR. Il faut dire aussi que les marchés ont surréagi: dans le tableau ci-après, la colonne des rendements totaux des 12 derniers mois montre que les cours se sont nettement redressés l’an dernier. Les 17 SIR cotées sur Euronext Bruxelles (Inclusio, acteur résidentiel à vocation sociale, n’est cotée que depuis la mi-décembre 2020; elle y a remplacé Leasinvest, qui a fusionné avec Extensa pour devenir Nextensa) affichent un rendement en moyenne bien plus élevé que celui du principal indice d’actions de la Bourse de Bruxelles (18,9%, contre 6,5%). Non moins de sept des 17 titres actent un rendement supérieur à 30%, et quatre d’entre eux, même, de plus de 40%. Trois en revanche ont un rendement négatif – pour le nouveau venu Inclusio, la chute est même considérable.

L’évolution des cours se reflète dans le rendement brut moyen en dividende; d’après le dividende (annoncé) de l’exercice le plus récent (généralement, 2021), le rendement est passé de 6,14% à 4,66% en moyenne en un an, ce qui demeure bien supérieur aux rendements obligataires. Reste que bien qu’il soit encore possible, pour six des SIR, d’atteindre un rendement en dividende de plus de 6% brut, les cours ont augmenté nettement plus que les dividendes. Mais les sommets de près de 9%, comme celui enregistré par Wereldhave Belgium il y a un an, ne sont plus à l’ordre du jour. Certains noms, dont Warehouses De Pauw (WDP), approchent bien davantage des 2%.

L’envolée des cours entraîne également une appréciation – certes loin d’être spectaculaire – de la valeur moyenne des SIR. Le tableau montre que huit d’entre elles s’échangent toujours sous la valeur de leur actif net; mais le rapport moyen est de 1,12, contre 1,04 il y a 12 mois. Les acteurs de la logistique, comme WDP et Montea, continuent de le tirer vers le haut: portés par la solidité de leurs projets de croissance, tous deux se négocient au double de la valeur de leur actif net. Il convient donc de regarder très attentivement dans quoi chaque SIR est investie, un paramètre dont pourra dépendre le rendement de l’investissement dans les années qui viennent.

Logistique en plein essor

La crise sanitaire n’a pas plombé tous les segments, tant s’en faut. L’immobilier logistique en est même sorti renforcé. Alors que l’essor du commerce électronique entraînait déjà une croissance structurelle de la demande de capacités de stockage de marchandises, la pandémie est venue donner un formidable coup de pouce à l’e-commerce. WDP et Montea affichent les meilleurs chiffres du segment logistique. Elles vont pouvoir concrétiser leurs projets de croissance, jouissent d’un taux d’occupation maximal et devraient annoncer des dividendes en hausse dans les années à venir. Les confinements et autres mesures restrictives ayant souligné l’importance cruciale du secteur logistique, celui-ci peut passer à la vitesse supérieure et se montrer toujours plus ambitieux. WDP et Montea ont clos le dernier exercice sur d’excellents rendements… tout comme, d’ailleurs, elles l’avaient fait au cours des 10 années précédentes. Durant la décennie écoulée, un investissement dans WDP a rapporté 27,3% (hausse du cours + dividende) par an en moyenne: c’est phénoménal. Chez Montea, ce chiffre s’établit à 24%, contre 10,4% pour le Bel 20. Partiellement actif dans le même secteur, Intervest Offices & Warehouses peut lui aussi s’enorgueillir des résultats obtenus en 2021.

Demande de soins soutenue

Cela fait plusieurs années que l’immobilier de santé compte au nombre des segments de croissance dans le domaine des SIR. Le vieillissement de la population dope la demande de chambres en maisons de repos, en résidences-services et en établissements de soins. Les bâtiments sont généralement loués pour longtemps (plus de 20 ans) et le risque de vacance est en principe limité. L’on sait malheureusement que les maisons de repos et de soins ont été le théâtre de très nombreuses contaminations et d’une vague de surmortalité au début de la pandémie. Reste que les perspectives à long terme demeurent incontestablement favorables; à titre d’exemple, la population de l’Union européenne âgée de plus de 80 ans augmentera d’un bon 120% d’ici à 2050, pour atteindre 57,5 millions de personnes. Une tendance naturellement appelée à soutenir la demande d’immobilier de santé.

Présente en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Finlande, en Suède et, depuis peu, en Irlande, Aedifica est un acteur d’envergure européenne dans ce secteur. Beaucoup plus petite, Care Property Invest n’a pas non plus la même ampleur sur le plan géographique. Cofinimmo est un cas particulier. Longtemps active dans le seul segment des bureaux, cette société a fait depuis quelques années de l’immobilier de santé son pôle de croissance; elle s’étend par ailleurs de plus en plus à l’étranger.

Résilient, l’immobilier résidentiel

L’immobilier résidentiel est probablement le segment qui a le moins souffert de la crise sanitaire. L’on ne déplore par exemple aucune fausse note chez Home Invest Belgium. Xior est spécialisée dans les résidences pour étudiants, une niche dans laquelle elle réussit particulièrement bien. L’on peut au demeurant affirmer que ce créneau est porté par la crise sanitaire: les jeunes sont plus nombreux que jamais à vouloir s’établir sur les campus et profiter de l’insouciance propre à la vie étudiante. Ce qui engendre une contraction de l’offre.

Bureaux désertés

Le segment des bureaux a fort souffert de la pandémie. Du jour au lendemain, le télétravail, jusque-là éventuellement autorisé à raison d’un à deux jours par semaine, est devenu obligatoire. Si, comme tout porte à le croire, il devrait plus ou moins devenir la “nouvelle norme”, les entreprises n’auront plus besoin de gigantesques superficies de bureaux, de sorte que les espaces vacants vont se multiplier.

Pour les actionnaires de Befimmo, la crise sanitaire a d’abord été un cauchemar. Le cours de l’action a chuté d’environ 40%, jusqu’à ce que le canadien Brookfield Asset Management, estimant que les choses avaient assez duré, en offre en février 1,35 milliard d’euros, soit 47,50 euros par action. Cela reste de 20% inférieur à la valeur intrinsèque, mais permettrait de limiter la casse. L’offre a permis au cours de retrouver son niveau… d’il y a 10 ans. Heureusement, le rendement en dividende, de 6,6% brut par an en moyenne, a toujours de quoi séduire l’actionnaire. Nous estimons que la proposition pourrait aboutir.

Commerces: redressement partiel

L’immobilier commercial a été le segment le plus cruellement frappé par la crise. Lui qui subit depuis des années la concurrence du commerce électronique, a de surcroît enduré des confinements destructeurs. Les acteurs de l’immobilier commercial ont dû faire face à des arriérés de loyer, voire à la faillite d’un certain nombre de leurs locataires. Tous sont donc tombés en dessous, ou même très en dessous, de leur valeur intrinsèque. Ce qui n’était d’ailleurs pas toujours justifié, puisque ces 12 derniers mois ont suffi à certains pour se refaire une santé. La performance totale la plus élevée (45% environ) est à mettre au crédit de Wereldhave Belgium; malgré cela, son cours reste de 15% inférieur à ce qu’il était il y a 10 ans.

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