Colruyt voit toujours ses marges s’éroder

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Sa politique de prix bas rend le groupe vulnérable à la concurrence féroce sur le marché. La croissance du bénéfice par action semble à présent s’être interrompue. Colruyt gâte pour l’heure plus ses clients que ses actionnaires, une stratégie selon nous judicieuse.

Dès qu’un concurrent lance une action ‘1+1 gratuit’ ou accorde une réduction fixe, Colruyt s’aligne. Cette politique des prix les plus bas a permis l’expansion et l’enrichissement du groupe, mais c’est elle aussi qui le rend vulnérable à la concurrence féroce sur le marché. Au premier semestre de l’exercice, Colruyt a pu respirer davantage, mais au second (du 1er octobre 2016 au 31 mars 2017), les hostilités ont repris. Les hard discounters Lidl et Aldi ont gagné des parts de marché, et le groupe fusionné Ahold Delhaize a gagné en force de frappe. Depuis la crise, le consommateur est devenu et reste plus attentif à son ticket de caisse.

Ceci n’est pas sans conséquences sur la rentabilité et les chiffres annuels de Colruyt. La marge opérationnelle comparable s’est tassée de 5,5 à 5,1%, ramenant le résultat opérationnel comparable tout juste sous le niveau de l’an dernier. C’est décevant, dans la mesure où le marché tablait sur des résultats au moins stables. Comme de coutume, le groupe ne s’est pas hasardé à publier des perspectives pour le semestre en cours. Si la pression de la concurrence et des prix perdure, la situation ne s’améliorera pas à court terme. Parallèlement, Colruyt investit lourdement dans le long terme, d’où la hausse des coûts opérationnels et des frais d’amortissement, qui rogne sur la rentabilité. Le bénéfice net publié et le bénéfice par action ont certes progressé de 4,6%, mais c’est en raison de paramètres occasionnels, comme la plus-value sur la vente de Pro à Pro et l’avantage fiscal qui en découle.

La stratégie de prix bas de Colruyt continue de porter ses fruits sur le plan commercial. Sa part de marché a progressé légèrement à 31,7%, permettant une hausse du chiffre d’affaires (CA) comparable de 2,8%, même si le marché tablait sur un peu plus. La croissance du CA la plus sensible (+11%) est signée par les chaînes Okay et Bio Planet, grâce aux magasins supplémentaires, à une hausse des prix et à une augmentation du nombre de clients. En France, le groupe a enregistré une hausse de son CA de 5% dans le sillage de la modernisation du réseau de magasins et de prix plus faibles. La rentabilité n’est cependant pas encore possible dans l’Hexagone.

Depuis 2012, le groupe est affecté par l’érosion de ses marges, ce qui explique que malgré la hausse du CA, le bénéfice n’a pas pu progresser proportionnellement. Sur les cinq dernières années, l’augmentation du bénéfice par action s’est limitée à 10%, et semble à présent s’être interrompue. Nombre d’investisseurs se demandent dès lors si la valorisation actuelle de Colruyt est justifiée. Pour autant, celle-ci n’est pas excessive, avec un rapport cours/bénéfice de 18 et une valeur d’entreprise de plus de 8 fois le cash-flow opérationnel. N’oublions pas que le groupe dispose d’un bilan très solide.

Conclusion

La concurrence persistante et féroce érode les marges de Colruyt, ce qui freine la croissance de la rentabilité. On peut dès lors remettre en question sa valorisation. Mais le groupe a choisi de conserver ses parts de marché, une décision qui sera payante lorsque la pression de la concurrence s’atténuera. Colruyt gâte pour l’heure plus ses clients que ses actionnaires, et dans une perspective à long terme, c’est selon nous le meilleur choix. Nous réitérons le conseil ” à conserver “.

Conseil : conserver

Risque : faible

Rating : 2A

Devise : euro

Marché : Euronext Bruxelles

Capit. boursière : 6,7 milliards EUR

C/B 2017 : 19

C/B 2018 : 18

Perf. cours sur 12 mois : -8 %

Perf. cours depuis le 01/01 : -3 %

Rendement du dividende : 2,4 %

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