Colruyt

A conserver

Certes, la direction avait prévenu il y a quelques mois, mais cela reste un choc : pour la première fois en huit ans, le bénéfice par action de Colruyt a baissé. Les dégâts restent limités avec un recul de 1,2%, mais la contraction de la rentabilité est nette si l’on fait abstraction des éléments exceptionnels. Le recul de 5,6% du bénéfice opérationnel (EBIT) est nettement supérieur aux attentes. De plus, la baisse est particulièrement marquée au cours de la deuxième moitié de l’exercice écoulé (clos le 31 mars), et Colruyt n’entrevoit pas d’amélioration à court terme. La confiance des consommateurs ne se redresse pas et la guerre des prix continue à faire des ravages parmi les distributeurs. Si Colruyt parvient à éviter une nouvelle baisse du bénéfice cette année, ce serait déjà une excellente performance. Mais c’est aussi le scénario sur lequel tablent les investisseurs, car une croissance des bénéfices est indispensable pour justifier la valorisation toujours assez élevée. Le chiffre d’affaires (CA) de Colruyt progresse toujours, mais à un rythme de plus en plus lent. Il y a cinq ans, les ventes grossissaient de 8% par an; l’an dernier, la croissance n’a pas dépassé 4%, et est même retombée à moins de 4% au 2e semestre de l’exercice – ce qui n’est pas encore une catastrophe dans un marché qui stagne et qui ne connait guère d’inflation. Autre constat inhabituel pour Colruyt : la légère baisse de la part de marché (à 25,9%) au 2e semestre, qui a effacé la hausse des six premiers mois de l’exercice. Les enseignes de hard discount comme Lidl et Aldi et le nouvel arrivant Albert Heijn mettent le marché sens dessus dessous. A grands coups de remises et de promotions, elles investissent de manière agressive sur le changement structurel du comportement du consommateur. Et Colruyt se doit à lui-même et à sa stratégie des prix les plus bas de suivre les baisses des prix. En outre, les consommateurs privilégient de plus en plus les marques de distributeurs ou discount, où les marges sont plus basses. Ce n’est d’ailleurs pas un phénomène exclusivement belge. Le marché français de la distribution est caractérisé à la fois par une contraction des volumes et une inflation négative. Colruyt France a certes enregistré une croissance du CA de 13% en investissant lourdement dans des prix bas, mais le groupe ne dégage toujours pas de bénéfices outre-Quiévrain. Cette guerre des prix se traduit non seulement par un ralentissement de la croissance du CA, mais aussi par une contraction des marges. Alors qu’elle atteignait encore 7% il y a cinq ans, la marge d’EBIT de Colruyt s’est effritée à 5,3% au 2e semestre de l’exercice 2013-2014. Colruyt est parvenu à éviter une contre-performance encore plus nette avec un contrôle des coûts assez stricts, malgré une hausse du nombre de travailleurs de 5%. Mais pour stabiliser le bénéfice par action, il est également nécessaire de mettre un terme à l’érosion des marges. Et comment faire dans les conditions de marché actuelles ? Colruyt s’est constitué une position de trésorerie impressionnante de 600 millions EUR qui peut être sollicitée pour procéder à des investissements (voir ZEB), mais aussi pour racheter des actions propres et ainsi défendre le bénéfice par action. Une hausse du dividende pourrait également faire office d’os à ronger pour les actionnaires en cette période de vaches maigres.

Conclusion

La croissance des bénéfices est également devenue une denrée rare pour Colruyt. Elle est désormais trop lente pour compenser l’érosion des marges, ce qui entraîne une stagnation du bénéfice par action. Et compte tenu de la stagnation du bénéfice, la valorisation de l’action reste assez élevée malgré le recul du cours.

Conseil: conserver

Risque: faible

Rating: 2A

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