Quel avenir pour les droits d’auteur ?

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“Les droits d’auteur ne sont plus un phénomène marginal depuis longtemps. Aujourd’hui, ils sont à la source d’un business fructueux. Mais là n’est pas le vrai problème”. Voici l’avis d’Anton Van Zantbeek, avocat pour Rivus et professeur invité à la Fiscale Hogeschool.

Le régime fiscal avantageux des droits d’auteurs risque d’être supprimé. Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) l’a inclus dans son plan d’action contre la fraude. Caché entre des mesures telles que la lutte contre le dumping social, l’introduction de caisses blanches et la lutte contre les paradis fiscaux, le régime fiscal des droits d’auteurs est subitement devenu la cible du gouvernement. Le ministre explique vouloir mettre un terme aux “usages abusifs”. Il veut en réalité s’attaquer aux “usages” de ce régime. Voici comment déguiser une hausse des impôts.

La charge fiscale belge sur le travail, ridiculement élevée, oblige les contribuables à se bricoler des solutions. Certains optent pour une voiture de société ou pour les frais propres à l’employeur et d’autres pensent au régime des droits d’auteur. Les droits d’auteur sont facilement accordés dans divers secteurs. Pensez aux architectes, aux développeurs de logiciels et autres fournisseurs de services informatiques, aux photographes, aux artistes, aux consultants, aux spécialistes marketing, aux journalistes, etc. Dès que quelque chose d’original est créé, l’utilisation de cette création peut donner lieu à des droits d’auteur.

D’un point de vue fiscal, les droits d’auteurs sont extrêmement intéressants. En Belgique, à quelques exceptions près, le taux d’imposition minimal en Belgique est de 30 %. Les travailleurs sont les moins bien lotis, avec un taux pouvant atteindre 50 %. Le taux d’imposition pour les droits d’auteurs jusqu’à 62 550 euros est de 15 %. À cet avantage s’ajoute une déduction forfaitaire des plus intéressantes. Il en résulte que le taux d’imposition n’est que de 7,5 % jusqu’à 16 680 euros, et de 11,25 % pour les montants compris entre 16 680 euros et 33 360 euros. Que demander de plus ? Si ce revenu s’ajoutait au revenu professionnel, l’impôt serait de 16 680 euros. Dans le cas des droits d’auteur, la taxe à payer n’est que de 3127,50 euros. Cela représente un avantage de pas moins de 13 552,5 euros.

Quel avenir pour les droits d’auteur ?

Le système a déjà été mis sous pression en 2012. Le précompte mobilier est passé à 25 %. Sous la pression des forces progressistes et de gauche, une exception a été admise pour les droits d’auteur. Gwendolyn Rutten (Open Vld) condamnait une taxe sur la créativité. Freya Piryns (Groen) a même été choquée par l’introduction de cette augmentation. Du vol pour les pauvres artistes, selon elle. Naturellement, les groupes d’intérêt des journalistes et des créatifs se sont joints à cette protestation avec force. Les droits d’auteurs ont donc été épargnés.

Mais en 2012, le recours au régime favorable était relativement limité. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. L’utilisation des droits d’auteurs aurait été multipliée par dix depuis lors. Pour l’année d’imposition 2020, le montant des droits d’auteur est estimé par les autorités fiscales à 200 000 000 euros. Les droits d’auteur ne sont donc plus un phénomène marginal depuis longtemps. Aujourd’hui, ils sont à la source d’un business fructueux.

On pourrait donc penser que ce régime est trop avantageux. Mais là n’est pas le vrai problème. Le vrai problème, c’est la charge fiscale imposée aux travailleurs belges. Les droits d’auteurs et autres techniques d’évitement ne sont pas la maladie, ce sont des symptômes. La charge fiscale pesant sur les travailleurs doit être réduite de manière urgente et considérable. Ce n’est possible que si notre gouvernement obèse se concentre sur ses tâches principales, son efficacité et sa robustesse. Ainsi, le produit de l’assèchement des dernières oasis fiscales existantes devrait être entièrement consacré à la réduction de la charge fiscale. Un vrai taxshift, donc.

Malheureusement, nous devons plutôt nous attendre à une autre hausse des impôts. Un moyen de récolter des fonds supplémentaires pour un gouvernement prodigue qui refuse de faire des choix audacieux. Ou comment la justice fiscale a été oubliée à maintes reprises pour augmenter encore la charge fiscale globale dans ce pays.

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