Philippe Ledent

Parti communiste chinois: la fin d’une “success story”?

Philippe Ledent Senior economist chez ING Belgique, chargé de cours à l'UCLouvain.

La Chine connaît probablement actuellement une de ses plus graves tempête économique, si pas la plus grave, depuis le début des années 2000.

Le 20e Congrès du Parti communistechinois qui se tient jusqu’au 23 octobre est exceptionnel à plus d’un titre. Rappelons d’abord que ce congrès doit élire le comité permanent du bureau politique qui représente l’équipe dirigeante du pays, ainsi que son président (en fait, à la fois secrétaire général du Parti communiste, président de la commission militaire centrale et président de la République populaire de Chine).

Sur le plan politique, c’est un événement majeur dans la mesure où Xi Jinping devrait recevoir un troisième mandat, le changement dans la constitution opéré en 2018 abandonnant la limite fixée jusqu’alors à deux mandats. Sur le plan économique, le Congrès reste un événement majeur qui doit tracer les lignes directrices du développement de la Chine (la deuxième plus importante économie de la planète) pour les cinq prochaines années. Compte tenu des virages opérés par l’économie chinoise sous l’impulsion du président Xi, on écoutera ces lignes directrices avec beaucoup d’attention. La régulation de certains secteurs clés de l’économie (la construction et l’immobilier, l’éducation, la technologie) s’est en effet renforcée depuis 2021 et il n’y a pas beaucoup de doute sur le fait qu’il en sera de même dans le nouveau plan quinquennal. Mais à quel point?

Par ailleurs, le Congrès intervient à un moment tout particulier du développement économique du pays. Jusqu’alors, rien depuis le début des années 2000 n’avait pu arrêter la locomotive chinoise: ni la crise financière dont la Chine était plutôt sortie renforcée car assez peu touchée, ni les premières phases de la crise du covid. Mais le vent a tourné cette année. Le secteur de la construction immobilière, ébranlé par un excès d’offre, par la spéculation et la plus grande régulation, connaît une crise sans précédent. Or il s’agit d’un secteur tout à fait essentiel de l’économie chinoise. Par ailleurs, la politique zéro-covid menée par les autorités est rendue quasi impossible compte tenu des nouveaux variants très contagieux. A tout le moins, elle oblige à poursuivre les confinements et les restrictions, ce qui limite l’impact des mesures de relance économique auxquelles les autorités chinoises nous avait habitués depuis plus de 20 ans au moindre ralentissement.

En bref, l’économie chinoise n’est pas au mieux de sa forme. La meilleure preuve en est peut-être l’inflation très modeste de 2,8%. Non, ce n’est pas l’illustration du meilleure maîtrise de la politique monétaire par la banque centrale chinoise, mais plutôt le signe d’une demande atone dans l’économie.

Enfin, il faut se rappeler que le développement économique de la Chine a été basé sur l’intensification des échanges mondiaux. Dans un monde où les frontières, les barrières et les tensions ne font que se renforcer, la Chine risque de devoir trouver de nouveaux relais de croissance et de devoir, à un moment, choisir ses partenaires commerciaux – ou ses alliés, devrais-je écrire. Or, si les choix sont assez simples économiquement, ils le sont probablement beaucoup moins sur le plan politique.

En conclusion, la Chine connaît probablement actuellement une de ses plus graves tempête économique, si pas la plus grave, depuis le début des années 2000. Or, c’est dans de telles circonstances que les failles dans la structure de l’économie ou la politique économique apparaissent au grand jour, et que les erreurs de politique se payent cash. Nous en savons quelque chose en Europe. Qu’en sera-t-il en Chine?

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