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Marché des changes: un début d'”effet Trump” ?

Quoi de plus imprévisible que les taux de change ? Historiquement, cela n’a pas toujours été le cas. Longtemps, les taux de change n’ont exprimé que l’importance relative des échanges de marchandises entre les pays.

Ainsi, un pays exportateur net voyait sa monnaie s’apprécier, puisque les clients des entreprises exportatrices avaient besoin de la monnaie du pays pour payer leurs achats. Dans un tel contexte, prévoir l’évolution des taux de change revenait à prévoir les flux de commerce extérieur.

On pourrait penser que dans un monde globalisé, dans lequel les échanges entre les pays se sont multipliés, ces relations ne sont que plus fortes. Cependant, la globalisation financière a parallèlement multiplié les flux de capitaux à des fins purement financières : investissement, financement de dettes, spéculation, etc. Dès lors, les relations qui fondent les taux de change sont devenues extrêmement complexes, mais surtout très variables dans le temps. La récente évolution du taux de change entre l’euro et le dollar en est un exemple intéressant.

Entre 2014 et 2016, on peut en effet expliquer relativement facilement la variation du taux de change entre les deux devises par l’évolution des taux d’intérêt. Alors que les taux aux Etats-Unis se relevaient petit à petit, les taux européens restaient contraints par la politique accommodante de la Banque centrale européenne. L’écart de taux favorable aux Etats-Unis entraînait, logiquement, une appréciation du dollar, illustrant par la même occasion l’importance prépondérante des flux financiers sur les flux commerciaux.

Pourtant, l’année 2017 a montré un tout autre visage : alors que l’écart de taux n’a cessé de s’accentuer en faveur des Etats-Unis, on a assisté à une imposante remontée de l’euro, un peu comme si les marchés financiers s’étaient détournés de l’environnement de taux pour se trouver un autre guide. La dynamique économique a clairement joué ce rôle. En effet, durant l’année passée, les marchés financiers ont entériné l’idée que la zone euro pouvait retrouver le chemin de la croissance. Ce constat a amené bon nombre d’investisseurs internationaux à revenir vers la zone euro pour saisir de belles opportunités d’investissement, et ce malgré un environnement de taux toujours très faible.

Lorsque l’économie frise le plein emploi, que peut apporter une politique budgétaire expansionniste si ce n’est de l’inflation ?

Au cours des dernières semaines, la pression à la hausse sur les taux s’est renforcée une nouvelle fois. Cette pression provient clairement de l’anticipation d’une inflation plus élevée aux Etats-Unis. Mais encore une fois, elle a été accompagnée d’une appréciation paradoxale de l’euro. Franchement, il en faut plus qu’un simple retour en grâce de la zone euro dans le coeur des investisseurs pour expliquer que, malgré des taux en hausse sous l’impulsion des Etats-Unis, le dollar se déprécie encore. La confiance dans l’économie américaine n’est-elle pas en train d’être ébranlée ? Ce serait en tout cas un élément rationnel pour expliquer que le dollar puisse se déprécier à l’heure où les marchés envisagent une remontée plus brusque des taux américains. Cela signifierait en fait que les marchés pensent que la politique budgétaire de plus en plus expansionniste de l’administration Trump se traduira davantage par de l’inflation que par une croissance économique prolongée. On aurait bien du mal à leur donner tort : lorsque l’économie frise le plein emploi, que peut apporter une politique budgétaire expansionniste si ce n’est de l’inflation ? Si, au contraire, les marchés croyaient en une combinaison d’inflation et de croissance en hausse, le dollar se serait indubitablement renforcé.

En conclusion, un peu comme dans le cas du Brexit, il ne faudrait pas s’étonner que ceux qui, au lendemain des élections américaines, prédisaient un impact négatif de l’élection de Donald Trump sur l’économie et les marchés aient finalement raison…un à deux ans trop tard.

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