Les Wallons sont plus jeunes, les Flamands plus âgés

Camille Delannois Journaliste Trends-Tendances  

Contrairement aux clichés, les Wallons sont productifs, créent des entreprises et innovent tant et plus. Dans certains domaines, ils supportent même la comparaison avec le nord du pays. Des raisons d’espérer, même si les problèmes structurels restent criants. Tour d’horizon en neuf affirmations.

La Wallonie a l’atout de la jeunesse. Cette idée communément véhiculée n’est que partiellement avérée. Selon les statistiques de Statbel, l’âge moyen au 1er janvier 2022 était de 42,54 ans en Flandre, contre 41,3 en Wallonie. “Les populations de deux Régions sont plutôt âgées et vieillissantes, souligne David Van Den Abbeel. La population de la Flandre est toutefois plus avancée dans ce processus par rapport à la population wallonne.”

En outre, la jeunesse doit être gérée. “Il y a un énorme problème de soft skills en Wallonie, ajoute Pierre-Frédéric Nyst, qui est également membre du Comité de gestion du Forem. Trop de Wallons ne se lèvent pas assez tôt, ne font pas attention à leur présentation et, c’est un tabou, il y a un problème d’addictions auxquelles il faut s’attaquer. Il y a bien du travail à effectuer en matière d’éducation, y compris dans des compétences de base. C’est l’action la plus importante à mener, et cela prendra au moins une génération.”

“Au-delà de la qualification, nous avons aujourd’hui un problème d’orientation, ajoute Olivier de Wasseige. On n’oriente pas assez ces jeunes vers les disciplines les plus porteuses qui vont leur permettre d’avoir un métier qui a du sens, dans des entreprises wallonnes. Il n’y a pas de désamour par rapport au travail en Wallonie, mais il y a une autre perception du travail pour la nouvelle génération et nous devons nous y adapter.”

Le nombre de métiers en pénurie reste important: environ 140. “Nous avons proposé, par exemple, une exonération fiscale de cinq ans pour les gens qui acceptent un métier en pénurie, dit Pierre-Frédéric Nyst. Cela inciterait les jeunes à mettre le pied à l’étrier au moment où ils en ont le plus besoin. De façon générale, une réforme fiscale doit gommer les pièges à l’emploi. Et il convient, enfin, d’assurer un minimum de contrôle des chômeurs.”

Mélanie Mestdagt (CEO de EyeD Pharma): “On sent cette soif d’entreprendre chez beaucoup de jeunes”

Mélanie Mestdagt: “A travers nos diverses collaborations avec l’université, nous avons vu le potentiel technique et d’innovation des doctorants. Nous les connaissons donc avant de les engager.” © PG

“Nous avons en Wallonie, une terre propice pour entreprendre.” Mélanie Mestdagt, CEO de la medtech liégeoise EyeD Pharma, insiste sur “l’écosystème très favorable” qui facilite le développement de son entreprise, et plus largement de tout le secteur des sciences du vivant. “Nous sommes au cœur d’un réseau avec des centres technologiques, l’université et les hôpitaux, explique-t-elle. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous nous sommes implantés en Wallonie.”

EyeD Pharma a mis au point un micro-implant oculaire qui permet de traiter le glaucome et, potentiellement, d’autres pathologies. Cette innovation a permis à l’entreprise de lever plus de 100 millions d’euros pour développer ses projets. “Nous avons aussi reçu des aides régionales, ajoute Mélanie Mestdagt. Il ne faut pas s’en cacher: sans ces aides, nous n’aurions pas pu avoir les mêmes ambitions et créer autant d’emplois pérennes.” EyeD Pharma emploie aujourd’hui 105 personnes – “nous étions quatre en 2016!” – et a érigé une usine de fabrication de ses micro-implants. “Nous avons été bien accompagnés par les investisseurs publics et privés, précise-t-elle. Tous ces acteurs autour de nous nous ont permis d’avoir cette ambition et cette croissance.”

Ce réseau est utile jusque dans le recrutement, l’un des défis majeurs pour toutes les entreprises du secteur. EyeD Pharma recrute en effet directement à l’université en attirant les doctorants qui achèvent leur thèse. “Nous les avons vu travailler à travers nos diverses collaborations avec l’université, confie la CEO. Nous avons vu leur potentiel technique et d’innovation, nous les connaissons donc avant de les engager.” Autre effet collatéral des connexions renforcées entre l’université et les entreprises: un esprit d’entreprendre bien plus vivace qu’autrefois. “On sent chez beaucoup de jeunes qui arrivent chez nous cette soif d’entreprendre. Certains développent une activité indépendante sur le côté, d’autres amènent des idées pour de nouveaux produits ou pour faire vivre leur région. Ce nouvel état d’esprit, nous le devons, je pense, aux connexions de tout l’écosystème. Au Sart Tilman, nous sommes entourés de plein de sociétés innovantes.”

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