La croissance britannique freine brutalement à moins d’un an du Brexit

© Reuters

L’économie britannique a affiché une inquiétante faiblesse au premier trimestre, avec une croissance limitée à 0,1% et son pire résultat en cinq ans, le tout à onze mois d’un Brexit aux contours incertains.

Ce chiffre décevant publié vendredi par l’Office des statistiques nationales (ONS) s’explique, notamment, par une chute de l’activité dans la construction et un ralentissement du puissant secteur des services.

Il représente une désagréable surprise, les analystes interrogés par Bloomberg ayant tablé sur une progression modérée de 0,3% d’un trimestre sur l’autre.

“La principale entrave à la croissance a été le secteur de la construction, dont l’activité a diminué de 3,3%” par rapport à celle du quatrième trimestre 2017, a expliqué l’ONS dans un communiqué.

Principal appui de l’économie britannique, le secteur des services (finance, distribution, communication, transports, etc.) n’a crû que de 0,3% d’un trimestre sur l’autre.

“La comparaison d’une année sur l’autre indique une tendance de long terme au ralentissement de ce secteur de l’économie, particulièrement les activités directement liées au consommateur”, a dit l’ONS, évoquant la vente au détail, la restauration, l’édition, les activités de diffusion audiovisuelle et les biens et activités culturels.

La production industrielle a certes augmenté plus vigoureusement, de 0,7%, mais cette accélération est due aux besoins accrus de chauffage du fait de températures hivernales très rigoureuses et de la relance d’un important oléoduc en mer du Nord. La partie proprement manufacturière de la production industrielle, qui comprend la construction automobile, n’a progressé que de 0,2%.

L’activité au Royaume-Uni n’a, il est vrai, pas été aidée par les facteurs climatiques, avec le passage de la “Beast from the East” (la “bête de l’est”), un vent glacial accompagné de chutes de neige qui a frappé le Royaume-Uni à partir de la fin février puis de la mi-mars.

“Les chiffres d’aujourd’hui reflètent l’impact d’un temps exceptionnel en mars, mais notre économie est solide”, a assuré le ministre des Finances, Philip Hammond, mettant en avant “une croissance ininterrompue chaque année depuis 2010 et qui va se poursuivre, un taux de chômage au plus bas depuis 40 ans et des salaires qui progressent”.

L’ONS a dit avoir mesuré “un certain impact de la neige dans les secteurs de la construction et des ventes au détail”, mais ajouté que son effet avait globalement “été faible, avec quasiment pas d’impact sur le reste de l’économie”.

Mauvais signes

Au-delà du mauvais temps, les milieux d’affaires sont peu rassurés par la perspective du Brexit, malgré la conclusion en mars d’un accord de transition qui permettrait au Royaume-Uni de conserver en l’état ses liens économiques avec l’UE jusqu’à la fin 2020.

“Les entreprises sont aux prises avec l’incertitude du Brexit”, a souligné l’organisation patronale CBI, appelant “au compromis” entre Londres et Bruxelles afin qu’un accord satisfaisant pour l’activité soit conclu d’ici au départ britannique de fin mars 2019.

Les consommateurs ont pâti pour leur part d’un effritement de leur pouvoir d’achat l’année dernière, lorsque le rythme de progression de leurs salaires a été dépassé par une inflation dopée par la dépréciation de la livre sterling consécutive au vote pour le Brexit du 23 avril 2016.

Cette compression des revenus réels a pris fin en ce début d’année, mais la consommation n’en a pas pour autant rebondi de façon majeure.

“C’est le premier trimestre complet depuis que la Banque d’Angleterre a élevé son taux en novembre et les premiers signes ne sont pas bons”, a expliqué à l’AFP David Cheetham, analyste chez XTB. De nombreux observateurs ont déjà enterré la possibilité que la BoE relève son taux à sa prochaine réunion de mai, ce qui faisait fortement baisser la livre sterling vendredi.

L’activité britannique est sur une pente ralentie depuis 2015, année où le pays, avec 2,3% de croissance du produit intérieur brut, paradait en tête des pays développés. Cette progression a depuis freiné à 1,9% en 2016 et à 1,8% en 2017.

Dans ces dernières prévisions publiées le 17 avril, le Fonds monétaire international a prévu une croissance de 1,6% du Royaume-Uni pour cette année, qui serait de nouveau parmi les mauvais élèves des pays développés, la croissance étant attendue par exemple à 2,1% en France et à 2,5% en Allemagne.

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